L’emploi
de la force armée n’est jamais une fin en soi mais toujours le moyen
d’atteindre un objectif politique. La probabilité de succès d’une intervention
militaire à l’étranger dépend donc en premier lieu de la clarté et la
faisabilité de cet objectif et en second lieu des moyens et modes d’action qui
sont consacrés à son atteinte.
Protéger et punir
La
première question à se poser dans le cadre de l'intervention
militaire occidentale qui semble se dessiner en Syrie est donc bien celle de
l’objectif à atteindre. Dans l’immédiat celui-ci paraît humanitaire :
punir un massacre de masse et protéger la population civile d’autres attaques,
non pas illégales car toutes les attaques contre des civils le sont, mais
spectaculaires.
Cet
objectif peut être atteint a minima par
la destruction de l’instrument du délit, comme la France en octobre 2004
détruisant la force aérienne ivoirienne après une agression contre nos forces
mais ne punissant pas le pouvoir politique qui l’avait ordonné. Il s’agirait
donc en l’occurrence de détruire les dépôts de munitions et de produits
chimiques par des raids. Cela suppose évidemment de connaître leur localisation
mais aussi de pouvoir les traiter sans toucher la population civile, ce qui est
plutôt délicat dans le cas de munitions chimiques. Pour pallier cette
difficulté, on peut imaginer de monter une opération de saisie des dépôts par
des unités de forces spéciales mais c’est l’opération elle-même (en fait
plusieurs puisqu’on parle d’au moins sept dépôts identifiés) qui est très
risquée.
On
peut aussi envisager de frapper d’autres cibles militaires clairement
identifiées. Détruire les sites de défense anti-aérien par missiles de
croisière présente l’avantage de faciliter la suite des opérations aérienne.
Outre que cela peut indiquer que l’on envisage d’aller plus loin dans le temps
ou l’engagement, ce type de cible est cependant assez éloigné de ce qui a causé
l’intervention. On attaquera donc aussi des cibles plus symboliques comme le
ministère de la défense et les bases aériennes, sources d’autres attaques
spectaculaires possibles contre la population.
Cette
campagne de raids, pour peu qu’elle reste limitée, peut déboucher sur un point
d’équilibre. Le régime syrien peut accepter de limiter visiblement l’emploi de
sa force et cela peut suffire à satisfaire la coalition occidentale. La guerre
civile continuera son cours mais l’obligation de « faire quelque
chose » aura été satisfaite.
Ce
point d’équilibre peut toutefois ne pas être atteint en cas de refus d’Assad et
son acceptation de l’escalade ou si la coalition élargit la notion de protection
des populations en désignant le régime d’Assad comme ennemi (la réflexion
stratégique fonctionnant toujours sur deux camps, il est difficile de désigner deux ennemis antagonistes à la fois, les djihadistes attendront).
Chasser
Compte
tenu des grandes réticences diplomatiques et du faible soutien public que l’hypothèse
d’une guerre ouverte contre le régime suscite, les marges de manœuvre
militaires sont assez réduites pour réaliser cet objectif éventuel.
La
première option est, à partir d’un groupement naval et de l’île de Chypre,
peut-être aussi depuis la Turquie, une campagne aérienne d’intensité
progressive, passant par des frappes de rétorsion puis la mise en place d’une
zone d’interdiction de vol, puis des frappes ciblées contre l’armée syrienne de
moins en moins justifiées avec le temps par la protection de la population. Les
risques de cette option sont nombreux. Contrairement à la Libye en 2011, les
camps sont très étroitement imbriqués. Les frappes aériennes y sont donc
délicates avec toujours le risque de provoquer par accident un massacre civil,
en contradiction avec la justification première de l’intervention. Elles
s’effectueront de plus face à des forces disposant de moyens anti-aériens
nettement plus performants que ceux de l’armée de Kadhafi. En affaiblissant le
camp d’Assad, elles présentent enfin l’inconvénient de renforcer les rebelles
de tous les camps, y compris ceux qui nous sont hostiles.
La
seconde option, complémentaire de la première, est le couplage avec une ou plusieurs factions rebelles, en association
avec la Jordanie, le Kurdistan
irakien et peut-être la Turquie et l'Arabie saoudite. On arme, on forme, on finance et éventuellement on accompagne avec des forces discrètes. Par rapport à la campagne aérienne, elle
présente le triple avantage d’être moins coûteuse financièrement, d’être moins
« agressive » diplomatiquement et, en cas d’échec, de pouvoir être
retirée avec moins de dégâts d’images. Elle nous permet aussi et surtout de privilégier les factions qui nous sont favorables.
Il
reste enfin toujours la possibilité d’un engagement terrestre de grande
ampleur. Le seul à même de mettre fin au conflit en cours mais avec le risque
de remplacer une guerre gagnée par un enlisement. Les Etats-Unis n’ont
assurément pas le courage actuellement de se lancer dans une entreprise de ce type et les
autres alliés n’en ont pas les moyens seuls. Sans même parler des contraintes
diplomatiques qu’elle implique cette voie est pour l’instant inconcevable, sauf
sous la forme d’une force de stabilisation une fois la paix acquise.
D'un autre côté, il ne faut pas oublier que le régime syrien et ses alliés iraniens et libanais disposent aussi de capacités de représailles contre la coalition, sensiblement les mêmes que pendant la guerre froide qui les avaient opposés aux nations occidentales dans les années 1980. De la même façon qu’à Beyrouth en 1983, le Hezbollah peut par exemple s’en prendre assez facilement aux 670 soldats français encore présents dans au Liban dans le cadre de la FINUL.
D'un autre côté, il ne faut pas oublier que le régime syrien et ses alliés iraniens et libanais disposent aussi de capacités de représailles contre la coalition, sensiblement les mêmes que pendant la guerre froide qui les avaient opposés aux nations occidentales dans les années 1980. De la même façon qu’à Beyrouth en 1983, le Hezbollah peut par exemple s’en prendre assez facilement aux 670 soldats français encore présents dans au Liban dans le cadre de la FINUL.
S’engager militairement en Syrie, c’est s’engager dans un conflit aussi complexe et mouvant que celui du Liban à partir de 1975. Cela ne signifie pas qu’il faille y renoncer mais qu’il faut bien comprendre que le faire avec timidité, c’est s’assurer à terme de subir de sévères humiliations.
Nous n’avons rien à faire dans ce merdier, nous aurions une Europe forte et protectrice nous serions déjà intervenus au début, mais elle n’existe pas cette Europe.
RépondreSupprimerQuant aux USA ils ont déjà fait assez de mal avec leurs gros sabots.
La ligue arabes à cas se débrouiller ! Ils sont si puissants et si malin, elles a cas former une coalition de 60 000 casques verts avec l’aide logistique des occidentaux et ils vont pacifier la Syrie avec l’aide des Turks et des Kurdes.
Un CA Turque sécurise une zone tampon sur la frontière pour les réfugiés
Une Brigade Kurdes sécurise la pointe est pour les villages Kurdes
Une Division lourde Egyptienne par et la Jordanie (cela changera des émeutes)
Une Division lourde d’Arabie Saoudite (avec les Paki) par la Jordanie
(avec des éléments OMAN, Qatar, EAU)
L’EUROPE se charge de participer à la sécurisation massive du LIBAN si le Hezbollah bouge, paf le chien (Nous ne serons pas de trop)
Que leurs pognons servent à quelque chose pour une fois, ils ont cas payer des mercenaires arabes, plutôt que de subventionner les terroristes.
Et bien sur les USA se charge de garantir la sécurité d’Israël (ils vont être un peu nerveux) et de la Jordanie bien sûr.
Comme pour le Mali, la plaisanterie n'a que trop duré. On se ridiculise à force de jouer les matamores et ne rien faire. Soit notre sensibilité est heurtée et on y va vraiment, et pour la securité des forces engagées, on est prié de ne pas annoncer d'éventuels raids et les modus operandi. Soit on se tait, et on accepte des images insoutenables de massacres. Mais par pitié qu'on ne nous rejoue pas le raid sur Baalbek.
RépondreSupprimerComme d'habitude, post très intéressant et éclairé. J'ai bien compris votre propos sur les options militaires si elles devaient être appliquées, ce que je ne souhaite pas, néanmoins, je regrette que la problématique de savoir qui sont les vrais coupables dans l'usage des armes chimiques en Syrie ne soit pas évoquée. L'histoire à montré (Ex-Yougoslavie, 2ème guerre du Golfe, par exemple parmi tant d'autres), que l'Homme est capable de truquer la vérité, voire d'orchestrer les manipulations les plus audacieuses en vue de justifier une action rétorsion motivée par des intérêts souvent très obscurs. Et si nous laissions les Syriens se démerder?... Des civils meurent? Des innocents? Oui, c'est triste mais c'est l'histoire de l'humanité. Alors laissons l'histoire se faire en Syrie, comme elle s'est faite en France durant des siècles avec ses cohortes de morts innocents. Ne réagissons pas sous l'émotion et gardons notre sang-froid. Ne laissons pas les images qui arrivent de Syrie (ou d'ailleurs) perturber nos consciences. Ne culpabilisons pas d'être ce que nous sommes aujourd'hui et soyons fiers et dignes du legs de notre histoire passée qui a laissé ses cohortes de morts innocents. ne nous reprochons pas de vivre bien, car nous y travaillons. Et occupons nous un peu plus de résoudre les problèmes propres à notre Nation, de raviver les valeurs qui sont siennes, de concentrer nos efforts pour redresser la barre. Ne nous égarons pas. Ne vendons pas notre âme au diable pour satisfaire d'artificielles ambitions d'influence. Ne nourrissons pas aujourd'hui le chien enragé qui viendra demain mordre la main de nos enfants.
RépondreSupprimerA ceux persuadés que rien ne sera pire que le régime de Bachaar.
RépondreSupprimerA ceux qui n'ont pas peur de regarder la réalité bien droit dans les yeux.
A ceux qui croient qu’on ne peut pas vomir sans intox alimentaire ou autre petit virus.
A ceux qui pense que l'islamisme n'est pas un virus mortel.
A Bernard Henri-Levi.
A Laurent Fabius & François Hollande.
A ceux qui pensent que nos politiciens agissent par humanisme.
A ceux qui pensent que les Droits de l’Homme valent mieux que les Devoirs de Chacun.
A ceux qui pensent: "rien de tel qu'une bonne guerre civile pour faire le ménage... ».
A ceux qui pensent qu’on devrait envoyer nos soldats aider la rébellion syrienne.
A ceux qui pensent que le budget de la défense est une variable d’ajustement.
A ceux qui veulent voir la Bête.
Je dis:
regardez ceci: http://www.youtube.com/watch?v=eu3sf9B4XAc
Mais de grâce, épargnez ceci à vos femmes, et préparez vous au pire : il est déjà à nos frontières...
A qui profite le gazage de la population syrienne ? Aux insurgés ou à Bachar al Assad ? Sachant que l'on avait mis en garde (Obama ou d'autres) le dictateur syrien, si celui-ci utilisait du gaz dans sa guerre, aurait-il vraiment pris le risque d'une coalition internationale contre la Syrie ?
RépondreSupprimerPar contre, pour les insurgés, "quelle aubaine" que ce gazage. Ils peuvent dire : "merci Bachar !"
Sur les manipulations US pour entrer en guerre :
http://guerre.libreinfo.org/manipulations/histoire-tronqquee/320-150-ans-de-mensonge-dans-la-politique-etrangere-des-usa-.html
Sur la Syrie :
http://www.wikistrike.com/article-foutage-de-gueule-syrie-les-videos-attestant-du-massacre-du-21-08-ont-ete-mises-en-ligne-par-maj-119714031.html
Les rebelles syriens :
http://www.wikistrike.com/article-vous-voulez-une-preuve-video-de-rebelles-lancant-des-obus-chimiques-119712779.html
Lorsque que le Président Hollande dit :
"La France est prête à punir ceux qui ont pris la décision infâme de gazer des innocents."
Je tiens à rectifier : "La République Française est prête à punir..."
Car la France ce n'est pas la République Française et vice-versa.
Quand on sait que la guerre où il a été le plus fait usage de produits chimiques n'est autre que la guerre du Viet-Nam (agent orange entre autre)...on peut se demander quelles sont les vrais motivations des américains?
RépondreSupprimerLe préalable politique indispensable pour une sortie de crise en Syrie est la création d’une opposition unie et démocratique (au moins en apparence et dans les paroles). C’est sous cet unique préalable que les occidentaux et les pétromonarchies pourront intervenir efficacement en soutien de la résistance. ‘From behind’ pour utiliser la dernière expression à la mode.
RépondreSupprimerPour le moment nous sommes loin, très loin de ce scénario. Nous sommes au contraire dans une situation d’échec politique favorisant l’atomisation et la radicalisation des oppositions. So what ?
- Procéder à des frappes de décapitation pour tenter d’éliminer le clan El Assad ? Le camarade Bashir est certainement un criminel de guerre et un criminel contre l’humanité, mais il n’en reste pas moins un acteur rationnel respectant les rapports de force. La nature ayant horreur du vide, pas sûr que ceux qui le remplaceront soient aussi lisibles (notamment pour Israël). En outre ces frappes pourraient favoriser grandement l’éclatement du pays en zones confessionnelles et les Turques, nos alliés, seraient certainement ravis d’avoir un Kurdistan autonome à leurs frontières. Sans compter la contagion au Kurdistan irakien qui est déjà pratiquement autonome dans les faits, ce qui risquerait de décupler la guerre civile de basse intensité qui sévit déjà en Irak.
- Procéder à des frappes aériennes contre l’armée syrienne ? Les américains ont les moyens SEAD/DEAD pour le faire et ils ont le meilleur outil militaire au monde pour cibler et détruire. Sauf que les lignes de front sont mouvantes, entremêlées et qu’il ne doit pas être évident du cockpit d’un F-15 ou d’un F-18 évoluant à 300 nœuds, de faire la différence entre deux barbus se tirant dessus à faible distance… au milieu des populations civiles.
- Intervenir au sol ? Impossible. L’opinion publique américaine est encore traumatisée par les bourbiers afghans et irakiens et le niveau politique a retenu, en tout cas il faut l’espérer, la leçon apprise par les néo-cons de W.Bush : concernant la démocratie, on ne peut pas rétablir une chose que les peuples ne connaissent pas.
- Créer une ou deux zones d’exclusion aérienne ? Ça n’est plus dans les moyens financiers des États-Unis. La procédure de ‘séquestration’ ampute leur budget de la défense de 46 milliards de dollars (d’accord, ici en France, nous nous satisferions très bien de ce qui reste !) mais surtout, Obama va rentrer dans la seconde partie de son dernier mandat et devenir ce que les américains appellent un ‘canard boiteux’ : un Président incapable de se faire suivre par sa propre majorité. Alors de là à avoir un vote favorable au Congrès pour une zone d’exclusion aérienne…
Finalement ne reste que la solution des frappes à distance. Ça risque de ne pas servir à grand-chose, sauf et c’est important pour les États-Unis, à garder de la crédibilité pour ne pas passer pour des acteurs affaiblis se retirant du monde.
Quant à la France et à la Grande-Bretagne, ce ne sont plus que des acteurs régionaux. Si la France a encore, mais pour combien de temps ?, les moyens d’intervenir brillamment dans des ‘bananas war’ comme celle du Mali, une guerre contre un pays tel que la Syrie n’est plus dans nos moyens sans la participation (ou plus exactement, la tutelle) américaine.
Ecoutez les gars j’essaie de lire le livre blanc tranquillement (160 pages du lourd) Alors pas de frappe à la « con » je ne vais pas réussir à le finir. Je rappelle que la coalition est merdique, les gouvernements Européen merdiques, la Haute représentante merdique, M Fabius … pas de budget, pas d’Allemands, des moyens usés, la Lybie cela a durée au moins 10 mois avec des frappes chirurgicales à la pince à épilé et il va falloir remettre cela dans 1 ans. Ils ne nous aimerons pas plus, pas moins, et si cela riposte (au Liban par exemple) cela deviendra « la chainli » On ferme nos gueules et on s’occupe de safari anti-terrorismes en Afrique.
RépondreSupprimerA oui j’insiste on met le paquet pour protéger le LIBAN militairement et sécuritairement, si la ligue Arabe par miracle prend l’opération avec son armée de mercenaires parfait (on peut à la limite en profiter pour éliminer le Hezbollah oups )
Et bombarder des sites SEVESO SEUIL HAUT je ne suis pas sur que cela soit bien pour la population.
RépondreSupprimerJe ne sais pas encore ce que je dois préférer: l'article qui a donné lieu à des commentaires ou les commentaires eux-mêmes.
RépondreSupprimerA la lecture des commentaires on se rend compte que décidément les Francais ne connaissent pas grand chose, sinon rien, à cette partie du monde.
RépondreSupprimerAllo quoi ! Le Français ! vous pourriez développer ?
SupprimerMon colonel,
RépondreSupprimerQue pensez-vous de cette situation :"Armée : 2 500 euros pour s'équiper convenablement" ?
Article ici :
http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/08/27/armee-2-500-euros-pour-s-equiper-convenablement_3467120_3232.html
Les commentaires sur l'article sont édifiants.
Avant de penser stratégie, il serait louable de penser à l'équipement individuel de nos soldats. Je vous rappelle que le Maréchal Davout et le général Patton était très dur pour la discipline militaire mais ces deux chefs de guerre faisaient en sorte que leurs soldats avaient les meilleures conditions de vie et matérielles pour remplir leurs missions.
Une armée est dirigée par des ronds-de-cuirs officiers "supérieurs" et n'ayant aucune considération pour les troupes et ce que pensent celles-ci de leur matériel sur le terrain est une armée sclérosée.
Dans un conflit majeur, cela risque d'être un désastre comme en 1940, très bien décrit par Marc Bloch dans "L'étrange défaite".
Je pense qu'il n'y a qu'un compromis qui paraîtrait acceptable à tous les partis et qui serait bien plus raisonnable que l'attitude stupide qui consiste à menacer d'une action punitive:
RépondreSupprimerLes armes chimiques sont un ennui pour tout le monde y compris les russes.
Si elles venaient à tomber dans les pattes de terroristes, tout le monde serait perdant, y compris les russes.
La probabilité que cela se produise augmente avec l'enlisement.
Obtenir un compromis international en échange de la récupération par les russes des stocks que Assad détient constitue une porte de sortie intelligente.
Ce danger pour les populations syriennes serait écarté au moins en théorie. La communauté internationale verrait leur risque de propagation se réduire. Poutine apparaîtrait comme sauveur et les stocks récupérés ne sont rien au regard des siens. Obama et Hollande ne perdraient pas la face.
Je trouve que vous prêter beaucoup d'influence à Poutine : s'il joue le soutien inconditionnel au régime syrien, c'est qu'il a ses raisons. On a dit : des bases navales en Méditerranée (toujours l'accès aux mers chaudes), les ventes d'armements, les questions d'acheminement de l'énergie...Mais il y a surtout la volonté de redorer le blason bien terni de la Russie, montrer que ce pays compte encore au niveau mondial. Et c'est là que le bât blesse car il est aussi piégé par son allié syrien qui lui aussi peut n'en faire qu'à sa tête et l'obliger à suivre. On l'a bien vu récemment en Corée du nord : la Chine a été souvent spectatrice des rodomontades du nouveau leader bien aimé, à la grande fureur des dirigeants chinois. Des gens comme Kim Jong-un, Assad et compagnie ont appris à se méfier autant que de leurs amis de leurs ennemis.
SupprimerIl est vrai qu'on pourrait s'interroger sur la véritable valeur stratégique de la Syrie aux yeux des Russes.
SupprimerLa première idée qui vient à l'esprit est une constante: "l'accès aux mers chaudes".
La Méditerranée étant une mer chaude, on se dit tout de suite: "ben voilà! L'intention stratégique de la Russie est de se garantir un accès "aux mers chaudes". Because constante historique depuis le Tsar machin chouette. Un modèle pour penser avec qui nous vient du... euh XIXième siècle, non?
L'actualité, cette vache contrariante, nous dit pourtant le contraire: par l'effet du réchauffement climatique, la Russie découvre plutôt son immense et naturel accès à une mer devenue "tiède", l'océan arctique. Là bas, elle ne dépend de personne d'autre qu'elle même et de sa propre volonté pour devenir une vraie puissance maritime, au sens plein du terme. Et ça, elle en a toujours rêvé.
Par comparaison, la Méditerranée, mer fermée à l'ouest par Gibraltar, au sud par le canal de Suez, bordée sur sa rive septentrionale par des Etats membres de l'Otan et sur sa rive méridionale par des Etats magrébins à qui elle ne peut vendre rien d'autre que des MIG 29 dépassés ou des T 72 vaguement améliorés est, il faut le dire, un cul de sac stratégique et une annexe du commerce mondiale (avec quelques îles dont le statut bancaire et fiscal avantageux attire les capitaux de riches épargnants, plus apparatchik dans leur mentalité qu'entrepreneurs dans leur comportement).
Big deal.
La Russie n'a même pas besoin de la Méditerranée pour avoir accès au Danube qui permet lui-même l'accès à la Mittel Europa, siège de la véritable puissance industrielle et bancaire de l'Europe: cet accès-là est gouverné par d'autres verrous, qu'elle ne néglige d'ailleurs pas.
Tout au plus peut-elle exercer dans cette zone une capacité de nuisance dans le cadre de la partie d'échecs qu'elle joue pour reconquérir son statut de grande puissance - ce qu'au demeurant elle fait - en s'appuyant sur la dernière surface qui lui fournit une base solide: la Syrie.
Cette capacité de nuisance n'est pas dirigée contre nous, Européens, mais contre l'acteur qui lui semble à sa mesure (pas la France, les Etats Unis).
Si dans l'affaire il faut faire un peu de mal à la Syrie, la Russie le fera. Et ce n'est pas la perspective de perdre son accès prétendu à une mer chaude qui va fondamentalement la dissuader.
La Russie, dans le cas présent, est plutôt renvoyée à une accusation d'irresponsabilité, qu'elle a déjà soutenue avec détachement en ce qui concerne l'Iran: d'un côté elle fournit des moyens de nuisances à des puissances régionales (le nucléaire pour les Iraniens, l'appui diplomatique pour les Syriens qui utilisent l'arme chimique) mais de l'autre, elle s'en lave les mains, ce qui n'est pas conforme à l'image qu'elle se fait elle même de la grande puissance responsable, qu'elle veut redevenir.
Si "piège" il y a, il est là. Mais c'est un piège dont les mâchoires sont bien faibles: les Syriens ne détiennent aucun avantage que les Russes ne puissent se permettre d'abandonner si on leur propose d'y gagner plus.
Le G20 arrivant, ils attendent avec délectation d'y gagner plus...
Quant à l'allié syrien, ils lui ont fait savoir, en exfiltrant immédiatement leurs expatriés à la première menace d'intervention militaire américaine sérieuse, qu'ils n'étaient pas prêts à lui sacrifier la vie d'un seul technicien russe.
Le cadre symbolique de l'action russe a donc été posé de façon assez nette. Point remarquable: rien dans ce cadre n'entrave fondamentalement une action armée contre la Syrie. Il y a certes le cinoche à l'ONU, où la Russie met son veto, mais à part ça, la politique de Poutine est "bizarrement" un ventre mou.
Le jeu que jouent les Russes est donc très ouvert.
Un point de vue assez semblable :
RépondreSupprimerhttp://www.economist.com/news/briefing/21584398-western-attack-will-not-want-firepower-or-targetsbut-it-will-need-be-finely-judged-if
Peu de solutions
RépondreSupprimerLes islamistes salafistes Al-Nosra affiliés à Al-Qaïda que nous combattons et qui sont armés par les pétromonarchies et les USA, s'étendent très vite au sein de la rébellion. L'ASL aurait perdu tout contrôle, et le flot de déserteurs de l'armée régulière la rejoignant serait désormais nul car al-Qaida fusillent ces derniers ainsi-que les prisonniers, des ouvriers alaouites, kurdes, des chrétiens ou décapitent les prêtres catholiques, sunnites qui respectent la laïcité, utilisent des gaz, enlèvent les journalistes ou n'importe qui contre rançon, voitures piégées etc.. Elles sont responsables d'une partie du carnage civil...
L'idéal serait une opération militaire de grande envergure pour sécuriser le Liban et neutraliser à la fois Assad et ceux qui le combattent. Suivie évidemment d'une occupation de la Syrie par des troupes tout en conservant les militaires de l'ancien et nouveau régime pour le maintient de l'ordre. Mais cette option, seule efficace n'obtiendra jamais l'approbation internationale.
Un couplage avec une quelconque faction même favorable,à la condition de les encadrer, les entraîner et de les doter d'un armement moderne mais qui paie ? L'exemple du chef de l'opposition Ahmad Jarba reçu au Château n'est qu'un transfuge des services secrets saoudiens dont le seul but est de faire de la Syrie un émirat islamiste. J'eusse préféré bien sûr que ce soit des francophones tel Abou Hajar des Faucons de Damas mort au combat le 19 juin dernier ou Georges Sabra...Mais la France ne les arme pas ! Est-ce une erreur ? bien sûr !
Pas de destruction des labos et dépôts chimiques le risque est bien trop grand que des factieux s'en emparent et l'utilise. Ce type d'intervention par des frappes ciblées ne résout donc en fait rien mais aggrave la souffrance des peuples et risque un
embrasement du proche Orient à commencer par le Liban.
Si Hassan Nasrallah a donc gagné le droit de s'armer rendant de ce fait caduque la résolution 1559 adoptée par le conseil de sécurité de l’ONU en septembre 2004, exigeant le désarmement de toutes les milices libanaises. Les milices salafistes d’Ahmad El Assir n'ont aucune hésitation à s'affronter avec l'armée régulière à Saïda le 23 et 24 juin. Au centre des belligérants il y a la FCR française et ses 700 hommes qui serait fatalement sacrifiée...