Les sociétés Mc
Kinsey et Egon Zehnder viennent de réaliser une étude sur l’impact des cadres
supérieurs sur les performances de leur entreprise depuis 2007. Plus de
5 560 cadres de 47 grands groupes de tous secteurs ont été évalués sur une
échelle de 1 à 7 sur huit compétences clés : conduite du changement,
service du client, capacité à recruter des talents, capacité à augmenter les
résultats financiers, conceptualisation stratégique, compréhension des marchés,
capacité à travailler avec des partenaires, capacité à constituer et diriger
efficacement des équipes.
Le premier
résultat de cette étude, peu surprenant et assez rassurant, est qu’il existe
bien une corrélation entre la qualité moyenne des dirigeants et le résultat des
organisations. Celles qui réussissent bien ont une masse critique de dirigeants
bons dans tous les domaines mais ceux-ci sont rares (11 % ayant un niveau moyen
de 5 ou plus et 1 % à 6 ou 7). Celles qui réussissent le mieux sont celles qui
parviennent à associer des cadres ayant chacun au moins trois très bons niveaux
de compétences mais dans des domaines différents. Et s’il faut privilégier une
seule des huit compétences, c’est la compréhension des attentes du client qu’il
faut choisir car c’est celle qui a le plus d’influence sur le résultat de
l’entreprise. Un autre résultat intéressant est qu’une formation intensive sur
un an ne peut permettre d’améliorer la compétence d’un cadre que de deux
niveaux dans un seul axe ou d’un niveau sur deux axes. La formation de hauts-potentiels
demande du temps et un grand investissement.
Il est intéressant
de croiser cette étude avec celle de SHL baptisée « Global
leadership » (un million d’évaluations) et qui vise à déterminer le nombre
de leaders parmi les salariés d’un pays. Le leader effectif est défini comme un
individu possédant la plupart des compétences clés comme la capacité à diriger,
influencer, motiver, communiquer et travailler en harmonie tout en étant
performant, afin d’atteindre les objectifs de l’entreprise. On peut faire le
lien avec les cadres classés 5 ou plus dans l’étude de Mc Kinsey-Egon Zehnder.
Avec 7 % de salariés considérés comme leaders, la France est classée au 13e rang.
Le contraste avec les 13 % de l’Allemagne (2e rang après Hong
Kong) est déjà saisissant et mériterait une étude plus précise. L’étude examine
aussi le cas des leaders potentiels, c'est-à-dire ceux qui présentent des
caractéristiques de leaders mais ont besoin de développement additionnel pour
réaliser pleinement leur potentiel. Cette fois la France n’est même plus dans
le Top 25. De nombreux pays émergents en revanche, comme le Mexique, la
Turquie, le Brésil ou l’Inde, y figurent en bonne place.
La conclusion de
ces deux études est simple : nos entreprises sont de plus en plus
pénalisées par rapport à leurs rivales étrangères en raison d’un système de
formation et de sélection des leaders moins adapté aux évolutions du Monde.
Il serait
intéressant de faire une étude similaire dans nos armées pour tous les colonels
et officiers généraux, à condition de définir les qualités de l’officier, c’est
le moins difficile, de parvenir à les mesurer, c’est plus compliqué, et surtout
de les confronter à une mesure de l’efficacité des unités plus difficile à
déterminer que le simple montant d’un chiffre d’affaire. Toujours est-il que
s’il existe un lien entre le niveau de l’encadrement des entreprises françaises
et celui de nos forces armées, du fait d’une culture proche dans la gestion des
ressources humaines, il y a lieu de s’inquiéter.
Travaillant dans une multi-nationale US, j'ai pas mal de contacts avec des clients grands groupes français implantés mondialement et plus les années passent plus je me pose des questions quand à l'efficacité du management "à la française" :
RépondreSupprimer- Une intelligence/culture "individuelle" très dévelloppée, largement supérieure à la plupart des autres nationalités mais très mal utilisée si ce n'est pour impressionner son interlocuteur.
- Une très faible empathie, et une grande difficulté à comprendre ce qui n'est pas français et formaté selon les grandes écoles parisiennes > Enorme obstacle commercial
- l'omniprésence des "maffias" des grandes écoles, qui visiblement sculptent absolument toute la progression de nombreux cadres, ce n'est souvent pas leurs efficacité, résultats qui les ferront avancer mais bien leur origine (l'AdT et St Cyr a cet égard produit visiblement les mêmes effets)
- Les multiples couches de management, cachées et nombreuses, organigrammes dignes d'armées mexicaines, entrainement saucissonage des responsabilités et facilités à l'ouverture du parapluie (c'est pas moi, c'est l'autre qui n'a pas suivi le process)
- Culture hypertrophiée du chef, on ose a peine respirer tant que le chef n'a pas dit son mot (du moins en public quand le chef est présent)
- Peu de discussions/contestations en "avant projet", par contre énormement de freins et obstacles une fois la décision prise : quand on élabore un projet, personne n'ose lever le petit doigt pour émettre un avis "à peine contraire", on a que des acquiesements silencieux, une fois la décision prise, là par contre tout le monde ne se gêne pas pour mettre des batons dans les roues. A l'inverse de ce qui ce passe souvent dans les entreprises anglo-saxonnes, ou les discussions sont "viriles" et sans toujours tenir compte de la hiérarchie avant la décision, mais une fois la décision prise, tout le monde l'applique sans revenir dessus
- La prépondérance de l'ingénieur sur le commercial, ce qui fait souvent perdre de nombreux contrats (très vrais dans le domaine de l'armement) car l'ingénieur ne croit qu'au perfomances techniques de son invention, aux USA les commerciaux sont véritablement considérés comme les décideurs, ils vendent ce que les clients recherchent et imposent aux usines de fabriquer ce que le client veux, en France c'est plutôt l'ingénieur de production qui impose son choix au commercial et par dela essaye de le faire sur le marché avec souvent de nombreux échecs.
Je vous conseille la lecture de La logique de l'honneur de Philippe d'Iribarne où il compare le fonctionnement d'entreprises françaises, américaines et hollandaises. C'est très éclairant.
SupprimerMerci de ce précieux conseil mon colonel, cela m'intéresse d'autant plus que je suis "imprégné" de culture franco-anglo-néerlandaise, ayant travaillé/travaillant pour des sociétés issues de ces trois pays, en étant en plus trilingue français, anglais, néerlandais. Je vais me "ruer" sur le dit ouvrage.
Supprimer@ Anonyme,15/10/12 à 1.31.
RépondreSupprimerJe suis ok.
je vous suis.
Vous pourriez m'apprendre à diriger un grand groupe?
Et à partager cette passion? A la faire partager?
Le monde est grand. la France est... un peu petite. Mais nous on est grand.
Le diagnostique est ok.
La thérapie?
Ce grand corps malade, comment on le soigne?
@ Anonyme
RépondreSupprimerJe suis d'accord avec le constat, pour l'avoir fait moi-même après avoir travaillé dans le même environement français et anglo-saxon... S'y rajoute la mode du jeunisme des patrons français: au-dessus de 45 ans un cadre est inutilisable... Sauf moi (le chef) bien sûr! La peur de manager, c'est à dire de savoir prendre des décisions et des responsabilités...Et le respect de la parole donnée (depuis les années Mitterand). Enfin, la promotion au mérite, ou sur les résultats tangibles, n'existe pas ou plus, puisqu'il est si facile de critiquer ce que les autres ont fait... Sans mettre évidemment les mains dans le cambuis!
Tout ce qui faisait la force des société françaises c'est perdu... Pas perdu pour tout le monde! A force de suivre les Mac Kinsey et autres sociétés de conseil américaines, (qui n'appliquent pas ces recettes chez eux): jeunisme, organisation matricielle, "chaos management", on en arrive là! Il faut sans doute imaginer que le suivisme du conseil anglo-saxon en bloc, s'apprend dans les grandes écoles françaises... Plus que dans les universités américaines.