Les années 1990 voient un certain nombre d’États
africains s’affaiblir d’un coup sous le triple effet du départ des sponsors
étrangers, de l’imposition d’un désendettement public massif par les
institutions financières internationales et du multipartisme forcé. En
attendant des effets positifs à long terme, ces politiques ont d’abord pour
effet d'aggraver une crise profonde des administrations et des services
publics, tandis que les nombreux partis politiques qui se forment sans aucune
pratique de la vie démocratique commencent souvent par se constituer des
milices armées. Les élections deviennent souvent des batailles électorales au
sens premier. Beaucoup de ces États, aux armées affaiblies, se voient assaillis
et contestés par des dizaines, voire des centaines, de groupes armés irréguliers,
seigneurs de guerre, bandes criminelles, forces d’autodéfense, etc. parfois
soutenus par les États voisins rivaux. On voit ainsi du golfe de Guinée à la
Somalie en passant par l’Afrique centrale, se former des « complexes conflictuels » régionaux englobant
pendant des années plusieurs États et des organisations armées irrégulières
dans une mosaïque compliquée de rivalités violentes. On est loin du monde
apaisé libéral-démocratique décrit par les thuriféraires de mondialisation.
L’Afrique subsaharienne
devient le lieu principal et presque unique après l’échec en ex-Yougoslavie des
opérations de maintien de la paix des Nations-Unies, en conjonction avec la
tentative de mettre en place une structure africaine de résolution des conflits
sous l’égide de l’Organisation de l’unité africaine, Union africaine (UA) en
2002. À côté des missions de paix onusiennes, les « MI », on voit
donc se former aussi des forces régionales, les « FO », qui tentent
également gérer les complexes de conflits, avec moins de moyens et pas plus de bonheur.
La France reste le seul acteur militaire extérieur en Afrique subsaharienne
tout en y étant également le plus puissant. Sa position est forcément délicate au
sein de cette instabilité générale. Les opérations d’évacuation de
ressortissants se multiplient, au Zaïre, au Togo, au Congo-Brazzaville, en Guinée,
au Libéria, etc., mais le pire est de se retrouver au milieu du désordre sans
trop savoir quoi faire.
Après le Rwanda et le Zaïre,
devenu Congo en 1997, l’instabilité frappe la République centrafricaine où la France
est présente militairement depuis 1980. À
partir d’avril 1996, les mutineries se succèdent à Bangui. La France lance l’opération
Almandin afin de protéger ou évacuer les ressortissants, la présidence et
différents points sensibles. Almandin
connaît plusieurs phases d’accrochages avec les mutins, de mouvements de foule
et de répits, avec notamment l’assassinat de deux militaires français, jusqu’à
ce que le président Chirac et le Premier ministre Lionel Jospin se mettent
d’accord pour désengager les forces françaises d’un environnement aussi
instable. Au printemps 1998, les forces
françaises laissent la place à la première d’une longue liste de mission interafricaines
qui ne contrôlent en réalité pas grand-chose.
Quelques semaines avant le
départ de la dernière unité française, le conseil de Défense du 3 mars
1998, a décidé que selon le slogan « ni ingérence, in
indifférence » les forces françaises ne seraient désormais plus
engagées que dans le cadre d’opérations sous mandat et drapeau européen, les
missions EUFOR, ou en deuxième échelon de forces africaines régionales, que
l’on appuie avec le programme de Renforcement des capacités africaines de
maintien de la paix (RECAMP) français d’abord puis européen. Il n’est plus
question de guerre, avec engagement direct ou indirect de forces auprès
d’armées au combat, mais, dans l’esprit de l’époque, de « ramener la
violence vers le bas ».
Cela réussit parfois. En
juin 2003, à la suite d’une résolution du CSNU, l’Union européenne reçoit le
mandat de stabiliser la province d’Ituri dans l’est du Congo, en attendant le
renforcement de la Mission des Nations-Unies au Congo (MONUC). C’est une
première pour l’UE en Afrique qui s’appuie sur la France pour réaliser la
mission. À partir de la base d’Entebbe
en Ouganda, l’opération Artémis
déploie donc un GTIA et un groupement de Forces spéciales (GFS) français sur
l’aéroport à Bunia, soit un millier d’hommes dans une ville de 300 000 habitants. Il y a
de nombreux petits accrochages, mais la présence dissuasive française suffit
presque sans combat à faire cesser les violences et à protéger la population
jusqu’à de nouveaux bataillons de la MONUC mi-août. L’opération Artémis est un succès indéniable et elle
devient même une référence. L’Union européenne est donc capable de mener des
opérations de stabilisation en Afrique et il est possible de rétablir l’ordre
sans faire la guerre. On oublie cependant qu’il s’agit surtout d’une opération
militaire française, avec 70 % des effectifs totaux, et que le contingent
projeté a été suffisant en volume et surtout en capacité de dissuasion pour
établir la sécurité, dans une région de seulement 300 000 habitants.
Les missions européennes
qui suivent, baptisées EUFOR (European Union Force), sont moins impressionnantes. Lourdes, longues à
monter et coûteuses pour un effet limité, au mieux une présence dissuasive,
comme lors des élections au Congo en 2006 ou au Tchad en 2008. Cette dernière
opération, baptisé EUFOR Tchad/RCA, est assez typique. Les exactions ont débuté
au Darfour soudanais en 2003, la décision européenne d’agir est prise en
octobre 2007, l’opération est décidée Conseil de l’Europe en janvier 2008 et la
force n’est opérationnelle qu’en mars 2008, le temps de réunir 3 700 soldats de
26 pays différents et de laisser passer les combats de février au Tchad
entre le président Idriss Déby et ses opposants. L’EUFOR est constituée de
trois bataillons multinationaux et d’un bataillon d’hélicoptères, dont un détachement
privé russe. EUFOR effectue beaucoup de patrouilles, mais ne combat pas, même
si un homme des Forces spéciales françaises est tué au cours d’une infiltration
au Soudan. Pour 800 millions d’euros, elle assure de loin la protection des
camps de réfugiés, qu’en réalité personne ne menace plus, au Tchad et en
République centrafricaine avant d’être remplacée au bout d’un an par une
mission des Nations-Unies tout aussi peu utile.
Entre-temps, la République
de Côte d’Ivoire (RCI) n’a pas été épargnée par les turbulences. Le leader
historique Félix Houphouët-Boigny meurt en 1993 et la dispute pour la succession
au pouvoir sur fond de crise économique vire en quelques années à la guerre
civile. Henri Konan Bédié, successeur immédiat d’Houphouët-Boigny n’hésite pas
à introduire le concept d’ « ivoirité » dans la loi afin
d’exclure de la citoyenneté par ce biais plusieurs rivaux à la future élection
présidentielle, tout en rejetant de la vie politique un quart de la
population, particulièrement celle à majorité musulmane du nord du pays. Henri
Bédié gagne ainsi sans concurrence l’élection présidentielle de 1995, avant d’être
renversé quatre ans plus tard par le coup d’État du général Guéï qui organise
de nouvelles élections. En octobre 2000, ces élections portent Laurent Gbagbo
au pouvoir, ce qui suscite la confrontation armée avec le général Guéï, jusqu’à
la victoire définitive de Gbagbo. Une nouvelle tentative de coup d’État le 19
décembre 2002 à Abidjan et dans les principales villes de Côte d’Ivoire donne le départ
d’une guerre civile. Le coup d’État échoue, mais les rebelles prennent le
contrôle de la moitié nord du pays, dont ils sont pour la plupart issus.
Au contraire du Rwanda, la
France a de nombreux ressortissants en Côte d’Ivoire, alors plus de 16 000
dont les 600 sociétés génèrent 30 % du PIB ivoirien. Elle ne peut se
désintéresser du sort de cet allié qui est apparu longtemps comme un modèle de
stabilité. L’opération Licorne est
déclenchée dès le 22 septembre avec le bataillon basé à Abidjan renforcé d’une
unité venue du Gabon. On ne veut plus appuyer le gouvernement en place et son
armée face à une rébellion mais on ne va pas non plus être accusé d’inaction à
côté de massacres, éternel dilemme entre l’accusation d’intrusion et celle de
non-assistance. On choisit donc d’abord de mener une opération humanitaire
armée afin de protéger et d’évacuer les ressortissants français et autres
étrangers menacés dans le nord du pays.
Pour le gouvernement
ivoirien, la rébellion est soutenue par l’étranger et il n’est pas question de
négocier avec elle, mais seulement de l’écraser. Il préférerait que la France
la soutienne dans ce sens et il invoque pour cela l’accord de défense d’août
1961. Non seulement la France refuse, mais, en accord avec les organisations
internationales, elle appuie l’idée d’une négociation, et donc de concessions à
la rébellion. L’opération d’évacuation de ressortissants devient alors une
opération d’interposition, un genre que l’on croyait disparu. A la fin de
l’année 2002, 2 500 soldats français sont dispersés sur une « ligne
de non franchissement » (puis « ligne de cessez-le-feu » et
enfin « zone de confiance ») de 600 km qui partage le pays en deux.
L’idée est alors de garantir pour un temps limité, le cessez-le-feu instauré le
17 octobre 2002, en attendant le relai d’une force régionale, la Mission de la Communauté économique en Côte d'Ivoire (MICECI)
ou « Ecoforce », formée par la CEDEAO.
Comme cela était prévisible,
cela ne se passe pas comme prévu. Le premier petit contingent interafricain de
1 200 hommes n’arrive qu’en mars 2003. Avant cela, fin novembre 2002, deux
groupes armés, le Mouvement populaire ivoirien du Grand Ouest (MPIGO) et le
Mouvement pour la justice et la paix (MJP) se sont ajoutés à la rébellion du
nord pour attaquer dans l’ouest du pays à partir de bases au Libéria. Les
forces armées nationales de Côte d’Ivoire (FANCI) sont incapables de les
refouler. En janvier 2003, devant l’absence d’évolution, la France impose un
sommet international à Linas-Marcoussis. Cet aveu d’échec de la concertation
africaine sonne comme un rappel à l’ordre de l’ancienne puissance coloniale. Il
en ressort un accord que Laurent Gbagbo n’a aucune intention de mettre en
œuvre. Les FANCI sont renforcées avec l’achat de nouveaux équipements et
l’engagement de mercenaires. De leur côté, les rebelles du nord forment le
Mouvement patriotique de la Côte d’Ivoire (MPCI) qui s’associe au MPIGO et au
MJP pour former les « Forces nouvelles ». La situation est gelée.
En février 2004, l’Opération
des Nations unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) relève et englobe l’Ecoforce. Les
GTIA français ne sont pas intégrés dans l’ONUCI et restent placés en second
échelon sous commandement national. Les choses n’évoluent guère pour autant, il
y a toujours à l’époque plus de 4 000 soldats français formant trois GTIA placés
entre les différentes factions qui les accusent forcément de protéger l’autre
camp. Un quatrième GTIA est en réserve opérationnelle en mer, associé à
l’opération Corymbe de présence
navale dans le golfe de Guinée.
Il y a régulièrement des
accrochages entre factions, mais aussi contre ces Français qui gênent tout le
monde. En janvier et février 2004, le MJP et le MPIGO tentent des attaques
contre les forces françaises au sud-ouest du pays et se font refouler. Le 25 août
2003, une patrouille fluviale française est prise à partie au centre du pays sur la presqu’île de Sakassou et perd deux soldats tués. Les 7 et 8 juin 2004, une
compagnie française repousse une attaque rebelle à Gohitafla au centre du pays
et lui inflige une vingtaine de morts au prix de huit blessés. Le 6 novembre 2004, un avion d’attaque
Sukhoi Su-25 de l’armée de l’Air ivoirienne bombarde un cantonnement
français à Bouaké tuant neuf militaires français ainsi qu’un ressortissant
américain et en blessant 31. C’est l’occasion d’une mini-guerre avec l’État
ivoirien. Sur ordre du président Chirac, les six avions et hélicoptères de combat
ivoiriens sont détruits au sol sur les bases de Yamoussoukro et d’Abidjan. Le
gouvernement ivoirien utilise de son côté la désinformation et le mouvement des
Jeunes patriotes pour s’en prendre aux ressortissants français. Le GTIA Centre
est engagé d’urgence à Abidjan franchissant par combat les barrages des FANCI
sur 800 km et se retrouvant par la suite pendant plusieurs jours face aux
Jeunes patriotes dans la capitale, ce qui provoque plusieurs morts. Plus de 8 000 ressortissants
sont évacués dans des conditions très difficiles.
La situation se calme avec
le temps et le dispositif de Licorne
est progressivement allégé passant de plus de 5 200 hommes au début de
2005 à 1 800 en 2009, alors que dans le même temps Laurent Gbagbo prétexte
l’existence du conflit pour retarder l’élection présidentielle jusqu’en 2010.
Cette élection est l’occasion d’une nouvelle crise en décembre 2010, lorsque
Laurent Gbagbo en conteste les résultats et refuse de quitter le pouvoir. Les
combats éclatent entre ses partisans et les Forces républicaines de Côte
d’Ivoire (FRCI) regroupant les anciennes forces rebelles (Forces du nord) et
les forces ralliées au nouveau président, Alassane Ouattara. En avril 2011, la
force Licorne procède à l’évacuation
de 5000 ressortissants, mais surtout grand tournant, on décide à nouveau de
faire la guerre, en appuyant les FRCI jusqu’à l’arrestation de Laurent Gbagbo.
On parvient ainsi enfin à un résultat décisif et à la paix, presque neuf ans
après le début de l’interposition et 27 soldats français tombés.
Bien entendu lorsqu’il est mis fin officiellement à l’opération Licorne en janvier 2015, tout le monde se félicite de son succès, mais tout le monde pense aussi parmi les responsables militaires qu’il n’est plus question de recommencer.
On se laisse pourtant avoir
une nouvelle fois avec un nouvel appel au secours de la Centrafrique où depuis
la dissolution des EFAO en 1998, la situation n’a cessé d’empirer, malgré la
présence d’une succession de forces multinationales. En mars 2013, le groupement
de mouvements armés musulmans venant de l’Est et baptisé Seleka pénètre dans Bangui
et s’empare du pouvoir. Ses bandes plus ou moins autonomes ne tardent pas à
ravager la capitale et à s’opposer aux anti-balaka, les milices d’autodéfense
suscitées par le gouvernement précédent. La violence est alors partout et
commence même à déborder sur les pays voisins. Deux Français membres d’une ONG
sont assassinés. En septembre 2013, le nouveau président autoproclamé Michel
Djotodia se désolidarise de la Seleka, qu’il a contribué à créer, et fait à son
tour appel à la France.
François Hollande
décide cette fois d’intervenir, appuyé par un mandat du CSNU. Outre l’urgence humanitaire,
il s’agit surtout d’éviter que la Centrafrique ne se transforme définitivement
en zone de non-droit entraînant les pays voisins dans une grave
instabilité avec le risque de développement d’organisations islamistes
radicales. Là encore, la France est la seule à avoir la force militaire pour y
parvenir et la volonté de s’en servir. Cela ressemble à la situation qui
régnait au Mali début 2013 mais cette fois, on décide de ne pas faire la guerre,
en grande partie parce que la Seleka est alliée du président tchadien Idriss
Déby, que la France ménage. Puisqu’il n’y a pas d’ennemi désigné, ce sera donc
une opération de police, ou de « stabilisation » sur le modèle de
l’opération Artémis dix ans plus tôt,
et dans le cadre d’une force multinationale de maintien de la paix en
l’occurrence la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous
conduite africaine (MISCA) qui doit remplacer la Mission de consolidation de la
paix en République centrafricaine (MICOPAX) et un an avant la Mission
multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en
Centrafrique (MINUSCA).
Dans les faits, on
sait bien qu’il s’agira d’abord d’être en première ligne avec l’espoir que les
contingents africains viendront le plus vite possible nous épauler, puis nous
remplacer. Le problème de ce type d’opération de stabilisation est qu’il faut
compenser un emploi très maîtrisé de la force, réduit à la seule légitime
défense, par une présence dissuasive, autrement dit par du nombre. Et plus les
violences sont importantes et plus il faut du monde pour s’imposer à tout le
monde en même temps, de manière à éviter que les désarmés soit les victimes des
représailles de ceux qui ne le sont pas encore. Or, du fait des réductions
d’effectifs et des engagements déjà en cours, les forces françaises disponibles
sont limitées, à peine supérieures à celles de l’opération Artémis alors que Bangui est trois à quatre fois plus peuplée que
Bunia, sans parler du reste de la Centrafrique. Pour stabiliser la Bosnie et le
Kosovo nettement moins peuplés que la RCA, l’OTAN avait déployé 50 000 hommes. Cette
fois, on va engager initialement 1 600 soldats français aux côtés des
bataillons de la MISCA qui elle-même mettra de longs mois avant d’atteindre les
6 000 hommes prévus.
Cela aurait pu
suffire pour une opération de guerre, c’est forcément un peu faible pour une
opération de stabilisation. L’idée de manœuvre est de lancer l’opération juste après avoir reçu le
mandat du CSNU le 8 décembre. En réalité, les évènements surprennent tout
le monde. Le 5 décembre, ce sont les anti-balaka qui tentent un coup de
force à Bangui, échouent et subissent une contre-attaque violente de la Seleka.
L’opération baptisée Sangaris (un
papillon) est alors lancée prématurément. À l’issue d’un conseil de Défense,
François Hollande prononce un discours où il annonce une opération rapide. Le
ministre Le Drian parle d’au maximum six mois.
Du 5 au 8, les forces
françaises sur place ou arrivées en renfort du Tchad, de Côte d’Ivoire et du
Cameroun, occupent les points clés de Bangui puis commencent les opérations de contrôle
le lendemain. On avait cru que l’arrivée des troupes françaises provoquerait un
choc psychologique. Il n’est en rien, les forces françaises doivent faire face
à des manipulations de la foule et des attaques sporadiques des différentes
factions et deux soldats français, tout en essayant d’empêcher les exactions
intercommunautaires. Deux soldats français sont tués dès les premiers jours.
Pas d’enthousiasme non plus des pays européens, qui acceptent de fournir de l’aide
logistique et à constituer une mission de formation, mais pas à participer à la
stabilisation. La France doit donc se débrouiller seule avec ses 2 000 hommes
et trois GTIA, accompagnée de quelques bataillons africains.
Petit à petit, les forces
françaises et africaines, hors celles du Tchad qui sont invitées à quitter le
pays, parviennent à sécuriser Bangui pour s’implanter au-delà dans la partie
ouest du pays. C’est l’occasion de nouveaux combats, au sud à Grimari le
20 avril, dans le nord-ouest à Boguila le 5 mai 2014 ou encore à
Batanfago également au nord, les 4 et 5 août. À chaque fois, un petit
groupement français est attaqué par une bande de quelques dizaines à une
centaine de combattants anti-balaka au sud et Seleka au nord et à chaque fois,
la bande est détruite. Il y a près d’une centaine de combattants ennemis tués
dans ces seuls combats, pour aucun Français ou soldat de la MISCA. L’opération,
qui ne s’est pas déroulée aussi bien que prévu, n’est plus guère mise en avant.
Aussi l’opinion publique n’entend presque jamais parler de ces engagements violents,
au contraire des fausses accusations d’abus sexuels, classés sans suite par la
suite, un classique des intenses campagnes de désinformation de la région.
La force Sangaris est placée en deuxième échelon de la MINUSCA en juin 2015,
ce qui n’empêche pas la poursuite d’accrochages, puis désengagée
progressivement à partir de l’élection présidentielle et l’investiture de
Faustin-Archange Touadéra en mars 2016. L’opération se termine officiellement
en décembre de la même année. Il reste alors environ 250 soldats français
répartis dans la MINUSCA et EUTM RCA. Pour beaucoup des 15 000 soldats français qui y ont été
engagés, il s’agissait de la mission la plus difficile depuis vingt ans. Si
relativement peu d’entre eux, trois au total dont deux au combat, ont été tués
au regard des dangers encourus, le nombre de blessés, 120 au total, et
notamment de troubles psychologiques est particulièrement élevé. Grâce à eux,
les massacres intercommunautaires ont cessé, et c’est un résultat considérable,
mais là encore le problème de la faiblesse de l’État et des institutions n’a
pas été résolu et une grande partie du pays échappe à toute autorité.
Depuis 2016 plus personne ne
parle de mener à nouveau une grande opération de stabilisation quelque part, ce
qui n’était pas arrivé depuis la fin de la guerre froide. L’époque du Nouvel
ordre mondial du président Bush est bien révolue, tandis que la France est
alors pleinement engagée dans la lutte contre les organisations djihadistes sur
trois fronts : au Sahel, au Levant et même sur le territoire français.
C’est la version française de la guerre contre le terrorisme annoncée en 2001
par un autre président Bush.
A suivre.
L'affaire ivoirienne fut lamentable. L'évacuation honteuse d'Abidjan par les toits des villas de milliers de français terrorisés s'accompagna de tirs de l'armée sur des foules ivoriennes, tout cela sans oser toucher (Villepin oblige) au président Ivoirien commanditaire et responsable du bombardement de Bouake. Il fallut attendre 8 ans pour qu'on se décide à évincer celui qu'on n'avait pas défendu. Bref, de la choucroute à la Villepin, perdu entre-temps dans d'autres combats.
RépondreSupprimerOn a beaucoup reproché à Sarkozy d'avoir abandonné physiquement l'Afrique dans les années 2010, et avec raison. Il faut savoir que les errements de Chirac après ceux de Mitterand avaient déjà rendu inévitable la fin de notre présence. L'armée fit ce qu'elle pu, avec dignité et efficacité mais fut vraiment mal commandée.
Il ne faut pas oublier que tout se marasme se passe au moment même où l'Etat français entendait récolter les dividendes de la paix et affaiblissait considérablement nos forces armées.
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