16 mars 2017.
A l’été 2006, j’ai effectué une mission de retour
d’expérience à Kaboul. A l’époque, la France venait juste de refuser d’envoyer son unique compagnie d’infanterie alors présente sur place en renfort des
Canadiens qui venaient de s’engager dans la province de Kandahar et devaient y
faire face à une résistance inattendue. En allant voir cette unité, je
constatais qu’elle aurait eu, au regard de l’intensité des combats qui se
déroulaient alors, de sérieuses difficultés et sans doute des pertes : le
capitaine n’avait pas de véhicule de commandement, certains véhicules de la
compagnie n’étaient pas blindés, les sections étaient réduites à 75% de
l’effectif théorique, il n'y avait des munitions que pour un jour et demi de combat, il y avait très peu d’armes d’appui et pas de mitrailleuses 12,7 mm sur les VAB (Véhicules
de l’avant blindés, qui, il est vrai, remplaçaient les camions depuis peu),
etc. Tout avait été calculé au plus juste pour être présents au moindre coût dans une opération
de stabilisation. Je concluais mon rapport en disant que
la foudre ne nous épargnerait pas éternellement et qu’il fallait se préparer
beaucoup plus sérieusement à l’éventualité de combats violents. Je proposais
notamment de regarder précisément ce que faisaient nos alliés alors engagés
dans les zones de combat en Afghanistan. Quelques mois plus tard, le poste qui
consistait justement à analyser ce que faisaient les autres fut supprimé par
mesure d’économie.
Deux ans plus tard, alors au cabinet du Chef
d’état-major des armées, je participais au groupe de travail analysant le
combat de la vallée d’Uzbeen. Je constatais que rien n’avait vraiment évolué
depuis. L’équipement et l’organisation de la section Carmin qui était tombée dans l’embuscade étaient les mêmes que celui des sections de 2006. Pire, cette section était quasi-identique à celle que je commandais quinze
ans plus tôt à Sarajevo: même gilet pare-balles, conçu pour des missions statiques, même
casque, même armement, même faible quantité de munitions, même nombre réduit.
Entre 1993 et 2008, la France avait pourtant produit pour
environ 20 000 milliards d’euros de richesses nouvelles. Ne pouvait-on
imaginer d’en consacrer un petit peu pour ses soldats de première
ligne ? Alors certes, le programme Félin était en cours, j’avais même
participé à certaines expérimentations dix ans plus tôt, et de nouveaux
équipements avaient été demandés, en « urgence opérationnelle », comme
les VAB téléopérés. Mais visiblement cela n’avait pas été assez urgent. Que de
lourdeurs, de rigidités pour arracher quelques ressources. Ne pouvait-on
imaginer d’équiper nos soldats plus vite de matériels plus performants ?
Il suffisait bien souvent, comme nos ennemis, de les acheter sur le marché
civil pour quelques centaines d’euros. Plus largement, ne pouvait-on imaginer de
changer notre armement individuel ? Dix ans avant l’embuscade d’Uzbeen,
j’avais assisté à une séance de tir où une section d’infanterie
tunisienne nous avait humiliés avec ses fusils d’assaut à lunette Steyr AUG. Le
tir avec cette arme, pourtant contemporaine du Famas, m’avait alors paru magique. En
2008, cela faisait déjà pratiquement trente ans que nous étions dotés du Famas.
Trente ans,
c’était le temps qu’il avait fallu justement pour passer la génération précédente -celle de la guerre d’Algérie : FSA 49/56, MAT 49, AA52- au fusil
d’assaut.
Il n’était donc peut-être pas scandaleux d’envisager le remplacement de ce Famas dont par ailleurs l’entretien devenait si coûteux et l’approvisionnement en munitions de plus en plus dégradé. Si j’ai bien lu, son remplacement, en cours actuellement, va nous coûter environ 300 millions d’euros…300 millions d’euros, soit 0,68 % du programme Rafale (un total de 43 milliards d’euros de dépenses pour la France au dernier pointage lu). Avec le prix de deux avions Rafale, on pouvait rééquiper tous nos soldats débarqués. Pour la moitié du prix d’un avion, on pouvait remplacer le gilet pare-balles conçu dans l’urgence par ce qui se faisait de mieux au monde. Le Rafale est un merveilleux appareil mais la position stratégique de la France se serait-elle trouvée compromise avec quatre avions Rafale de moins, au profit d’une infanterie beaucoup mieux équipée ? La destruction de la section Carmin n’était pas seulement une question d’équipements mais avec des nouvelles armes individuelles dont un bon pistolet automatique en double dotation, une centaine de munitions en plus, des gilets plus ergonomiques, autant de soldats débarqués que la structure réglementaire, elle aurait peut-être pu tenir jusqu’à l’arrivée des renforts. Cela n’a pas été le cas, la section d’infanterie débarquée n’était pas une priorité pour la nation ou même le ministère de la Défense, comme bien souvent dans notre histoire.
Le fantassin oublié
La section d’infanterie française prend sa forme
moderne dans les années 1916-1918. Elle est alors équipée de fusils-mitrailleurs,
de fusils lance-grenades et parfois de fusils semi-automatiques (FSA) dont
certains avec lunette. Chaque demi-section (puis tiers de section à la fin de
la guerre) n’est alors pas très différente dans ses équipements, son
organisation et son fonctionnement du groupe de combat actuel. Autour des
sections d’infanterie, on invente aussi les sections et compagnies d’appui avec
mitrailleuses, mortiers de 81 mm et canons de 37 mm. Le saut qualitatif a été
énorme de 1914 à 1918. Le problème est qu’il n’avait pas besoin d’être réalisé
car tous ces équipements existaient avant guerre à l’état de prototypes. Il suffisait de les développer. On ne l’a pas
fait.
On ne l’a pas fait parce que tout cela n’est pas
très valorisant, à tous les sens du terme. Dans le monde économique, l’intérêt
des ingénieurs et des comptables se porte beaucoup plus facilement sur les
grands et beaux systèmes. Les chantiers navals ou, plus tard, l’industrie
aéronautique, ont plus de visibilité, de poids médiatique que les entreprises
plus modestes qui servent l’armée de terre et parmi ces dernières, les
producteurs de véhicules, l’emportent sur ceux qui fournissent les petits
équipements des soldats à terre. Dans l’offre industrielle, le fantassin au sol
est le plus mal servi, surtout lors des périodes de disette
budgétaire lorsque les gros programmes maigrissent alors que les maigres
meurent. Ce phénomène pousse d'ailleurs paradoxalement les armées à soutenir les premiers (les gros et coûteux) plutôt que les seconds pour mieux défendre leurs budgets.
Du côté des politiques, là où se font les choix budgétaires, on est aussi évidemment plus sensible à ces grands industriels, pour des raisons parfois personnelles mais aussi pour soutenir l’activité et les exportations ou encore parce que ces grands engins sont plus utiles pour des effets démonstratifs. Avant 1914, on dépense des fortunes pour les dirigeables ou les cuirassés de type Dreadnought. Un simple transfert des ressources de ces projets vers les fantassins de 14 aurait sauvé des centaines de milliers de vie et changé l’Histoire.
Du côté des politiques, là où se font les choix budgétaires, on est aussi évidemment plus sensible à ces grands industriels, pour des raisons parfois personnelles mais aussi pour soutenir l’activité et les exportations ou encore parce que ces grands engins sont plus utiles pour des effets démonstratifs. Avant 1914, on dépense des fortunes pour les dirigeables ou les cuirassés de type Dreadnought. Un simple transfert des ressources de ces projets vers les fantassins de 14 aurait sauvé des centaines de milliers de vie et changé l’Histoire.
Il est vrai aussi que le fantassin apparaît aussi bien
petit voire simple. Considérée comme moins technique que les « armes
savantes » où même la cavalerie,
c’est bien souvent dans les rangs de l’infanterie que sont affectés les recrues
les moins qualifiées. Recrutés « dans la partie la plus vile de la nation »
selon l’Encyclopédie au XVIIIe siècle, tirés au sort tout au long du
XIXe siècle (avec possibilité d’exemption pour la bourgeoisie
moyennant finance), le fantassin français est réputé brave mais peu instruit.
Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, on considère généralement qu’il faut au
minimum deux ans de service pour faire un soldat. La réduction du service
militaire à un an en 1928 est considéré comme une catastrophe par l’Etat-major
qui estime que l’on ne peut plus dès lors mener de grandes opérations offensives
(jugées les plus complexes). Si, en 1934, le colonel de Gaulle demande des
soldats de métier pour servir dans les corps blindés-mécanisés qu’il décrit dans Vers l’armée de métier, c’est parce
qu’il ne croit pas que des appelés à un an de service puissent le faire. Au-delà
des technologies, sur lesquels presque tous les regards se portent, c’est bien
souvent dans le changement des perceptions que se trouvent les innovations les
plus fertiles. En regardant les hommes différemment on aurait pu considérer avant 1914 que les fantassins pouvaient utiliser des armes automatiques sans gaspiller des
munitions, l’argument premier de l’époque. L’invention du chef de groupe en
1917 est une innovation majeure qui permet de résoudre le problème que l’on se
pose dans l’infanterie depuis l’apparition en masse des fusils à âme rayée (qui
ont une portée pratique beaucoup plus importante que les armes précédentes).
Pendant des dizaines d’années, on a hésité entre la dispersion des hommes qui
protège du feu mais éloigne des officiers et la concentration, aux effets
inverses. Il a fallu finalement changer de regard sur les sergents en 1917 et considérer
qu’ils pouvaient aussi prendre des décisions tactiques autonomes pour résoudre le
problème en créant des cellules semi-concentrées. Une des innovations majeures
de l’infanterie durant ces deux derniers siècles a donc procédé d’un simple
changement de perception.
On retrouve le même phénomène pendant la Seconde
Guerre mondiale. Les sections d’infanterie de 1940 n’ont pratiquement pas bougé
depuis 1918. Pas d’armement nouveau, hormis l’excellent fusil-mitrailleur FM
24/29. Il n'y a pas de fusil semi-automatique (le MAS 36 est encore à répétition manuelle et il ne sort qu’au
compte-goutte au début de la guerre) et on est incapable de produire un
pistolet-mitrailleur (PM) efficace. Non seulement, l’armement et l’équipement
du fantassin ne constituent pas une priorité, mais on n’a pas réfléchi non plus
à l’évolution des structures et des méthodes. Il y avait pourtant, là aussi, un
potentiel caché qui ne s’est révélé que plus tard. Deux ans après le désastre
de 1940, à Bir Hakeim, une brigade de cinq bataillons d’infanterie et de
quelques unités d’appui tenait tête à une division blindée italienne puis à
deux divisions allemandes tout en étant plus frappée par les Stukas que les
forces soviétiques à Stalingrad. Cette 1ère brigade française libre
(BFL) était pourtant encore largement équipée de matériels français ou
d’équipements facilement disponibles avant 1939. Elle avait simplement inventé
de nouvelles méthodes et de nouvelles structures. Avec sensiblement les mêmes
moyens, elle se battait beaucoup mieux et plus durement que les unités
équivalentes de 1940 et on se plait à rêver à ce qu’aurait pu être alors le
combat en France ou en Belgique avec des centaines de 1re BFL.
Retenons bien ces leçons. Dans l’allocution des
ressources le petit fantassin aura tendance à être le dernier servi, surtout
lorsque ces ressources sont rares, jusqu'au moment où arrive le moment où il
faut combattre. Comme l’air, on s’aperçoit alors que l’infanterie existe
lorsqu’on en manque, qu’elle est vitale et finalement toujours trop rare et
trop négligée. On s’aperçoit aussi, leçon interne de l’armée de Terre et de
l’infanterie, que, focalisés aussi sur les ressources venues du haut dont il est
toujours facile d’accuser le manque, qu’il y avait une productivité
sous-exploitée.
Tâtonnements
fantassins
Les choses ont-elles vraiment changé depuis ? L’infanterie à pied a bénéficié de deux
grandes périodes d’effort après 1945 : pendant la guerre d’Algérie et dans les années
1980 au moment de la petite guerre froide. Il y avait alors un besoin urgent, pour faire
une guerre en cours ou pour se préparer à une autre qui menaçait, et des ressources
importantes étaient consacrées à l’outil de défense (y compris dans la situation
économique difficile des années 1980).
Dans le premier cas, en Algérie, la priorité est donnée à l’infanterie à pied (« légère ») et à la puissance de feu antipersonnel. On refuse la solution du fusil d’assaut et on prolonge les concepts du début de la Seconde Guerre mondiale mais avec la génération des FSA, PM et fusil-mitrailleur AA52, on dote nos fantassins d’une puissance de feu nettement plus importante que celle de nos adversaires (il est vrai mal équipés). Dans le deuxième cas, en France et en Allemagne, l’accent est mis sur la mobilité et la capacité antichar. L’infanterie, portée sur VAB ou AMX10P est dotée de lance-roquettes, roquettes jetables de 112 mm et de toute une panoplie de missiles : Hot, Milan, Eryx. Pendant le même temps, la capacité antipersonnel évolue peu. En 1978, les soldats largués à Kolwezi et engagés au Tchad ou au Liban sont encore équipés comme à l’époque du plan Challe, face à des combattants équipés de fusils d’assaut FAL ou de la panoplie soviétique : AK47, lance-roquette RPG, fusil à lunette SVD, fusil-mitrailleur RPD. On achète alors en urgence des fusils suisses SIG 540 avant, dernière armée moderne à le faire, de se doter d’un fusil d’assaut avec le Famas.
Dans le premier cas, en Algérie, la priorité est donnée à l’infanterie à pied (« légère ») et à la puissance de feu antipersonnel. On refuse la solution du fusil d’assaut et on prolonge les concepts du début de la Seconde Guerre mondiale mais avec la génération des FSA, PM et fusil-mitrailleur AA52, on dote nos fantassins d’une puissance de feu nettement plus importante que celle de nos adversaires (il est vrai mal équipés). Dans le deuxième cas, en France et en Allemagne, l’accent est mis sur la mobilité et la capacité antichar. L’infanterie, portée sur VAB ou AMX10P est dotée de lance-roquettes, roquettes jetables de 112 mm et de toute une panoplie de missiles : Hot, Milan, Eryx. Pendant le même temps, la capacité antipersonnel évolue peu. En 1978, les soldats largués à Kolwezi et engagés au Tchad ou au Liban sont encore équipés comme à l’époque du plan Challe, face à des combattants équipés de fusils d’assaut FAL ou de la panoplie soviétique : AK47, lance-roquette RPG, fusil à lunette SVD, fusil-mitrailleur RPD. On achète alors en urgence des fusils suisses SIG 540 avant, dernière armée moderne à le faire, de se doter d’un fusil d’assaut avec le Famas.
La fin de la guerre froide nous surprend dans cette
posture. Politique inconséquente et à très
courte vue, on n’ose supprimer ou transformer aucun des grands programmes
lancés à la fin de la guerre froide mais on s’empresse en même temps de réduire
les moyens qui auraient permis de financer ces mêmes grands programmes. Depuis, les armées sont plongées dans une profonde crise organique. Autour des grands
programmes, tout fond. Dans l’armée de l’air, tout tombe en ruines autour du
Rafale, autour du groupe aéronaval la flotte perd des milliers de tonnes chaque
année et dans l’armée de terre, le nombre de chars est divisé par six en
vingt-cinq ans, les canons par quatre et les hélicoptères par deux. L’infanterie
n’échappe pas au phénomène. Il y avait 48 régiments ou bataillons de
chasseurs endivisionnés en 1986, il n’y en a plus que vingt aujourd'hui.
Pour autant, avec la multiplication des « gestions
de crise » après la guerre froide, on s’aperçoit que l’on a besoin d’hommes
sur le terrain, pas forcément de combattants, car on n’y combat que rarement et
ponctuellement (à Sarajevo ou à Mogadiscio par exemple) mais plutôt de
« gardiens de la paix » ou de « gardes internationaux ».
Des unités d’infanterie sont évidemment capables de jouer ce rôle mais il est
possible de faire appel aussi pour ce que l’on croit être des missions simples
(jusqu’à ce qu’il faille combattre et là c'est plus compliqué) à des unités de marche ou Proterre. Dans
ces conditions, finalement plus encombrée qu’aidée de cet armement antichars
dont on continue à l’équiper malgré tout (pour quelques missiles tirés, le
programme Eryx aura coûté deux fois le coût du remplacement du Famas),
recevant au compte-gouttes des crédits de développement, l’infanterie évolue
lentement parfois encore empêtrée dans des procédures interminables.
Il aura fallu quand même deux ans après le rapport
du général Vezio en 1986 pour choisir entre la roue et la chenille pour le
futur Véhicule blindé de combat d’infanterie (VBCI), puis encore dix ans pour
ne pas se mettre d’accord avec les voisins européens sur un projet commun et
enfin refuser en 2002 les déplorables premières maquettes proposées par
l’industriel, avant de voir enfin arriver en 2008 le VBCI dans les unités (pour
finalement un nombre inférieur à la commande initiale et pour un prix total du
programme plus élevé). En 1916, il n’avait fallu que dix mois pour former la
toute première unité de chars français de l’histoire en partant de rien. Il est
vrai que dès la génération suivante, là où le général Estienne et l’infanterie
demandaient un petit engin d’accompagnement à deux places et transportable par
camions (le FT-17) le service automobile du ministère et l’industrie proposaient
plutôt un monstre mécanique beaucoup plus sophistiqué, coûteux et lent à
produire (et au bout du compte inutile).
Pour le fantassin débarqué, le combattant rapproché
d’une manière générale, c’est l’urgence qui a commandé pour faire à la menace de
tous les malfaisants qui s’acharnaient mystérieusement contre les soldats de la
paix. On a assisté à une pulsion d’acquisitions au début des années 1990 : Minimi, fusil Mac Millan, gilets pare-éclats, pare-balles, casque, optronique ou des
transferts, VBL, VAB canons de 20 mm. Cela a été bienvenu et a sauvé un certain
nombre de vies mais pour le reste, hormis la professionnalisation complète de
l’infanterie, on connaît peu d’évolutions dans les structures, les méthodes ou
les perceptions jusqu’à l’engagement en Kapisa-Surobi en 2008, occasion d’une
nouvelle pulsion réactive.
Le
fantassin stratégique
Ce qui me frappait le plus en faisant le retour
d’expérience de l’embuscade d’Uzbeen était ce décalage flagrant entre les
effets, très clairement stratégiques, des combats, et la faible priorité
accordée à nos fantassins. Il faut être cohérent : si l’engagement d’une seule
section d’infanterie peut avoir des effets stratégiques, alors la section
d’infanterie doit recevoir une attention stratégique, c'est-à-dire au niveau politico-militaire le plus élevé.
Cela paraît relever de l’évidence biblique.
Ce sont les combattants rapprochés qui
payent le prix fort. Il serait intéressant d’analyser qui étaient et comment
sont morts précisément les 400 soldats tombés pour la France depuis 1962. Les Américains, eux, ont
fait ce genre d’études. Ils ont établi que dans les conflits du XXIe
siècle, les fantassins représentaient 81 % des pertes, que 90 % d’entre eux
étaient morts à moins de 400 m d’une route et pour 52 % en cherchant l’ennemi.
Les statistiques françaises doivent être assez proches. Une arme qui représente
en France peut-être 5 à 6 % des hommes et des femmes en uniforme supporte au
moins 70 % des pertes, les autres sont essentiellement des sapeurs (les
sapeurs-combat peuvent revendiquer légitimement aussi l’appellation de combattants
rapprochés) et des logisticiens.
Dans
l’immense majorité des cas, ces hommes ont été tués dans des combats d’ampleur
limitée par d’autres combattants rapprochés toujours irréguliers, soit par le
feu d’armes légères, soit par des engins explosifs et obus. Dans ces combats,
les soldats français sont presque toujours sortis vainqueurs, et c’est encore le cas
finalement à Uzbeen au bout de deux jours, mais il suffit que quelque uns d’entre eux tombent
pour que cela deviennent un événement à l’ampleur exponentielle par rapport au
nombre de pertes. En Afghanistan, l’embuscade d’Uzbeen a provoqué une grande
émotion, la sidération du ministre et le déplacement d’un Président de la
République puis les deux attaques-suicide du 13 juillet 2011 et du 20 janvier
2012 (dix soldats français tués au total) ont provoqué à leur tour de telles
mesures de prudence qu’elles ont largement paralysé l’action en Kapisa-Surobi
avant de finalement provoquer un retrait anticipé. Ces opérations tactiques
voire micro-tactiques apparaissent donc rétrospectivement comme de grandes
victoires rebelles.
Cette
très faible résilience politique incite à une réticence à l’engagement de
troupes terrestres, surtout de soldats débarqués, apparemment si
vulnérables. Le problème est que les effets décisifs ne peuvent être obtenus
qu’au sol, là où vivent les gens, et par des combattants qui plantent des
drapeaux et contrôlent des zones. Cela est d’autant plus vrai que l’on combat,
ce qui est la norme depuis cinquante ans, surtout des organisations armées au
milieu de populations. Ces organisations ont peut les bombarder pendant des
semaines, des mois et même des années maintenant comme l’Etat islamique, s’il
n’y a personne au sol pour les dominer au plus près et contrôler le terrain et
la population, cela ne donne pas grand chose. On peut bien sûr faire confiance aux Alliés
locaux pour cela mais en se souvenant que s’ils ont fait appel à nous, c’est
qu’ils sont inférieurs à leur adversaire. Les résultats sont souvent très
aléatoires. Nous voilà donc soumis à un dilemme fondamental : engager des combattants
rapprochés, avoir plus de chances de l’emporter mais voir fatalement certains d’entre eux tomber, ou ne pas les engager, et donc imiter les pertes,
mais voir les chances de succès diminuer.
Faire en sorte que le
politique n’ait plus peur d’engager des combattants rapprochés au contact de
l’ennemi.
Il
n’y a qu’une manière de sortir de ce dilemme : faire en sorte que le
politique n’ait plus peur d’engager des combattants rapprochés au contact de
l’ennemi. On l’aura compris, cette
ambition dépasse largement le cadre de l’infanterie. Le Livre blanc de 2008
expliquait qu’il fallait apprendre à la nation à être plus résiliente car les
engagements à venir seraient plus durs. C’était une erreur, d’une manière
générale l’opinion publique s’avère souvent bien plus prête à accepter les
pertes que ne le croit l’échelon politique. C’est ce dernier qui soit apprendre la
résilience, ou plutôt doit la réapprendre. En juillet 1961, le général de
Gaulle engageait les forces françaises pour dégager la base de Bizerte,
acceptant la perte de 27 hommes (pour 30 fois plus dans l’armée tunisienne). En
1978, le Président Giscard d’Estaing engageait quasi-simultanément deux
opérations audacieuses au Tchad et à Kolwezi : 33 soldats français mourraient en quelques
semaines mais nos ennemis étaient écrasés. Pendant la guerre du Golfe, on avait
cru et admis qu’il y a aurait possiblement des centaines de victimes.
Et
puis on a surtout hésité, dès l’engagement au Liban en 1978 en fait, à combattre directement
pour finalement quand même perdre des hommes sans avoir beaucoup de résultats. Il
faut l’engagement des forces spéciales dans le sud afghan en 2003, puis la
Kapisa-Surobi et l’opération Serval
au Mali pour renouer avec le combat…avant d'hésiter à nouveau. La guerre contre l’Etat islamique est ainsi la première de notre
histoire ou, en presque trois ans, les pertes civiles sont très largement supérieures
à celle d’une armée que l’on ne veut pas engager directement contre l’ennemi.
Cette
ambition concerne aussi l’armée de Terre et l’infanterie. On peut, comme je
l’entends dans ce colloque se satisfaire de tout et estimer que l'on fait le maximum. On peut considérer aussi qu’on
peut aller beaucoup plus loin. Alors que, depuis la fin de la Guerre froide,
nous avons une supériorité totale dans les airs et sur les mers, n’y craignant
plus que les concurrents commerciaux, le combat des petites cellules tactiques
terrestres n’a guère varié depuis des dizaines d’années. Malgré ses équipements
électroniques ou de protection, une section d’infanterie française moderne
aurait des difficultés à vaincre, sauf sans doute de nuit, une section de panzergrenadiers allemands de 1944 (et ses quatre à six MG-42 à 1000 coups-minutes). Dans les combats
d’Uzbeen, une section a été détruite et une autre fixée par des combattants
rebelles bénéficiant certes de la surprise et de la supériorité numérique mais
sans gilets pare-balles et équipés d’armements des années 1960. On n’imagine
pas une patrouille d’avions Rafale, même surprise, être battue par une
escadrille de Mig-15 et encore moins de Focke-Wulf 190. C’est possible dans le
combat terrestre et plus particulièrement le combat débarqué.
On
peut rétorquer que cela ne s’est plus reproduit depuis 2008. C’est
vrai et les combats, très intégrés entre le sol et les appuis, en Kapisa et
plus encore au Mali ont été menés de manière remarquable mais en déployant des
moyens importants et au prix de 200 000 euros par combattant ennemi
tué. C’est certes inférieur aux coûts d’une campagne aérienne mais quand même. On
se gargarise avec les principes de la guerre de Foch, mais parmi eux il y a
« l’économie des forces ». Nous pouvons gagner tous les combats mais
combien pouvons-nous gagner de combats de ce type quand les appuis-canons,
hélicoptères d’attaque, chasseurs-bombardiers- se comptent en dizaines
seulement et quand les Américains ne sont pas là pour les fournir ? On doit se féliciter de la réussite de Serval mais il ne faut pas oublier que nous avions en face de nous
3 000 combattants légers équipés de pick-up et d'armes légères soviétiques, et que nous avons (avec nos camarades tchadiens) tué 10 %
de cet ensemble. La France seule face à l’Etat islamique, on fait
comment ? C’est une superpuissance militaire, l’Etat islamique ? Il y
a 99 ans, nous étions la première armée du monde, nous disposions de
l’infanterie la plus forte et la plus moderne et pas seulement dans ses
équipements. En 1924, la France épuisée par la guerre envoyait quand même
100 000 soldats au Maroc vaincre une force rebelle comparativement très
supérieure à ce que représente l’Etat islamique aujourd’hui.
Révolution
A
dépenser tellement d’énergie pour sauver les programmes en cours, à gratter
quelques crédits, on en vient à se satisfaire de pouvoir gagner simultanément
quelques combats de petite ampleur (qui, il est vrai, ne le sont jamais pour ceux qui les
vivent) ? Ce qu’il faut atteindre, c’est la certitude qu’une section
isolée soit invincible face à un adversaire équivalent en nombre, qu’elle soit
capable de résister face à trois ou quatre fois plus de combattants jusqu’à ce que des
renforts ou des appuis arrivent. Il faut bien sûr diminuer par tous les moyens
le risque pour chacun de nos soldats mais aussi et surtout augmenter
considérablement le risque pour nos ennemis. Pour chaque
combattant rapproché qui tombe, 20 ennemis doivent mourir lorsque la section
combat seule et 40 lorsqu'elle peut bénéficier d'appuis proches. C’était finalement la
norme de Serval mais il faut
atteindre cette norme avec les moyens de l’infanterie seule (ce qui n’empêche
évidemment pas de faire parfois appel aux autres) et surtout la multiplier. Ce n’est
pas 400 sections dont la France a besoin mais de 800 super-sections d'un standard
se rapprochant de celui des Forces spéciales. C’est irréaliste ? De la
même façon que les généraux de 1914 auraient considérés comme irréalistes ce
que l’on a été capable de faire seulement quatre ans plus tard et que ceux de 1940
auraient jugés ridicule le compte-rendu de Bir Hakeim.
Pour
y arriver, il faut bien sûr commencer par dépasser le seul cadre de
l’infanterie, de l’armée de Terre et même des armées pour secouer plus haut et
placer le politique devant ses responsabilités et ses contradictions. On ne
peut impunément déclarer être en guerre et ne pas sérieusement la faire. On
peut se féliciter de la modification de la loi de programmation mais cela est
encore loin d’être suffisant, ne serait-ce que pour résoudre la crise en cours.
Imagine-t-on par ailleurs le général de Lattre entendre avant de débarquer en
France que seul le tiers du surcoût des opérations de la Première armée serait financé et qu’une partie de son budget serait gelé, car vaincre
l’armée allemande c’est bien mais réduire les dépenses publiques, c’est mieux ?
Imagine-t-on le général Pétain à Verdun recevoir des directives de l’Union
européenne lui rappelant l’obligation de créer des représentations
professionnelles et de faire respecter strictement les temps de repos des
fonctionnaires ? C’est aberrant, c’est pourtant ce que nous faisons. En face, l’Etat
islamique, al-Mourabitoune, AQMI ou Boko Haram ne sont pas soumis au code des
marchés publics, n’ont pas mis en place des bases de défense et n’ont pas
adopté le logiciel Louvois. Cela leur donne de gros avantages que l’on n’est pas
obligé de leur accorder éternellement.
Mais
on peut se regarder aussi. N’y-a-t’il rien à faire en attendant les sacro-saints Scorpion et Félin V2 ? Attention, ces programmes sont remarquables mais il
ne faut pas qu’ils nous hypnotisent. Peut-être que dans le futur Félin nous
permettra d’établir enfin d’établir la suprématie en combat rapproché mais ce
n’est encore le cas et pour l’instant le bilan est négatif puisque, effet
d’éviction, avec les 42 000 euros que coûte chaque panoplie on aurait pu faire
mieux et surtout beaucoup plus vite en en se contentant d’acheter sur étagères. Peut-être faut-il d'ailleurs accorder et de ressources plus de liberté aux brigades et régiments pour acheter (et même revendre) dans le marché civil ce dont elles ont besoin, hors armement bien sûr ? Les tenues ne seront pas forcément tout à fait toujours les mêmes mais quelque chose me dit que nos soldats seraient sans doute mieux équipés, plus vite et pour un coût global inférieur pour le budget du ministère.
Dans
cette journée, j’ai entendu dire plusieurs fois qu’il ne fallait jamais oublier
l’homme. C’est très bien mais concrètement, cela signifie quoi ? Si on se
souciait vraiment des hommes, on ne se réjouirait pas de l’opération Sentinelle. Peut-être qu’on si on
maintenant un peu plus de stabilité dans nos unités au lieu de conserver la
même gestion des mutations que pendant l’armée de conscription on obtiendrait
plus de cohésion et d’efficacité sans dépenser un euro de plus (en fait en en
dépensant moins).
On sait que les meilleurs soldats ont entre 28 et 32 ans. Ils ont peut-être un peu moins de souffle qu’à 20 ans mais ils ont en revanche beaucoup plus de maturité. Un général israélien m'a confié un jour que ce qu'il nous enviait le plus, c'était nos vieux caporaux-chefs qui restent calmes dans les situations difficiles. Il m'expliquait que pour les missions les plus complexes ils préféraient engager des réservistes que des unités d'active, où la moyenne d’âge, cadres compris, tourne autour de 21 ans. Les hommes des forces spéciales sont plus âgés que les autres, ce n’est pas pour rien. Les unités d’intervention de la police et de la gendarmerie recrutent aussi des hommes déjà formés et avec quelques années d’ancienneté. Pourquoi ne pas faire de la spécialité de combattant rapproché, une spécialité de deuxième temps de carrière ? On aura des hommes mûrs, expérimentés et qui auront acquis d’autres compétences utiles.
Ces hommes et ces femmes précieux, notre trésor national, ne doivent pas non plus être gaspillés. Leur temps doit être partagé entre entraînement-alerte, opérations et repos. Tout le reste, le gardiennage, les gardes d’honneur, les servitudes diverses, etc. doit être réduit au maximum ou effectué par d’autres. Peut-être alors que l’on considérera que l’on se soucie vraiment des hommes et que le temps moyen d’engagement des militaires du rang sera supérieur à six ans.
On sait que les meilleurs soldats ont entre 28 et 32 ans. Ils ont peut-être un peu moins de souffle qu’à 20 ans mais ils ont en revanche beaucoup plus de maturité. Un général israélien m'a confié un jour que ce qu'il nous enviait le plus, c'était nos vieux caporaux-chefs qui restent calmes dans les situations difficiles. Il m'expliquait que pour les missions les plus complexes ils préféraient engager des réservistes que des unités d'active, où la moyenne d’âge, cadres compris, tourne autour de 21 ans. Les hommes des forces spéciales sont plus âgés que les autres, ce n’est pas pour rien. Les unités d’intervention de la police et de la gendarmerie recrutent aussi des hommes déjà formés et avec quelques années d’ancienneté. Pourquoi ne pas faire de la spécialité de combattant rapproché, une spécialité de deuxième temps de carrière ? On aura des hommes mûrs, expérimentés et qui auront acquis d’autres compétences utiles.
Ces hommes et ces femmes précieux, notre trésor national, ne doivent pas non plus être gaspillés. Leur temps doit être partagé entre entraînement-alerte, opérations et repos. Tout le reste, le gardiennage, les gardes d’honneur, les servitudes diverses, etc. doit être réduit au maximum ou effectué par d’autres. Peut-être alors que l’on considérera que l’on se soucie vraiment des hommes et que le temps moyen d’engagement des militaires du rang sera supérieur à six ans.
Est-on
par ailleurs obligé d’avoir des structures différentes de section pour chaque
théâtre d’opération ? Pourquoi faut-il une organisation différente pour le
9e RIMa ou le 3e REI sur le même territoire
guyanais ? Pourquoi avoir conçu une section à 40 hommes pour ne jamais
l’utiliser et, à la place, bidouiller, parfois pour respecter à l’homme près un
chiffre politique (« ne pas dépasser 4 000 hommes en
Afghanistan ! », comme si on demandait au porte-avions Charles de Gaulle de ne fonctionner qu’avec 1 000
hommes) ? Outre que ces changements de structure sont
« déstructurants », on en arrive ainsi à avoir seulement 23 hommes à
terre à Uzbeen au lieu de 31.
Puisqu’on
parle de structures, pourquoi, hormis le retour (heureux) du troisième tireur de précision, n’avons-nous pas fait évoluer la structure décrite dans l’INF 202 de 1999 (qui lui-même ne modifiait la version de 1986
qu’avec le chapitre consacré au groupe ACCP) ? Il y a douze ans, les
fantassins israéliens m’expliquaient avoir abandonné le trinôme par son
incapacité à absorber les pertes. En ajoutant un seul homme, l’équipe devenait
plus résistante et plus souple. Il y a un consensus international et
historique là-dessus, nous persistons pourtant. Pourquoi attendre encore avant
de constituer des groupes d’appui dans les sections, avec du 7,62 mm, des
tireurs de précision avec fusils HK417 et pourquoi pas des
lance-roquettes Carl Gustav au lieu (ou en plus) des AT-4 ? J’ai
expérimenté de 1993 à 1999, une organisation de la section directement inspirée des sections d’assaut allemandes de 1944 avec un groupe appui-feu, regroupant
les armes tirant à 600 m, et deux ou trois groupes d’assaut équipés simplement
de Famas. Dans la majorité des cas, cela fonctionnait beaucoup mieux qu’en les
répartissant dans les groupes (dans l’embuscade d’Uzbeen, hormis un tireur de
précision et une seule grenade LGI lancée, les armes portant à 600 m n’ont
fourni aucune plus-value réparties dans les groupes).
Pourquoi conserve-t-on douze cadres d’ordre
réglementaires pour le chef de groupe ? Lorsque j’étais chef de groupe, je
les ai remplacés par un cadre d’ordre unique : OPAC
(objectif-observation/position/action), inspiré des modes de communication
entre équipages de chars. Ce simple changement, expérimenté de multiples fois,
a eu pour effet d’accélérer considérablement à la fois la vitesse et la
qualité de fonctionnement du groupe et des équipes. Dans un combat d’infanterie
où l’initiative du feu et la vitesse de commandement sont essentielles, cela
apportait un avantage énorme (et là encore sans dépenser un euro). Pourquoi
persiste-t-on dans la lourdeur quand on peut faire mieux ?
L’homme
n’est pas seulement un être obéissant, c’est aussi un être pensant. La « section
fantôme », celle qui pourrait être plus efficace sans dépenser beaucoup
plus, voire rien, elle se crée par l’expérimentation, les idées, les débats. On
a modifié la politique de tir grâce à l’initiative (et l’opiniâtreté) de
quelques-uns. On peut faire mieux. Où sont, hormis en partie le site Pensée Mili-Terre, les centres de réflexions, les
espaces critiques, les Forum, où on peut s’exprimer librement (c'est-à-dire sans censure préalable ou convocation) ? Je me
souviens avoir lu de vigoureux et passionnants débats tactiques dans des revues militaires soviétiques (traduites). Les Américains font ça plutôt bien. Où est l’équivalent français ?
En
conclusion, il est essentiel pour la France qu’une section (ou n’importe quelle
autre unité tactique élémentaire que l’on définira) d’infanterie ou de combat
rapproché si on préfère (intégrant aussi des sapeurs, des cavaliers ou des
observateurs) soit capable d’écraser n’importe quel adversaire équivalent. Il est essentiel pour la France de disposer en plus grande nombre de telles unités de choc. Si nous parvenons à cela, le
politique aura moins peur d’engager des soldats français au combat direct et
s’il engage des soldats au contact, les probabilités de victoire augmenteront
considérablement. C’est ainsi que l’on retrouvera vraiment des effets décisifs
dans les guerres que nous menons réellement et pas dans celles que nous
fantasmons. Tout cela demande un effort considérable, financier, matériel mais
ainsi et peut-être surtout de l’imagination. Il y a un potentiel stratégique
énorme dans nos combattants rapprochés, il faut l’exploiter si nous voulons
rester une puissance.