Au
bilan, cette armée, qui, en 1967, avait détruit trois armées en six jours,
éprouve les pires difficultés à progresser de plus de quelques centaines de
mètres par jour face à l’équivalent d’une division d’infanterie légère. Il est
vrai que celle-ci est bien entraînée, bien équipée et, surtout, ses hommes sont
prêts à mourir au combat. Ce n’est pas la première fois que les Israéliens se
trouvent mis en difficulté, le cas le plus dramatique étant celui des premiers
jours de la guerre du Kippour. A cette époque
pourtant les Israéliens avaient réussi en quelques jours à trouver des parades
au système opérationnel mis en place par les Syriens et les Egyptiens. En 2006,
rien de tel, car non seulement les troupes terrestres ont pris de mauvaises
habitudes pendant les affrontements contre les faibles milices palestiniennes
mais, à force d’économies permanentes et de réductions de budgets, elles n’ont
pas eu l’occasion de se préparer à autre chose.
Quand
une armée est matériellement bien plus forte que son adversaire, les causes de
son échec sont souvent à chercher du côté de la psychologie. La première source
du ratage israélien est venue du décalage énorme entre les objectifs affichés
(libérer les deux soldats capturés le 12 juillet, démanteler le Hezbollah et
tuer son chef) et le prix du sang que l’on était prêt à payer pour cela, ou
plus exactement le prix que l’on croyait que l’opinion publique était prête à
payer. Or, le gouvernement israélien, persuadé
d’une « extrême sensibilité aux pertes », a largement
sous-estimé ce prix. En réalité, en 2006,
l’opinion publique israélienne était beaucoup plus courageuse et prête aux
sacrifices que l’ « opinion publiée », c’est-à-dire l’élite
médiatique et politique, mais cela ne fut découvert qu’après les combats. Et
lorsque la pusillanimité va jusqu’à refuser de qualifier de guerre
l’affrontement armé de deux structures politiques (le conflit contre le
Hezbollah ne sera baptisé guerre qu’un an plus tard), il ne faut pas s’étonner
de la colère, non pas des légions mais des populations, furieuses d’être ainsi
infantilisées. Le deuxième enseignement majeur est que la réduction d’un effort
de défense engendre mécaniquement une réduction des capacités, surtout si les
réorganisations s’effectuent selon des critères seulement comptables et
économiques. L’armée israélienne des années 2000 s’est fracturée entre une
force de frappe conventionnelle de haute-technologie de plus en plus coûteuse
et une force d’occupation et de sécurité de plus en plus pauvre tactiquement et
matériellement. Toutes deux se sont révélées incapables de faire face à une
force de guérilla sophistiquée de quelques milliers d’hommes, malgré un
déploiement de force supérieur au nouveau contrat opérationnel français décrit
par le Livre blanc sur la sécurité et la défense nationale.
A
la bataille de Valmy en 1792, Goethe assistait stupéfait à l’impuissance des
armées en dentelles, belles troupes professionnelles où le soldat « était
rare et cher », face aux armées des peuples. Il annonçait alors une
nouvelle ère. Depuis 2001, les puissantes armées occidentales, Tsahal compris,
n’ont vaincu aucune organisation non étatique armée dans le grand Moyen Orient.
A l’été 2006, elles ont même toutes été mises en échec simultanément, dans le
Sud afghan, à Bagdad et au Liban. Voilà peut-être un nouveau Valmy.
Bonsoir colonel Goya,
RépondreSupprimerJe suis frappé par cette crainte, si j'ose dire, que l'Armée de Terre puisse se découpler entre une force de haute technicité et une autre, plus centrée sur la défense du territoire, pauvre tactiquement et en équipement, voir constituée d'unité de réservistes.
Bonjour
RépondreSupprimerAnalyse pertinente comme tj, la transposition à l'armée Française et Européenne est justifiée? Nos forces doivent rester suffisantes et homogènes, quand aux réservistes ils doivent être qu'un moyen de renforcement des forces. Si non nous serons dans la situation d'une belle maison protégée par un système d'alarme sophistiqué qui donnera l'alarme, donnera l'image et le son de l'intrusion en direct, mais il n'y aura personne pour intervenir !