Publié le 27/11/2011
Il est souvent fait
référence à la crise économique de 1929 pour décrire la dépression
actuelle ; or, par un enchaînement tragique, la crise de l’époque a
conduit, par ses conséquences sociales puis politiques, au désastre de la Seconde Guerre
mondiale. Il paraît donc légitime, si on veut poursuivre l’analogie jusqu’au
bout, de s’interroger sur le caractère belligène de la situation actuelle. Le
capitalisme peut-il se sauver par l’impérialisme, selon les idées de
Lénine ? Ne peut-on considérer, au contraire, que l’affaiblissement des
puissances libérales peut stimuler l’agressivité de régimes hostiles ou conduire
à des « implosions » qu’il sera impossible d’ignorer ? Pour
appréhender ces rapports entre situation économique et situation stratégique, complexes
mais pas nouveaux, il est intéressant d’interroger l’histoire.
La crise comme facteur de paix entre les peuples
Dans
La prospérité du vice, l’économiste Daniel
Cohen reprend les théories du temps long et les corrélations que certaines
d’entre elles avaient établies entre les cycles économiques et les guerres,
depuis les débuts de la
Révolution industrielle (1).
A la suite de Gaston Imbert (2), il distingue ainsi
quatre grandes phases de 1815 à 1914. La période qui va, en France, du Ier
Empire à la guerre de Crimée (1853-1856) se caractérise par un cycle long de
dépression économique qui privilégie les conservateurs sur les progressistes et
offre moins de ressources à l’Etat et à son armée. A partir des années 1840, la
tendance économique s’inverse. L’Etat commence à disposer de ressources
importantes qui lui permettent d’en consacrer une partie importante à des
efforts collectifs et à poursuivre ses ambitions propres à l’extérieur. Le « concert
européen » se délite et les grandes guerres européennes réapparaissent
(Crimée, Italie, guerres « prussiennes »). En revanche, la
« grande dépression » qui débute en 1873 s’accompagne d’une
décroissance guerrière dans une Europe qui retrouve des règles collectives de
gestion de crises. Au début du siècle suivant, le retour de la prospérité en
Europe voit aussi le retour du nationalisme et la réapparition des conflits
jusqu’à la Première
Guerre mondiale. Loin du « doux commerce » évoqué
par Montesquieu, la prospérité semble donc plus belligène que la dépression par
la combinaison de confiance collective et de ressources qu’elle suscite.
La crise comme facteur de sécrétion
de monstres
Comme
dans Fondation, le roman d’Isaac Asimov,
il arrive toutefois que les « lois » historiques soient violées par
des « anomalies ». Dans la période qui suit la Première Guerre
mondiale et la gestion de ses conséquences immédiates, la tendance est à la
réduction drastique des armées et à la « mise hors la loi de la
guerre ». La crise de 1929 accentue encore le phénomène de repli sur soi jusqu’à
ce que les tensions internes qu’elles suscitent, toujours favorables à la
recherche de boucs émissaires, conduisent à l’arrivée au pouvoir du parti nazi,
en Allemagne. Ce nouveau régime totalitaire, qui porte en lui la guerre, peut
consacrer des ressources importantes à son outil militaire, d’autant plus que,
keynésien avant l’heure, il constate que « beurre et canon » ne sont
pas forcément incompatibles, et surtout que les puissances adverses restent,
elles, paralysées par la crise. Les politiques d’ « apaisement »
ne font que stimuler l’agressivité d’Hitler jusqu’au désastre final qui voit également
l’apparition d’une autre « anomalie » historique : l’arme
nucléaire.
Des grandes guerres des
« trente glorieuses » aux petites guerres des « trente piteuses »
Par
un effet gravitationnel inverse qui tend à écarter le risque d’agression
majeure de toute nation qui la possède, l’arme nucléaire permet de maintenir
les deux blocs en apesanteur guerrière mais n’affecte pas ce qu’on désigne
alors comme le Tiers Monde. L’affaiblissement des puissances européennes commence
par profiter aux mouvements de décolonisation jusqu’à ce que la croissance
retrouvée leur permette de retrouver des forces. Même si les enjeux n’y sont
pas les mêmes, le contraste est flagrant entre la guerre d’Indochine
(1946-1954), menée dans une certaine indifférence par la France , avec des
professionnels équipés par les Américains, et la guerre d’Algérie (1954-1962), qu’elle
finance seule et où elle engage le contingent. Cette même croissance permet ensuite
à la France de
transformer une nouvelle fois son armée en la dotant d’un arsenal atomique. L’intervention
américaine au Vietnam, en parallèle de la coûteuse course à la Lune , conclut la période des
« trente glorieuses ».
La
crise économique qui suit voit le repli américain succéder au repli européen
post-colonial et l’initiative passe aux Etats communistes (expédition chinoise
au Vietnam et surtout soviétique en Afghanistan en 1979) ou pétroliers
(invasion irakienne de l’Iran en 1980). Les tensions intérieures s’accroissent
(terrorisme en Europe, coups d’état en Amérique latine, guerre civile
libanaise) et débouchent parfois sur des affrontements interétatiques comme
l’aventure argentine aux Malouines en 1982 face à un Royaume-Uni que l’on croit
affaibli. Mais même en crise, les puissances capitalistes sont plus résistantes
que leur adversaire communiste, dont le système économique finit par s’effondrer.
Grâce, en partie, au « blocage nucléaire », cette crise communiste
s’achève par la transformation de l’Union soviétique et de la Chine et non par
une fuite en avant militaire. Les Etats-Unis triomphent par abandon mais ils sont quand même obligés de demander l’aide de leurs alliés pour financer leur
première grande intervention militaire post-guerre froide, face à l’Irak en
1991.
Capitalisme partout, sécurité nulle
part
Fin
des blocs, limitation des ambitions par faiblesse économique, « nouvel
ordre mondial » structuré par la puissance américaine, les conditions
semblent réunies en 1991 pour un apaisement du monde. Effectivement, les
premières années 1990 sont celles des « dividendes de la paix » et de
la diminution du nombre des conflits (de 40 % de 1991 à 2005 (3))
ainsi que les budgets militaires. L’hypothèse d’une « fin de l’histoire »,
par l’unité idéologique du monde, fait son apparition en même temps que la
croissance pour les bénéficiaires de ce décloisonnement. Ce n’est pas un
phénomène nouveau (4). Lors de la première
mondialisation, à la fin du XIXe
siècle, l’idée d’une communauté de culture entre les puissances et leur
imbrication économique avait produit des visions similaires. En réalité, les
nouveaux moyens de transport et de communications avaient exacerbé les identités
(5). La première mondialisation a ainsi conduit à la Première Guerre
mondiale.
Force est de constater que le monde des années 1990
n’est pas aussi « plat » que le souhaiterait certains et que des
« saillants » apparaissent un peu partout, à l’intérieur même de ces
Etats affaiblis et qui ne se font plus que rarement la guerre (6). Si on peut désormais se rendre dans n’importe quel pays, on ne peut que
rarement s’y déplacer partout en toute sécurité tant les zones de non-droit se
sont multipliées dans les banlieues, bidonvilles géants, ghettos ethniques,
territoires occupés, zones tribales et mêmes espaces côtiers.
Ces « poches de colère (7)» sont
propices au développement d’organisations non étatiques, le plus souvent
locales et réactionnaires, mais parfois à vocation internationale comme Al
Qaïda, qui introduit une nouvelle « anomalie » le terrorisme massif,
finalement peu destructeur, mais à très forte charge émotionnelle. L’apparition
de cette menace terrorisme déclenche à son tour le retour des grandes
expéditions militaires américaines, rendues possibles par les bénéfices de cette
même mondialisation. Mais ces opérations, comme celles d’Israël, révèlent
aussi la résistance des organisations nichées
dans les « poches de colère » comme le Hezbollah, les néo-talibans ou
l’armée du Mahdi.
Simultanément, la croissance nouvelle offre des ressources
à des nations émergentes qui n’ont certainement pas l’intention de se contenter
d’un statut de « nouveau riche », à l’instar du Japon, et dont
certains, comme la Chine
ou la Russie
doublent leur budget de défense tous les cinq ans.
La nouvelle
guerre de trente ans
La crise actuelle réduit momentanément les
ambitions. Les Etats-Unis ne peuvent plus se payer des guerres qui n’engagent
pas des intérêts vitaux tout en coûtant deux milliards de dollars par semaine
et le président Barack Obama se lance clairement dans un processus de
désengagement. Al-Qaïda, de son côté, est victime de sa folie et de son rejet
du monde arabe autant que des coups américains. L’élimination de ses derniers
grands leaders lui porterait sans doute un coup fatal et faciliterait par
là-même le repli américain. A court terme, la tendance semble donc plutôt à
l’apaisement du monde même si, on l’a vu, le retrait des puissances
occidentales peut aussi être une incitation à l’agressivité de certains Etats.
A plus long terme, tout le problème stratégique de
la crise économique actuelle réside dans sa durée. S’il s’agit d’une parenthèse
violente dans un cycle long de croissance, on verra se dessiner une nouvelle
géopolitique multi-polaire, qui, sauf à établir un nouveau système de gestion
collective des crises, aboutira dans un contexte de ressources limitées pour
des puissances en plein développement, à des affrontements. Ceux-ci resteront,
il faut l’espérer, contenus par le blocage nucléaire et seront donc très
indirects. S’il s’agit au contraire du point de départ d’un long marasme, on
peut anticiper des fortes tensions internes dans de nombreux pays et pour les
plus instables, le chaos de type somalien ou la réapparition de régimes
dangereux. Dans tous les cas, les opérations militaires auront lieu dans le
« monde intermédiaire » entre les puissances, plus particulièrement
dans ses « zones grises » et sous forme, dite encore, par habitude,
« irrégulière » alors que cela tend à devenir la règle. La situation
économique conditionnera simplement les rapports de force.
Quoiqu’il advienne de la crise économique actuelle,
le monde à venir sera plus dangereux pour une France dont
le poids relatif économique et démographique décline inexorablement, au sein
d’un ensemble européen qui semble lui-même de plus en plus vulnérable par son
manque de dynamisme. Il n’est peut-être pas encore trop tard pour en tirer
vraiment les conséquences pour notre outil de défense, qui, de variable
budgétaire, peut devenir aussi le moteur intérieur et le garant extérieur de
nos intérêts dans cette nouvelle « guerre de trente ans ».
(1) Daniel
Cohen, La prospérité du vice, Albin
Michel, 2009. Voir aussi Luigi Scandella, Le
Kondratieff, Economica, 1998 et Bernard Wicht, Guerre et hégémonie : l’éclairage de la longue durée, Georg
Editeur, 2002.
(2) Gaston Imbert, Des mouvements de longue durée Kondratieff,La
Pensée Universitaire , Aix-en-Provence, 1959.
(3) Rapport de l’Human Security Center d’octobre 2005 repris par Philippe Bolopion, « Depuis la fin de la guerre froide, les conflits sont moins meurtriers », in Le Monde, 18 Octobre 2005.
(4) Francis Fukuyama, La fin de l’histoire et le dernier homme, Flammarion, 1993.
(5) De presque identiques au début du XIXe siècle, les costumes traditionnels dela Bretonne
et de l’Alsacienne se différencient au fur et à mesure du
« rapetissement » de la
France par les nouveaux moyens de communication. Voir
Christian Grattaloup, Géohistoire de la
mondialisation : le temps long du Monde, Armand Colin, 2006.
(6) Thomas Friedman,La Terre
est plate : une brève histoire du XXIe siècle, Saint-Simon,
2006.
(7) Arjun Appaduri, Géographie de la colère, Payot, 2007.
(2) Gaston Imbert, Des mouvements de longue durée Kondratieff,
(3) Rapport de l’Human Security Center d’octobre 2005 repris par Philippe Bolopion, « Depuis la fin de la guerre froide, les conflits sont moins meurtriers », in Le Monde, 18 Octobre 2005.
(4) Francis Fukuyama, La fin de l’histoire et le dernier homme, Flammarion, 1993.
(5) De presque identiques au début du XIXe siècle, les costumes traditionnels de
(6) Thomas Friedman,
(7) Arjun Appaduri, Géographie de la colère, Payot, 2007.
Les périodes de dépressions, qu'elles soient économiques, morales ou politiques ou encore tout cela à la fois, sont propices à l'apparition de "'sauveurs". Ces sauveurs incarnent la solution unique qui permettra à la société de se sortir de l'ornière dans laquelle elle se trouve. L'histoire de France est pavée de ce type de personnage: de Jeanne d'Arc à de Gaulle en passant par Foch ou Pétain. Ce statut s'acquièrent soit au travers du passé de l'individu (Pétain, de Gaulle) ou alors d'idées qui flattent le peuple et lui font croire à la sortie radicale de la crise. Et au final en effet chacun est un monstre à son niveau: de Gaulle supporte le poids de la perte de l'empire colonial et de l'Algérie, Pétain celui de la collaboration.... Napoléon Ier n'échappe à la règle (pensez à la campagne d'Espagne).
RépondreSupprimerQuand tout semble perdu, chacun veut croire à un miracle et quand se présente un homme qui peut l'incarner, alors tout est possible, même le plus ignoble.
L'Allemagne d'Hitler,c'est la guerre et elle en avait besoin. En effet,dans un premier temps le miracle allemand nazi est condamné sans l'invasion (au début "pacifique" par notre faiblesse)et le pillage de l'Europe. Hitler va savoir profité d'un outil industriel important tourné vers la production alors que la France du Front populaire fait la grêve (mais à augmenter le budget de la défense contrairement au Maréchal Pétain).
RépondreSupprimer[Actuel]
RépondreSupprimerPouvez vous, si votre temps n'est pas trop compté, nous faire un bref historique des cas de non paiement des soldes au sein des armées et de leurs conséquences ?
(même si ce sujet ne pose pas forcément de problématique...)
Merci,
J'ai du mal à saisir votre billet sous un quelconque angle, mais je pense finalement en avoir trouvé un : "la supériorité (en situation de crise de la demande) des politiques de relance militaire sur celles de contraction budgétaire".
RépondreSupprimerIl y a pu y avoir une "supériorité" de la politique de l'investissement dans l'outil militaire, et toutes ses ramifications. Cependant, il conviendrait de noter que nous n'avons plus le même système financier depuis cet exemple. Dans les années 30, la monnaie est produite par une banque centrale. S'il faut prêter à l'Etat, alors la banque centrale peut le faire à un taux d'intérêt dérisoire, voir inexistant. Si l'Etat ne rembourse pas, alors il faut créer de la monnaie et cette dernière se déprécie. Dans l'état actuel de notre système monétaire, nous n'avons plus de Banque centrale en Europe. Enfin, si, nous avons une chose, mais qui est prisonnière de son péché originel et d'une usurpation de puissance par l'Allemagne. De sorte que, les Etats européens, ceux de la zone euro du moins, ne peuvent plus emprunter à une banque centrale mais aux marchés.
Il convient de relever qu'il y a ceux qui ont une banque centrale ayant tout pouvoir sur la monnaie : Chine, Etats-Unis, Japon, Angleterre, etc... et ceux qui ont abandonné cet attribut de puissance.
Cependant, il me vient à l'esprit deux exemples historiques où l'on a conjugué l'aspiration à l'assainissement des finances de l'Etat avec l'aventure militaire, ou presque :
- la destruction de l'ordre des Templiers par le Roi Philippe Bel ;
- La conquête d'Alger et de ses trésors financiers (et accessoirement du Consulaire, dont on entend à nouveau parler).
Dans les deux cas, nous ne sommes pas en présence d'une démocratie. Mais face à un Etat qui se trouve dans une situation financière inextricable.
"Dans la période qui suit la Première Guerre mondiale, pour des raisons à la fois morales et économiques, la tendance est à la réduction drastique des armées."
Je ne suis pas tout à fait d'accord. Je vais peut être prendre une seule partie de l'équation de l'époque, mais cela me paraît nécessaire. Nous parlons de quoi ? De l'outil militaire ? Manifestement, cette expression désigne ce que l'on nomme aujourd'hui l'Armée de Terre. Des années 20 aux années 30 il y a bien eu une contraction de cet outil, tant pour des raisons financières que diplomatique. Cependant, tout les outils "militaires" n'ont pas eu à se plaindre de cet état. La Marine nationale a pu se reconstruire durant les années 20. Les dépenses ne lui ont pas été refusé, et ce qui a pu gêner sa reconstitution (puisque les constructions ont été gelées entre 1914 et 1918) ce sont les mêmes traités de désarmement qui ont plombé la remise en route de l'Armée de Terre.
"Qu’il constate que ces dépenses militaires relancent l’économie."
Finalement, je suis plus tout à fait d'accord avec cette affirmation. Ce qui a pu, notablement, relancer l'économie allemande, ce serait le détricotement du traité de Versailles sur ses conséquences financières. D'autre part, c'est le fait que l'industrie allemande ne fut pas détruite pendant la guerre. La crise de 1929 toucha particulièrement durement l'Allemagne puisque les Etats-Unis retireront leurs capitaux. Cependant, toute contraction rapide permet, normalement, de se relever plus rapidement.
"La faiblesse des démocraties"
Ces dernières années, entre l'éclatement de deux bulles, les régimes "totalitaires", ou tyranniques, n'ont pas vraiment eu le temps de souffler. Ce qui inverserait la situation.
Je suis navré de ne pas rédiger une réponse mieux construite, mais j'avoue que votre texte m'intrigue autant qu'il me bloque !
Bonjour,
RépondreSupprimerMerci d'abord pour ce blog fort intéressant, qui permet de s'agiter un peu les neurones.
Par ailleurs, je m’aperçois, en lisant ce billet, que je ne me suis jamais vraiment posé la question des origines du financement de la remilitarisation de l’armée allemande (ou, si je l'ai su, je l'ai oublié...). Évidemment, on sait le rôle des industriels et banquiers allemands, mais leur puissance financière venait-elle des exportations de produits, de la consommation intérieure, etc. ? A part eux, y a-t-il eu des sources étrangères (prêts, etc.) Peut-on avoir un éclairage un peu plus détaillé sur ce sujet ?
Merci d'avance
d ou venait l argent!! seul les noms en façade ont changer,voir le livre de Kurt Gossweiler,'hitler l irresistible ascencion'
RépondreSupprimerEst-il judicieux, en période de crise financière et morale, de réduire ses ressources militaires et de focaliser l’outil sur la sécurité intérieure, alors que la potentialité de danger augmente ?
RépondreSupprimerSur le constat, il est évident que nous sommes en période de contraction, et il est fort probable qu’un prochain train de mesures aboutira à une baisse capacitaire (NB : il se dit que les commandeurs n’accepteront plus un échenillage du soutien et souhaitent mettre l’équation missions/moyens au centre de la discussion en mettant les politiques face à leurs responsabilités en proposant une réelle baisse capacitaire ; cf les discussions sur le bien fondé de maintenir une capacité blindés lourds). Il est également probable que le prochain Livre blanc fera coïncider baisse capacitaire et réorientation de l’outil défense vers la sécurité intérieure, avec quelques mesures d’accroissement en matière de renseignement et d’actions spéciales pour parer à la menace visible dans l’arc de crise, et certainement une poursuite de la civilianisation et de l’externalisation du soutien
La réorientation du MINDEF vers la sécurité intérieure est également un fait, pas seulement terminologique (SGDSN au lieu de SGDN, MINDAC au lieu de MINDEF, …) mais aussi organisationnel (La PODEC au lieu de « préparer la ou une guerre » est bien ressenti comme « l’entraînement du pauvre ; cf le blog du CEMAT).
Pour autant, ces mesures amputent l’outil ou le réorientent sans débats (quid des programmes électoraux pour 2012 ?) et sans texte fondateur. Aussi La réécriture du Livre blanc sera structurante et ne devra pas seulement mettre en adéquation moyens et missions ( dans cet ordre précis …).
Je cite à cet effet le seul actuel ministre d’Etat : « L’explosion de la zone euro serait celle de l’Union Européenne elle-même. Dans cette hypothèse là, tout devient possible. Même l e pire. Nous nous sommes flattés pendant des décennies d’avoir éradiqué tout danger de conflit à l’intérieur de notre continent, mais ne soyons pas trop sûrs de nous. La montée du populisme, des nationalismes, des extrémismes en Europe rend la construction de l’Union Européenne plus vitale que jamais. » (A. Juppé, entretien à L’Express du 30 novembre 2011) et je laisse mesurer le fossé avec le « Engrangeons les dividendes de la paix »
Le Monde semble encore plus dangereux aujourd'hui que dans les années 30. Ce n'est plus seulement l'Europe (et ses empires...) qui sont concernés, mais également tous les pays, sur tous les continents: mondialisation oblige! L'arc de crise (en fait la croix de crise) s'allonge aujourd'hui vers l'Est et rejoint le Pacifique via le Pakistan, la Chine et la Corée... Qu'en résultera-t'il?
RépondreSupprimerPar ailleurs, nous assistons à un réarmement inquiétant en matière navale et aéronautique tout au long de cet arc de crise. Il est urgent de renforcer les capacités aéronavales fançaises et la logistique à long rayon d'action. Pour celà un redéploiement des finances publiques s'imposent, si l'on ne veut pas, comme en 37-38 faire trop peu, et trop tard... Pour les US, un Porte-Avions c'est 90.000 t de "diplomatie". C'est ce que ne comprennent pas nos politiques... On peut acheter à l'étranger des chars lourds dans l'urgence, mais plus de nos jours, un P.A. et ses systèmes d'armes... ni des hélicos ou des avions, comme les anglais viennent d'en faire l'expérience!
Réarmer la France, renforcer l'Europe militaire, même si elle ne reste qu'un pilier de l'Otan, c'est aider l'industrie et donc créer des emplois à forte valeur ajoutée en France. C'est en plus augmenter son prestige à l'international et donc peut-être favoriser les exportations...
A ce propos, quelqu'un peut-il expliquer pourquoi il y a encore dix ans, lorsque l'on livrait 1 Airbus à l'étranger cela nous rapportait beaucoup, et pourquoi maintenant, lorsqu'on les livre par dizaine çà ne redresse aucunement notre balance commerciale, encore moins celle des paiements?
L'Histoire aime à se répéter ! Les situations des années 30 et d'aujourd'hui se ressemblent beaucoup : crise économique, affaiblissement des démocraties par l'intérieur. Recherche de l’apaisement social par le renforcement des mesures de sécurité intérieure. Crise identitaire en Europe, renforcement des systèmes totalitaires (Russie, intégrisme) ou "forts" (Chine). Il faut espérer que nos politiciens, dont le rôle est de prendre des décisions et de préparer l'avenir mais qui ne pensent qu'à court terme actuellement, ne s'aveuglent comme l'on fait une grande partie des politiques de l'époque (Chamberlain). Réarmer l'Europe serait un moyen de renforcer notre voix dans les affaires "globales". Seul l'Europe peut encore, avec les Etats-Unis, intervenir dans le monde. Ni la Chine, ni la Russie, ni l'Inde, ni le Brésil ne peuvent le faire. Pas encore, mais la nature n'aime pas le vide. Pour cela, il faudrait que l'Europe parle d'une même voix. Là aussi nos politiciens se doivent de prendre leurs responsabilités.
RépondreSupprimerPour ceux qui veulent un aperçu historique de la question : http://lespoir.jimdo.com/2011/10/31/le-lib%C3%A9ralisme-%C3%A9conomique-a-t-il-enfant%C3%A9-hitler/
RépondreSupprimerBien cordialement.
Pour formuler la chose d'une façon très générale :
RépondreSupprimer1° Une crise économique tend à conduire un régime pacifique à sacrifier l'effort militaire.
2° Elle peut aussi amener au pouvoir un groupe belliqueux, enclin à l'effort militaire.
3° Un régime belliqueux, en cas de crise économique, peut être tenté par la fuite en avant : la guerre.
Bonjour,
RépondreSupprimerMerci pour ce texte. Je voulais juste signaler une coquille dans la phrase
" Les Etats-Unis triomphent par abandon mais ils quand sont obligés de demander"
N'hésitez pas à effacer ce commentaire
Bonne soirée
Bonjour,
RépondreSupprimerConcernant l'interrogation de la reprise de la croissance ou d'un marasme économique, il semble que ce soit la seconde issue qui prévaudra, le pétrole entrant dans une phase de déclin structurel (pas de découverte significative depuis les années 80, les nouveaux gisements très techniques donc chers à exploiter) et l'économie étant au premier ordre proportionnelle au pétrole consommé. Le maximum de production de pétrole conventionnel a eu lieu entre 2005 et 2006 (expliquant 2008), et le maximum tous pétroles confondu en 2018-2019 (la crise pétrolière a été masquée par la Covid-19, mais elle est encore devant nous).
C'est ce même pétrole qui explique une bonne partie des guerres ou a minima des décisions stratégiques au XXe siècle (l'Allemagne nazie n'a pas de pétrole, elle doit donc se saisir des stocks au sud de la Méditerranée et en Russie en faisant face à des ennemis bénéficiant d'un pétrole qui coule à flots, idem pour la situation du Japon). Toutes les tensions au Moyen Orient dérivent aussi du contrôle du pétrole (les USA ne souhaitant pas un pouvoir hégémonique d'une nation arabe sur l'ensemble des réserves, ils ont donc tapé alternativement sur l'Iran ou l'Irak en fonction de la capacité de contrôle sur les champs qu'avaient ceux ci)