Modifié le 23/09/2014
Entre le 8 juillet et le 26 août 2014, Israël et le Hamas se sont affrontés
dans des hostilités connues en Israël sous le nom d’opération Bordure protectrice.
D’un point de vue tactique, cette opération se distingue avant tout des
précédentes par un taux de pertes des forces terrestres israéliennes
singulièrement élevé. L’armée de terre israélienne a ainsi déploré la perte de
66 soldats en 49 jours de combat contre deux lors de l’opération Pilier de défense en 2012 (7 jours) et
10 lors des 22 jours de l’opération Plomb
durci en 2008-2009.
Ces pertes israéliennes se rapprochent de celles subies lors de la
guerre de 2006 contre le Hezbollah (119 morts pour 33 jours de combat), alors
considérée comme un échec. Elles sont à comparer à celle de leurs ennemis, de
l’ordre de 90 combattants palestiniens tués contre aucun israélien en 2012 mais
selon un ratio de 40 à 70 contre 1 pour Plomb
durci et de 6 à 10 contre 1 pour Bordure
protectrice.
Cette singularité s’explique essentiellement par les innovations
opératives et tactiques des brigades al-Qassam, la branche armée du Hamas,
contrastant avec la rigidité du concept israélien d’emploi des forces qui lui n’a
guère évolué depuis dix ans. Ces innovations ont permis aux forces du Hamas, à
l’instar du Hezbollah et peut-être l’Etat islamique, de franchir un seuil
qualitatif et d’accéder au statut de « techno-guérilla » ou de
« force hybride ».
La
nouvelle armée du Hamas
Cette évolution trouve son origine dans les solutions apportées par le
Hamas à son incapacité à franchir la barrière de défense qui entoure le
territoire de Gaza pour agir dans le territoire israélien. Pour cela, l’organisation
a développé ses capacités offensives dans les trois dimensions.
La première innovation a consisté, avec l’aide de l’Iran, se doter d’un
arsenal de roquettes à longue portée comme les M-75 et Fajr 5 (80 km de portée) et surtout
les M-302 ou les R-160 susceptibles de frapper à plus de 150 km, c’est-à-dire sur la
majeure partie du territoire israélien. A l’imitation du Hezbollah et toujours
avec l’aide de l’Iran, les Brigades al-Qassam se sont dotés également
d’une petite flotte de drones Abadil 1, dont certains transformés en
« bombes volantes ».
Le Hamas s’est aussi doté, pour la première fois, de moyens de frappe
directe jusqu’à des distances de plusieurs kilomètres. Des missiles antichars
AT-4 Fagot (2 500 m
de portée), AT-5 Spandrel (4
000 m) et surtout AT-14 Kornet (5 500m), provenant
principalement de Libye via l’Egypte de l’époque des Frères musulmans, ont été
identifiés, de même que des fusils de tireurs d’élite à grande distance (Steyr.50
de 12,7 mm).
Ces armes constituent une artillerie légère qui permet d’harceler les forces
israéliennes le long de la frontière et d’appuyer les capacités de combat
rapproché.
Enfin, le Hamas a développé des capacités de raids à l’intérieur du
territoire israélien par la formation d’unités
amphibies tout d’abord et surtout par la construction d’une quarantaine de
tunnels offensifs. Ces tunnels offensifs sont à distinguer des galeries destinées
à contourner le blocus pour s’approvisionner en Egypte et qui avaient constitué
un objectif prioritaire de l’opération Plomb
durci. Il s’agit au contraire d’ouvrages bétonnés, placés entre dix et
trente mètres sous la surface et longs de plusieurs kilomètres. Certains sont
équipés de systèmes de rails et wagonnets.
Toutes ces capacités offensives se sont appuyées aussi sur des
innovations défensives. Une nouvelle infrastructure souterraine, baptisée
« Gaza sous Gaza », protège les centres de commandement du Hamas, ses
stocks et une partie de ses combattants, répartis en secteurs autonomes de
défense bien organisés.
Durant la première phase de la guerre, le Hamas a utilisé immédiatement son
arsenal de roquettes pour attaquer les villes israéliennes. Cette campagne
anti-cités n’a eu que très peu d’effets directs. Au total, en 49 jours, 4 382
roquettes et obus de mortiers ont été lancés sur Israël causant la mort de 7
civils, soit un ratio de 626 projectiles pour une victime. Par comparaison ce
ratio était de 301 pour 1 lors de Pilier
de défense, de 187 pour 1 lors de Plomb
durci en 2008-2009 et d’environ 100 pour 1 en 2006 lors de l’affrontement
avec le Hezbollah. Il est même probable que la réduction sensible du trafic
routier liée au conflit ait in fine diminué
la mortalité dans la population civile israélienne.
L’emploi des drones explosifs par le Hamas s’est également révélé un
échec, les deux engins lancés, le 14 et le 17 juillet, ayant été rapidement
détruits, l’un par un missile anti-aérien MIM-104 Patriot et l’autre par la
chasse.
Si les destructions depuis le ciel ont été très limitées, les effets
indirects ont été en en revanche très sensibles. L’économie et la vie courante ont
été perturbées par la menace des roquettes comme jamais sans doute auparavant, jusque sur l’aéroport Ben Gourion de Tel Aviv. Il
n’y a avait cependant rien dans cette menace qui puisse paralyser le pays.
L’artillerie à longue portée du Hamas s’est avérée, plus que jamais, une
arme de pression et un diffuseur de stress (le nombre des admissions
hospitalières pour stress a été cent fois supérieur à celui des victimes) plutôt
qu’une arme de destruction. Elle a surtout constituée le symbole de la
résistance du Hamas, et de ses alliés, tout en justifiant le « besoin de
sécurité » d’Israël aux yeux du monde extérieur. Bien que faisant 200 fois
moins de victimes civiles que les raids aériens, elles peuvent par leur
destination uniquement anti-cités être qualifiées d’ « armes
terroristes ».
Cette inefficacité des frappes du Hamas s’explique par la combinaison
des mesures de protection civile israélienne et du système d’interception Dôme de fer. Déjà employé à moindre
échelle lors de l’opération Pilier de
défense, le système Dôme de fer a
été officiellement crédité de 88 % de coups au but sur les 800 roquettes jugées
dangereuses et prises pour cibles. Si ce chiffre est contesté, il n’en demeure
pas moins que ce système très sophistiqué est efficace, surtout contre les
projectiles à longue portée, sinon efficient au regard de son coût d’emploi. Si
les 4 450 roquettes lancées avaient toutes été interceptées par les
missiles de Dôme de fer, il en aurait
coûté environ 200 millions d’euros à Israël pour recompléter son stock. Cela
est couteux mais pas rédhibitoire.
Au bilan, Israël a réussi à se doter d’une protection totale
multi-couches et à se placer ainsi dans ce que les stratèges du nucléaire
avaient baptisés « capacité de première frappe indirecte »,
c’est-à-dire la possibilité de frapper son adversaire quand on le souhaite (et
donc éventuellement en riposte) sans crainte d’être touché.
De son côté, Israël a utilisé sa force aérienne (qui inclut les
hélicoptères d’attaque) et son artillerie pour frapper l’ensemble de la bande
de Gaza. Cet emploi, désormais classique, poursuivait deux
objectifs opérationnels, par ailleurs complémentaires d’un blocus
insuffisant à ces égards : l’affaiblissement de l’instrument militaire du Hamas,
en particulier ses capacités d’agression du territoire israélien, et, de manière
moins avouée, faire pression sur la population pour qu’elle renvoie le Hamas a
ses obligations « étatiques » de sécurité et de fonctionnement normal
de la société. A défaut de les détruire, il s’est agi de de faire pression
simultanément sur deux pôles de la trinité clausewitzienne, l’armée et la
population, pour influencer le troisième, le « gouvernement » du
Hamas.
Le premier objectif n’a été que très modestement atteint. Le nombre
total de frappes a représenté le double de celui de Plomb durci, soit environ 5 000, pour des pertes estimées de
combattants palestiniens sensiblement équivalente. Sachant que ces pertes sont
aussi pour une grande part, et bien plus qu’en 2008, le fait des forces
terrestres, il est incontestable que l’impact de la campagne de frappes sur les
capacités militaires du Hamas a été faible. Si quelques leaders du mouvement
palestinien ont été tués comme Mohammed Deif, commandant présumé des brigades
al-Qassam, les tirs de roquettes n’ont jamais cessé et la capacité de combat de
combat rapproché a été peu affectée.
Cette inefficacité est essentiellement le fait de l’adoption par le
Hamas de procédés de furtivité terrestre efficaces. Plusieurs commentateurs ont
marqué leur surprise de ne voir que peu de combattants du Hamas dans les rues
de Gaza contrairement aux conflits précédents. Cette furtivité repose
principalement sur l’organisation du terrain, déjà évoquée, mais aussi par des
procédés comme l’emploi de systèmes de tir automatiques pour les roquettes,
permettant de réduire les risques pour les servants. Le Hamas, comme le
Hezbollah en 2006, a
aussi simplement compté sur le nombre. Les lance-roquettes peu couteux et
abondants étaient consommables et qu’ils soient repérés et frappés en quelques
minutes importait finalement peu.
Le deuxième objectif, faire pression sur la population dans son ensemble
pour, indirectement, imposer sa volonté au « gouvernement » de Hamas,
est toujours aussi moralement et opérationnellement problématique. Outre les 1
300 à 1700 victimes civiles et les dizaines de milliers de blessés, plus de
11 000 habitations ont été détruites et presque 500 000 personnes,
sur 1,8 million, ont été déplacées. Les systèmes d’alimentation en eau et en
électricité ont été détruits. Si le lien entre ces actions sur la population et
la haine que celle-ci peut porter à Israël est évident, si la dégradation à
l’étranger de la légitimité du combat d’Israël ou simplement de son image est
établie, la corrélation entre cette action sur la population et les décisions
du Hamas n’est pas claire. Si des mouvements de colère ont pu être constatés
contre le Hamas, en particulier lorsque des trêves ont été rompues par lui à la
fin du conflit, il n’est pas du tout évident que le Hamas sorte politiquement
affaibli de ce conflit.
Au bilan, on peut s’interroger sur la persistance, dans les deux camps,
de l’emploi de frappes à distance sur la population civile, emploi qui s’avère
à la fois moralement condamnable et d’une faible efficacité. La réponse réside
probablement dans les capacités défensives de chacun des deux camps qui
inhibent les attaques terrestres. Comme les premiers raids de bombardement
britanniques sur l’Allemagne en 1940, largement inefficaces, lancer des
roquettes ou des raids aériens apparaît comme la seule manière de montrer que
l’ « on fait quelque chose », avec ce piège logique que si l’un
des camps frappe, l’autre se sent obligé de l’imiter puisqu’il peut le faire. Le
message vis-à-vis de sa propre population l’emporte sur celui destiné à
l’étranger.
Cet équilibre, qui aurait pu aboutir à une dissuasion par l’impuissance
réciproque, a finalement été modifié par le développement par le Hamas de
nouvelles capacités d’agression. Loin de dissuader Israël, ces capacités
nouvelles l’ont plutôt poussé à agir. Leur destruction imposait cependant de
pénétrer à l’intérieur des zones les plus densément peuplées de Gaza.
Le
retour des combats au sol
Dans la nuit du 17 juillet, dix brigades israéliennes ont été déployées
le long de la frontière. Plusieurs de ces brigades ont été engagées à
l’intérieur du territoire de Gaza dans des opérations limitées destinées à
détruire quelques sites de lancement de roquettes et surtout le réseau
souterrain du Hamas, en particulier à proximité de la frontière Nord et
Nord-Est. Elles n’avaient pas vocation à détruire la structure de commandement
du Hamas, mais étaient censées accentuer la pression sur lui.
Ces opérations ont rencontré une forte résistance qui a occasionné des
pertes sensibles aux forces israéliennes. Contrairement à l’opération Plomb durci de 2008-2009 où elles
s’étaient contentées de pénétrer dans les espaces plus ouverts du centre de la
bande de Gaza dans ce qui ressemblait surtout à une démonstration de force, les
unités israéliennes ont été contraintes cette fois d’agir dans les zones
confinées et densément peuplées de la banlieue de Gaza ville, beaucoup plus
favorables au défenseur. Elles y ont rencontré une infanterie professionnelle
bien entraînée et équipée pour le combat rapproché en milieu urbain. A la
manière du Hezbollah, les 10 000 combattants permanents du Hamas, auxquels
il faut ajouter autant de combattants occasionnels et de miliciens des autres
mouvements, étaient organisés en unités autonomes combattant chacune dans un
secteur donné et organisé. Les axes de pénétration, par ailleurs généralement
trop étroits pour les véhicules les plus lourds, ont été minés dès le début des
hostilités selon des plans préétablis et des zones d’embuscade ont été
organisées. Des emplacements de tirs (trous dans les murs) et des galeries ont
été aménagés dans les habitations de façon à pouvoir combattre et se déplacer
entre elles en apparaissant le moins possible à l’air libre. Le combat a alors
été mené en combinant l’action en essaim de groupes de combat d’infanterie et
celui des tireurs d’élite/tireurs RPG ou, plus difficile dans le contexte
urbain dense, de celui des missiles antichars. Dans tous les cas, la priorité
était d’infliger des pertes humaines plutôt que de tenir du terrain ou de
détruire des véhicules. Dans plusieurs cas, les Palestiniens ont préféré tirer
des projectiles antichars sur des fantassins débarqués que sur des véhicules
blindés.
Les combats ont été d’une intensité inconnue depuis la guerre de 2006
contre le Hezbollah. Le 19 juillet, une section de la brigade d’infanterie Golani a été canalisée vers une zone
d’embuscade où elle a perdu sept hommes dans la destruction d’un véhicule M113
par une roquette RPG-29. Six autres soldats israéliens ont été tués aux
alentours dans cette seule journée qui s’est ainsi avérée plus meurtrière pour
elle que les deux opérations Plomb durci
et Pilier de défense réunies. Cinq
hommes sont encore tombés le lendemain dans le quartier de Tuffah, en grande
partie par l’explosion de mines, et le nombre de tués et blessés de la brigade Golani s’est élevé à plus de 150 dont
son commandant. Les pertes des Palestiniens ont été supérieures mais
certainement pas dans le rapport de 10 pour 1 revendiqué par Tsahal.
Dans ce contexte d’imbrication et alors que la population civile était souvent
à proximité, la mise en œuvre des appuis était difficiles. Les
hélicoptères d’attaque pouvaient tirer sur la presque totalité de la zone
d’action des forces d’attaque mais les combattants palestiniens ont été peu
visibles depuis le ciel. Les appuis indirects présentaient toujours le risque
de frapper la population, ce qui est survenu le 20 juillet lorsque plusieurs
obus ont tué peut-être 70 Palestiniens et blessé 400 autres, pour la très
grande majorité civils. L’emploi de robots de reconnaissance dans les zones difficiles
et dans les tunnels (les Micro Tactical
Ground Robot, MTGR en particulier) s’est avéré en revanche très efficace,
sauvant incontestablement plus de vies israéliennes. Le 1er août,
l’annonce de la capture d’un soldat israélien près de Rafah, démentie par la
suite, suscitait une forte émotion en Israël et des scènes de liesse dans les
rues de Gaza, témoignant de l’importance stratégique des prisonniers. Tsahal ne
voulait absolument pas renouveler l’expérience du soldat Gilad Shalit capturé
en juin 2006 et finalement libéré cinq ans plus tard en échange de 1 000
prisonniers palestiniens. Une opération de récupération a été immédiatement
lancée.
Les Palestiniens ont riposté à l’offensive terrestre dès le 18 juillet
en menant à leur tour des raids sur le territoire israélien. Si les unités
amphibies ont toutes été décelées et détruites, les quatre raids par les
tunnels ont obtenu plus de succès, surprenant au moins par deux fois des unités
israéliennes et leur infligeant au total entre sept et onze tués, suivant les
sources. Les commandos palestiniens ne sont cependant jamais parvenus à
pénétrer dans les villes.
Au bilan, les Israéliens revendiquent la destruction de la presque
totalité des tunnels offensifs et de quelques zones de lancement de roquettes ainsi
que la mort de centaines de combattants du Hamas. La menace jugée principale
est ainsi considérée comme éliminée et l’armée israélienne a montré sa capacité
tactique à pénétrer à l’intérieur de défenses urbaines très organisées et sa
résilience en acceptant les pertes inévitables de ce type de combat, surtout
face à une infanterie ennemie déterminée et compétente. Ces pertes, qui, par
jour d’engagement au sol sont de l’ordre de grandeur de celles infligées par le
Hezbollah en 2006 (119 morts) sont les plus importantes jamais infligées par
des Palestiniens, y compris l’armée de l’Organisation de libération de la Palestine occupant le
Sud-Liban en 1982. A
cette époque, l’armée de l’OLP avait été détruite. Cette fois, le potentiel de
combat du Hamas et sa volonté ne sont pas sérieusement entamés.
Après dix-huit jours d’offensive terrestre et alors que l’opinion
publique était, malgré les pertes, favorable à 82 % à sa poursuite, le
gouvernement israélien y a renoncé, reculant devant l’effort considérable nécessaire
pour détruire complètement le Hamas et la perspective d’être peut-être obligé
de réoccuper la zone. Le 3 août, les forces terrestres israéliennes se sont
retirées de la bande de Gaza après l’annonce que la mission de destruction des
tunnels était remplie.
A la fin de la phase terrestre, les capacités offensives du Hamas avaient
été détruites ou neutralisées. Le gouvernement israélien pouvait considérer cet
objectif comme suffisant. Il a plutôt estimé se trouver ainsi dans une
meilleure position pour accepter la prolongation des combats. La poursuite des
tirs de roquette et la mobilisation des réservistes continuait de perturber
l’économie du pays mais bien moins que la campagne de frappes sur la bande de
Gaza.
Les forces terrestres ont été redéployées le long de la frontière avec
une démobilisation partielle des 100 000 réservistes, non pas en signe
d’apaisement mais, au contraire, pour préparer un combat prolongé mais indirect.
Paradoxalement, si des signes de mécontentement contre le Hamas sont apparus, c’est
peut-être du côté israélien que le soutien de l’opinion publique s’est érodé le
plus vite. Le 25 août, un sondage indiquait que seulement 38 % des Israéliens
approuvaient la manière dont les opérations étaient menées, le principal
reproche étant l’absence de résultats décisifs. De nouvelles négociations
avaient déjà été initiées depuis trois jours, aboutissant à un cessez-le-feu
définitif le 1er septembre.
A l’issue du conflit, le Hamas est militairement affaibli, avec moins de
possibilités de recomplètement de ses forces que durant les années précédentes,
du fait de l’hostilité de l’Egypte. Il lui faudra certainement plusieurs mois,
sinon des années pour retrouver de telles capacités. Mais il n’y a cependant là
rien de décisif. Il aurait fallu pour cela nettoyer l’ensemble du territoire à
l’instar de la destruction de l’OLP au Sud-Liban. Cela aurait coûté sans doute
plusieurs centaines de tués à Tsahal pour ensuite choisir entre se replier, et
laisser un vide qui pourrait être occupé à nouveau par une ou plusieurs
organisations hostiles, et réoccuper Gaza, avec la perspective d’y faire face à
une guérilla permanente. Le gouvernement israélien a privilégié le principe
d’une guerre limitée destinée à réduire régulièrement (tous les deux ans en
moyenne) le niveau de menace représenté par le Hamas.
La difficulté est que les opérations de frappes apparaissent de plus en
plus stériles pour y parvenir et que les opérations terrestres, plus efficaces,
sont aussi de plus en plus couteuses. Après le Hezbollah, et encore dans une
moindre mesure, le Hamas est parvenu à franchir un seuil opératif en se dotant d’une
infanterie professionnelle dotée d’armes antichars et antipersonnels performantes
et maitrisant des savoir-faire tactiques complexes. Cet effet de seuil impose
en retour un effort d’adaptation tactique important.
Shefira Zuhur, Hamas and Israel:
Conflicting Strategies of Group-Based Politics, Strategic Studies
Institute, December 2008.
David E Johnston, Hard fighting-Israel in Lebanon
and Gaza, Rand
Corporation, 2011.
Tira, Ron, “Operation Protective Edge: Ends,
Ways and Means and the Distinct Context”, Infinity
Journal, September 2014.