La révolution du fusil et ses conséquences
Jusqu’aux années 1840, l’espace de combat dans lequel les forces terrestres s’affrontaient est toujours resté très étroit du fait de la faible portée des armes, mais aussi de la faible mobilité des troupes, limitée à la marche ou au transport à cheval, ainsi que de la lente transmission des informations.
Pourvu qu’il soit bien placé, le chef d’armée peut alors savoir où est l’ennemi et même le voir avant de subir les effets de ses armes. Il est donc presque toujours possible de manœuvrer et de s’organiser avant le combat dans un « rayon de commandement » de quelques kilomètres. C’est ainsi que l’on retrouve la Grande Armée le 18 juin 1815 à Waterloo avec six corps d’armée mis en place dans un rectangle de trois kilomètres de front et deux kilomètres de profondeur.
Tout bascule lorsqu’on commence à concevoir des fusils qui associe un canon à âme rayée, qui fait tourner la balle et lui donne une plus grande portée pratique, et un armement par la culasse avec des cartouches complètes. Cela paraît anodin, mais cela change tout. En 1815, un bataillon d’infanterie pouvait tirer en une minute près de 2 000 coups à une portée pratique 100 mètres. En 1850, le même bataillon équipé du fusil prussien Dreyse peut en envoyer 4 000 à 400 m.
Comme parallèlement à cette augmentation de puissance de feu on continue à se déplacer à pied ou à cheval, aborder l’ennemi impose de franchir un mur de milliers de projectiles de plus en plus dense et profond. En 1815, on s’approchait, on tirait et puis on pouvait aborder l’ennemi en subissant au maximum un tir de sa part. Face aux nouveaux fusils, il faut faire face à huit tirs successifs avant d’arriver au contact de la ligne ennemie, ce qui est évidemment une autre affaire. À cheval il ne faudra peut-être faire face qu’à quatre tirs, mais comme on constitue une cible beaucoup plus importante qu’un fantassin, le défi est encore plus rédhibitoire.
Certains vont considérer que pour aborder l’ennemi, il suffira de rester groupé et d’aller plus vite. C’est en partie l’origine du « pas chasseur » plus rapide que les autres ou de l’habitude des Bersagliers de défiler en courant. Les balles persistant à aller beaucoup plus vite que les hommes, c’est une approche qui trouve vite des limites. D’autres estiment qu’il faut s’avancer dispersé en tirailleurs afin de mieux échapper aux feux et de soi-même mieux tirer, mais on s’aperçoit que les soldats échappent alors rapidement au contrôle des officiers et qu’on n’arrive jamais au contact de l’ennemi de cette façon. Ce problème tactique ne trouvera de solution que pendant la Première Guerre mondiale.
En attendant, on se trouve dans toutes les armées dans une position où il devient très difficile d’aborder l’ennemi. Il est donc encore plus difficile de percer son dispositif et de le disloquer. Or, sans dislocation, il n’y a pas de résultat décisif mettant fin au combat, mais une usure des deux camps. L’attaque de flanc sur le plateau de Pratzen à Austerlitz en 1805 ou la charge de la colonne Mac Donald à Wagram en 1809 deviennent des souvenirs. L’infanterie française parvient bien à percer le centre autrichien à Solférino, en 1859, mais elle ne réussit que parce que l’infanterie autrichienne n’est pas encore équipée de ce qui se fait de mieux. Lorsque les Autrichiens tentent d’imiter les Français à Sadowa en 1866, ils se font massacrer par les Prussiens. Et avec le fusil Chassepot adopté à la même époque, les fantassins français sont encore mieux armés que les Prussiens.
Devant une telle augmentation de la puissance de feu, il n’est plus besoin, ni même souhaitable de conserver les mêmes densités de troupes que sous la période napoléonienne, sous peine là encore de massacres comme lors de la bataille de Shiloh aux États-Unis en 1862 où plus de soldats américains tombent en deux jours que pendant toute la guerre de 1812-1814 contre l’Angleterre. La dispersion et l’adaptation au terrain s’imposent. Là où on met six corps d’armée à Waterloo, il n’y en plus qu’un seul en 1870.
Dans le même temps, le nombre des unités de combat ne cesse d’augmenter grâce à la démographie, la conscription généralisée et la capacité de soutien des économies industrialisées. L’armée prussienne mobilisée en 1870 est trois fois plus importante que celle de 1815. La combinaison de la moindre densité des forces sur le front et de l’augmentation du nombre d’unités entraine mécaniquement une augmentation de la largeur des fronts. Cette extension est d’autant plus importante que l’on a de plus en plus tendance à ne plus distribuer les forces en profondeur pour essayer de percer le front ennemi, mais plutôt latéralement pour essayer de le contourner. On aboutit ainsi à une dilatation des espaces de batailles. Une campagne moyenne ne se déroule plus avec une armée de 100 000 hommes finissant pas se regrouper dans un carré de 10 km2 pour combattre, mais avec deux à quatre armées qui forment chacune un rectangle de 100 km2 au contact de l’ennemi. Lorsque de tels rectangles opposés se rencontrent sans pouvoir se disloquer, il est également difficile d’obtenir une décision dans une seule journée. Les batailles tendent donc aussi à s’étendre sur plusieurs jours.
Cette dilatation de l’espace-temps pose de nouveaux problèmes de commandement. Grâce au chemin de fer et au télégraphe cela se passe plutôt mieux qu’avant au niveau opérationnel. Il est plus facile de mouvoir ces armées de manœuvre que les corps d’armée de Napoléon, mais seulement avant la rencontre avec l’ennemi. Dès qu’il y a contact en revanche, les choses sont plus compliquées. Il est désormais beaucoup plus difficile, sinon impossible pour le chef de voir l’ennemi avant de se faire tirer dessus et les combats débutent souvent dès qu’une partie des troupes rencontre l’ennemi. L’agencement des forces se fait dans l’action et non plus avant, alors que la circulation de l’information repose toujours sur la vitesse du messager à cheval ou à pied sous le feu de l’ennemi.
Les dispositifs dilatés avec des forces plus dispersés et des fantassins qui peuvent tirer à distance à genoux ou couchés deviennent moins visibles. Les comptes rendus qui remontent jusqu’au commandant d’armée désormais plus en arrière de la ligne de contact sont lents et imparfaits. La prise de décision est difficile et les ordres descendants tout aussi lents. Pour pouvoir fonctionner quand même efficacement, il n’est guère d’autre solution que de redistribuer le commandement et décentraliser la conception des ordres de manœuvre. Cela suppose de surmonter des réticences internes à ce qui s’apparente à des pertes de pouvoir. Cela induit aussi un effort proportionnel et donc considérable de formation des cadres jusqu’au plus petit échelon.
En résumé, en juillet 1870 lorsque la France et la coalition allemande entrent en guerre, l’art de la guerre consiste à être capable d’organiser et de faire manœuvrer ensemble plusieurs armées de 100/150 000 hommes face à des armées équivalentes qu’il va falloir non pas détruire par dislocation mais étouffer par encerclement. Très clairement, une des deux armées y est mieux préparée que l’autre.
La guerre comme révélateur de problèmes non résolus
La France découvre de son côté que la mobilisation ne s’improvise pas. L’intendance, qui est dotée d’une organisation distincte de celle des forces de combat, est saturée et les axes de communications, principalement les voies ferrées, sont bouchés. Les régiments français partent à la frontière sans attendre leurs réservistes, il est vrai beaucoup moins nombreux que les Allemands. Au total, la France ne réunit que 350 000 hommes au total, pour la plupart en cours de réunion dans deux armées, d'Alsace et de Lorraine, de part et d’autre des Vosges avec 7 corps d’armée. En face, Prussiens et autres Allemands, réunissent 550 000 hommes en première ligne et 400 000 en deuxième échelon dans la Landwehr. L’ensemble, certes plus hétérogène puisqu’il intègre plusieurs armées nationales, forme 15 corps d’armée. La plupart sont réunis au sein de trois armées placées à l’ouest du Rhin au plus près de la frontière.
Les Français découvrent ensuite qu’ils sont incapables de manœuvrer ces grandes forces avec la même souplesse que les Prussiens. Contrairement à ces derniers, et à l’exception de la Garde impériale qui avait une structure de commandement permanente, tous les états-majors de divisions, de corps d’armée et des armées de Mac Mahon en Alsace et Bazaine en Lorraine sont constitués pendant la mobilisation.
Au niveau le plus élevé, les deux maréchaux français se jalousent, coopèrent mal et sont peu disciplinés, tout le contraire des commandants d’armées prussiennes. Les officiers français ont tous ou presque une expérience du combat, en Algérie, Italie ou ailleurs, mais pas du tout l’habitude de manœuvrer à une telle échelle. Les officiers d’état-major prussien ont peut-être peu fait la guerre, mais ils ont fait l’école de guerre, la Kriegsakademie. Ils sont bien formés, s’appuient tous sur une doctrine commune et se connaissent suffisamment pour savoir ce que va faire le voisin et comment se coordonner avec lui. À l’intérieur des rectangles de 100 km2 des armées prussiennes, on se meut donc beaucoup plus rapidement qu’à l’intérieur des armées françaises. On s’y meut d’autant plus rapidement, et notamment face à l’ennemi, que les Prussiens ont su transformer leur cavalerie en organe de reconnaissance, là où les Français, malgré les enseignements de tous les conflits récents, ont conservé une cavalerie de choc et rupture qui bien sûr se brise inutilement sur les feux modernes. Il y 65 régiments de cavalerie français au début de la guerre, ils ne sont plus que 11 le 1er septembre. Pendant tout ce temps, les corps d’armée français auront été myopes et ne cesseront de se faire surprendre.
Aussi n’est-il guère étonnant que la rencontre des Français avec les trois armées ennemies sur la frontière se passe mal pour eux. Sur les deux points de contact, le scénario est le même. Deux corps d’armée ennemis se rencontrent et se stoppent. Les Allemands, mieux renseignés et plus entreprenants, s’efforcent ensuite de contourner les Français, qui finissent par se replier sans avoir été renforcés à temps. Il n’y a pas de dislocation, mais une série de combats indécis et meurtriers d’une dizaine d’heures sur plusieurs points qui aboutissent à des reculs sous la pression.
La 3e armée allemande pénètre le 4 août à Wissembourg dans le Bas-Rhin et repousse ainsi l’armée de Mac Mahon, le 6, à Frœschwiller-Wœrth. Mac Mahon conserve encore suffisamment de liberté d’action pour se replier sur Chalons. Il n’en est pas de même plus au nord où les 1re et 2e armées allemandes recherchent le contact avec l’armée Bazaine qui, refusant de se replier sur Chalons, a placé ses corps d’armée en position défensive. Le terrain de ces positions aurait pu être préparé si on avait un peu étudié les combats en Virginie en 1864-1865, mais on se contente de faire confiance à la puissance de feu du Chassepot. Le Chassepot fait effectivement des ravages et les pertes prussiennes sont parfois terribles, comme à Saint-Privat ou un tiers de la Garde prussienne est fauché. Les Français sont aussi les seuls à utiliser des mitrailleuses. Le problème est que les artilleurs qui ont la responsabilité de ces armes n’ont pas eu le temps de se les approprier. Ils les utilisent donc comme des canons, en batterie, à découvert et souvent trop loin de l’ennemi. C’est parfois très meurtrier, mais cela a peu d’influence sur les évènements.
Grâce à leur culture du retour d’expérience les Prussiens s’adaptent. Ils allègent leur dispositif au contact, où on ne combat plus effectivement qu’avec une seule ligne de tirailleurs. Surtout, ils font appel aux canons Krupp en acier, l’équivalent dans l’artillerie des fusils à âme rayée armés par la culasse. L’artillerie prussienne fait des ravages sur les dispositifs statiques français. Après trois combats du 14 au 18 août autour de Metz qui sont autant de poussées, les armées allemandes finissent par bloquer l’armée de Bazaine dans la ville. C’est le premier encerclement d’armée réussie, même s’il n’aboutit pas sur une reddition immédiate.
Pendant ce temps, l’armée de Mac Mahon, rejoint par Napoléon III qui prend le commandement fait mouvement vers Sedan. Le 24 août, apprenant la nouvelle, Moltke fait basculer l’axe des progressions de ses armées de Paris vers Sedan. Le centre de gravité, pour employer un terme clausewitzien, n’est pas la capitale mais l’armée ennemie et son chef, le dernier chef d’État français à conduire une armée sur le champ de bataille. Il suffit de cinq jours pour que les 3e et la nouvelle 4e armée formée en cours d’action avec des éléments des 1re et 2e, soit 250 000 hommes au total, pivotent complètement sur un front de 90 km. Les commandants d’armées et les chefs d’état-major prussiens, tous nourris à la même doctrine, avaient en réalité tous anticipé ce changement de cap.
Le 31 août, huit corps d’armée allemands sont déployés sur 17 km autour d’un adversaire immobile à Sedan coincé dans un triangle de 4 km de côté. Le 2 septembre, Napoléon III et l’armée de Mac Mahon sont obligés de capituler. Il aura donc suffi d’un mois de combat pour écraser l’armée qui était alors considérée comme la plus puissante du monde.
Cela avait suffi en 1866 à vaincre l’empire autrichien qui dès le lendemain du désastre de Sadowa avait demandé à négocier la paix. Ce n’est pas le cas en France, où la capture du Napoléon III est l’occasion d’un changement de régime qui décide de poursuivre la guerre. Le gouvernement de Défense nationale parvient même dans l’improvisation la plus totale et la ferveur patriotique à mobiliser 600 000 hommes et à former trois nouvelles armées. On voit également apparaître des francs-tireurs qui harcèlent l’ennemi. C’est une grande surprise pour les Prussiens qui redoutent le spectre de la guerre révolutionnaire et populaire.
Étonnamment, là où l’armée impériale avait tenu un mois, ces nouvelles armées françaises improvisées résistent cinq fois plus longtemps. Il est vrai que de larges forces allemandes sont fixées autour de Belfort, Metz et de Paris, assiégée depuis le 19 septembre, mais d’autres arrivent. À la fin de l’année 1870, il y a un million de soldats allemands en France, un chiffre qui aurait paru incroyable quelques dizaines d’années plus tôt.
Pour autant, aucune des trois nouvelles armées françaises, du Nord, de l’Est de la Loire, ne subit le sort de celles de Bazaine et de Mac Mahon. La leçon a été apprise et le théâtre des opérations s’étend à presque tout le territoire situé au nord de la Loire et les batailles elles-mêmes, menées par des armées de même volume et recherchant l’enveloppement, se dilatent. La bataille d’anéantissement par encerclement comme à Sadowa ou Sedan devient plus difficile à mener.
On assiste donc plutôt à une succession de batailles indécises au cours desquelles les nouvelles armées françaises, qui imitent les méthodes simplifiées allemandes, sont plus mobiles que les troupes impériales, avec quelques innovations de méthodes comme l’abandon par l’artillerie des fusées à deux durées au profit des obus percutants. Elles sont également — car elles manquent cruellement d’encadrement et de logistique — beaucoup moins solides que les unités impériales et rompent le combat pour des taux de pertes trois fois inférieurs.
La capitulation de Bazaine à Metz fin octobre, soit un mois avant l’épuisement total de ces vivres, constitue le deuxième évènement décisif de la guerre, car il libère de nombreuses forces allemandes. La supériorité ennemie devient écrasante. La place de Paris capitule fin janvier. Le 26 février, les préliminaires de paix sont signés à Versailles. Le traité de paix est signé à Francfort le 18 mai 1871. L’avance prise par les Prussiens dans l’adaptation à la révolution militaire industrielle n’aura jamais pu être rattrapée.
On a même découvert quelque chose de génial: ne pas confier la guerre aux marchands.
RépondreSupprimerhttps://www.lopinion.fr/blog/secret-defense/patrice-huiban-syndrome-second-empire-plane-nos-armees-236770
Mais on l'a oublié apparemment...
https://lavoiedelepee.blogspot.com/2016/12/si-tu-veux-la-paye-ne-prepare-pas-la.html
On peut regarder pourtant notre modèle américain, avec son entreprise fétiche qui pèse 11% du marché mondial de l'armement.
Que se passe-t-il lorsque ça ne se passe pas comme prévu ?
La place des salariés est dans l'avion d'évacuation des ressortissants civils...
https://www.capital.fr/entreprises-marches/le-geant-de-la-defense-lockheed-martin-force-de-se-retirer-dune-base-dirak-a-cause-de-roquettes-140
Laissant les soldats comme deux ronds de flan.
Interesting, isn't it ?
Avec un lien qui marche, c'est mieux...
Supprimerhttps://www.capital.fr/entreprises-marches/le-geant-de-la-defense-lockheed-martin-force-de-se-retirer-dune-base-dirak-a-cause-de-roquettes-1402841
côté prussien, le fusil Dreyse à tir rapide (6 à 8 coups/min chargés par la culasse) a permis d'anéantir en moins de 20 minutes une charge de 1000 cuirassiers, du jaméh vu ! vive la Prusse et les Prussiens !
RépondreSupprimerFusil périmé et très inférieur aux nouvelles armes des années 1860. Les Prussiens vont s'empresser de le remplacer dès 1871.
SupprimerLee chassepot français, malgré ses défauts, restera supérieur au dreyse prussien et fera des ravages lors des combats, notamment à Gravelotte
Supprimer[daniel]
RépondreSupprimerMon Colonel,
Je suis incompétent en la matière. Je réclame donc votre indulgence.
Référence : Lars Wedin (Capitaine de vaisseau CR, Marine suédoise), "Marianne et Athena" La pensée militaire française de 18e siécle à nos jours. Economica Fondation Saint-Cyr-2011. Chapitre 5, la guerre de 1870 etc...
L’auteur met en évidence une des innovations importantes apportées par l’Ecole de Guerre prussienne : l’auftragstatktik. Rien de mystérieux, c’est la bonne vieille méthode de direction par objectif ou par mission.
« Le chef de peloton dirigeait ses soldats avec une liberté relative, conformément aux plans de la hiérarchie.»( page 163)
On peut généraliser cette affirmation concernant le chef de section jusqu’au chef d’armée. Cette technique de commandement donne aux différents chefs le sens de l’initiative. Elle fait appel à l’intelligence du combat.
Elle suppose une bonne information générale et une rigoureuse discipline intellectuelle. (Elle n’est certes pas sans danger. Nous lui devons l’amorce de la victoire de la Marne en 1914. Von Kluck a ignoré les intentions du commandement suprême et a joué «perso».)
A l’opposé, notre armée tablait sur le secret des intentions du chef et sur des ordres supposés détaillés, émasculant ainsi l’initiative des exécutants.
Il ne semble pas que ce défaut a été bien perçu au début de la 1.ére mondiale. Il semble avoir ressuscité en 1940. S’il en est bien ainsi, il est une part non négligeable des raisons qui, s’ajoutant à vos informations, expliquent notre défaite de 1870 et probablement celles des premières semaines de 1914.
En 2021, j’aimerais croire que cette discipline quelque peu imbécile attendue des subordonnés n’est qu’une vieille histoire. Il faut reconnaître que la distance peut être grande entre les intentions et les réalités.
Quand je lis vos fascinants essais sur le rapport entre énergie, information et décision (ma lecture partielle), je me dit qu'il y a là matière à modélisation mathématique. Avez-vous vu de telles modèles ? Bien cordialement.
RépondreSupprimerJ'avoue ne pas avoir bien compris votre question.
SupprimerJe vous envoi un DM sur Twitter.
SupprimerLa date 1870 est fascinante. Elle correspond à une accélération de la croissance économique occidentale et à la transformation de la société industrielle. Votre point sur la perte de contrôle tactique direct et la nécessité de décentralisation du commandement aurait-elle put impacter l'organisation sociale de manière profonde? La défaite de 1870 conduit à une révolution politique sous la 3eme république, avec un degré de décentralisation de la représentation jamais atteint auparavant. L'éducation primaire universelle réponds au besoin des citoyens alphabétisés, autant pour servir l'économie, que l'administration publique nationale et coloniale, que l'armée.
RépondreSupprimerOui, il y a un lien bien sûr entre l'organisation militaire et l'organisation sociale. Pour ne donner qu'un seul exemple que j'explique dans "L'invention de la guerre moderne", le dilemme que je décris entre décentralisation et contrôle de la troupe trouve sa résolution en 1916 quand on change de regard sur les jeunes sous-officiers qui de sergents "serre-rangs" se voient confier la responsabilité du commandement d'une demi-section ou "groupe de combat" (cela n'a pas changé depuis). Cela n'est possible aussi que grâce à un niveau d'éducation général qui a beaucoup augmenté.
SupprimerAvec la logique bientôt poussée à bout de l'externalisation des soutiens on y revient:
RépondreSupprimerhttps://philippesilberzahn.com/2021/04/05/j-ai-ouvert-un-ticket-comment-le-management-formel-tue-les-organisations/
https://philippesilberzahn.com/2019/10/07/cest-logique-mais-ca-ne-marche-pas-peril-de-lorientation-client/
Pas certain que cette fois-ci, la France survive à la défaite.
Texte magnifique, lumineux. Rien de tel que de partir de l’équipement et de la situation tactique qu’il suscite.
RépondreSupprimerUn détail : la France n’a pas affronté le « Deutscher Bund » (Confédération germanique, ou Confédération allemande), dissous en 1866, mais une coalition allemande. Celle-ci réunissait la Confédération de l’Allemagne du Nord, deux royaumes (Wurtemberg et Bavière), et deux grands-duchés (Bade et Hesse (plus exactement grand-duché de Hesse-et-du-Rhin)).
Passionnant, comme d'habitude !
RépondreSupprimerCette difficulté à s'adapter en temps de paix semble un pattern de notre histoire militaire (1870, 1914, 1940). Et paradoxalement, lors des crises graves, des ressources insoupçonnées et une capacité à innover se révèlent, de nouveaux leaders apparaissent, la volonté défaillante se transforme en volonté ardente et irrésistible... Paradoxe français ?
Un texte très intéressant comme toujours!
RépondreSupprimerLe tournant de 1870 (et dans l'ombre celui de la guerre de secession) est essentiel dans le passage à ce que l'on a coutûme d'appeler la "guerre moderne".
Ce que vous dites de l'efficacité des armées levées par la nouvelle république mériterait je pense d'être développé pour rappeler aussi l'importance ultime du politique dans la décision de terminer la guerre.
Il serait passionnant d'ajouter à votre étude un second volet pour essayer de comprendre comment avec un outil militaire renforcé et complété, des capacités opérationnelles supérieures, l'Allemagne se trouve enfermée dans une impasse stratégique en 1914, voir en 1939.
En 2021, l'évolution récente et toujours actuelle de l'armée française est copié sur celui installé outre-Rhin: le militaire, VRP des industriels de l'armement.
RépondreSupprimerhttps://youtu.be/cs0hkt6XrLg
https://youtube.com/playlist?list=PLVAXTQzIWxNdgVHAgdZhhCW31qCrI9HyZ
RépondreSupprimerTrès instructif, et très clair, comme toujours. Pour ce qu'il en est des armées non-formées françaises qui ont tenu 5 fois plus que celles impériales de Napoléon III, on peut imaginer ce type d'explication? La désorganisation des troupes non-formés a offert l'avantage de l'imprévisibilité, (facteur qui a été à la base d'une grande partie des succès des groupes d'éclat partisans pendant la IIème guerre mondiale - au moins en Italie). Par ailleurs, même si de manière totalement involontaire, la désagrégation rapide des troupes, due au manque de coordination et d'entrainement a probablement contribué à ralentir l'étouffement, qui était devenu le nouveau enjeux dans le conflit que vous décrivez.
RépondreSupprimerL'idée de base étant qu'on vient plus facilement à bout d'une armée organisée de manière semblable à la sienne juste un peu moins performante, que d'une armée décidément moins puissante dont on ne comprends pas le fonctionnement et dont les réactions et les actions ne sont pas reconductibles aux schémas habituels.
Les batailles de juillet-août sont assez serrées mais les prussiens ont 2 avantages: un commandement plus offensif et plus manœuvrier, et surtout une artillerie de campagne qui fait souvent la différence
RépondreSupprimerBonjour,
RépondreSupprimerEn se qui concerne la chaine de commandement et notamment la décentralisation des décisions il serait intéressant de comparer le commandement terrestre et maritime.
D après mes minces connaissances se sont les ordres de Nelson qui décrivent la philosophie de la tactique en laissant l intiative aux commandants de navire qui sont a l origine de la défaite de trafalgar
En fait, on est en train de refaire la compagnie des Indes, mais avec l'air de ne pas y toucher...
RépondreSupprimerhttp://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2021/08/23/quand-les-armees-externalisent-le-controle-des-externalisati-22368.html