samedi 15 février 2014

Tuer n'est pas toujours gagner-par Marc Antoine Brillant

« Ce soir, je suis en mesure d’annoncer aux Américains et au monde que les Etats-Unis ont mené une opération qui a tué Oussama Ben Laden […]. Justice a été rendue ».
Extraits du discours du Président Barack Obama annonçant la mort d’Oussama Ben Laden.

Que l’on évoque la préservation de la sécurité nationale ou bien encore la nécessité de punir les auteurs d’attentats, rares sont les chefs d’Etat à accepter de reconnaître un assassinat commandité. En effet, revendiquer c’est s’exposer et surtout risquer d’éventuelles représailles. A l’heure où le débat fait rage aux Etats-Unis sur la légalité ou non de l’emploi des drones pour éliminer physiquement les ennemis de la plus ancienne démocratie du monde, une question n’est que très rarement posée. Celle de l’efficacité réelle de ces assassinats. L’élimination pure et simple des personnages clés de mouvements terroristes ou criminels permet-elle de stopper la menace ou tout du moins de l’endiguer ?

Rien n’est moins sûr…car tout dépend de la nature de la menace.

Petit « benchmarking » des expériences dans ce domaine…

Le SDECE contre le FLN

L’excellent ouvrage de Constantin Melnik, La mort était leur mission. Le Service Action pendant la guerre d’Algérie (Plon, 1995) lève le voile sur une partie assez méconnue de cette guerre de décolonisation : les opérations homo pour homicides.

En effet, entre 1959 et 1962, le bras armé du SDECE (ancêtre de la DGSE) a été engagé dans une série d’opérations de neutralisation de militants du Front de Libération Nationale algérien. Leurs principales cibles étaient majoritairement issues des réseaux de soutien du FLN, comme des trafiquants d’armes, des responsables de cellules et des relais d’opinion.

Ainsi, selon celui qui fut le conseiller technique de Michel Debré pour les questions de sécurité et de renseignement, 135 personnes furent assassinées en 1960 par les hommes du Service Action. A titre de comparaison, les frappes de drones américains auraient provoqué la mort de 3.500 personnes depuis 2004 (soit 350 par an en moyenne), avec un pic à 815 tués en 2010 au Waziristan.

Trois conditions devaient être réunies pour qu’un « candidat » soit inscrit sur la liste des hommes à abattre de l’Etat français. Tout d’abord, l’intéressé devait constituer une menace réelle, sérieuse et imminente. Puis, celui-ci ne devait pas résider sur le sol français. Enfin, il était impératif que« l’heureux élu » ne possède pas la nationalité française.

Mettant à mal l’approvisionnement en armes des groupes du FLN et perturbant leur coordination, ces assassinats eurent des résultats opérationnels concrets. De plus, ils créèrent un effet psychologique intéressant dans la mesure où les chefs se mirent à se méfier les uns des autres dans une sorte de paranoïa qui se conclut parfois par des règlements de compte internes. Mais ce procédé trouva ses limites. Parce qu’employé de façon intensive et même extensive (rappelons que la Tunisie, la Suisse ou encore l’Italie furent le théâtre de certaines éliminations), il fut rapidement dénoncé tant par les médias que par certains politiques. Il ne fut jamais officiellement remis en œuvre après 1962…

L’assassinat est efficace si et seulement si son champ d’application est à la fois spécialisé et restreint. Spécialisé car il doit avant tout viser les réseaux de soutien indispensables aux groupes visés. Restreint car il doit être la solution ultime et non pas l’unique solution.

Special Air Service contre IRA

Face à la recrudescence des attentats en Irlande du Nord et en Angleterre, le régiment mythique des forces spéciales britanniques (le 22ème Régiment SAS) fut déployé de façon régulière en Ulster dans le courant des années 70. Opérant en civil, ses équipes se retrouvèrent confrontées à des situations inédites pour des militaires, même spéciaux. Réalisant des missions de surveillance, de filatures, et d’arrestations, elles furent aussi engagées dans des actions d’éliminations physiques prenant la forme d’embuscades. En effet, afin de légitimer l’ouverture du feu, les soldats du SAS attendaient le flagrant délit caractérisé  pour se dévoiler et par conséquent riposter, les activistes de l’IRA ne se rendant quasiment jamais. Les résultats de leurs opérations furent aussi sanglants que ceux des activistes irlandais. Comble de l’ironie, le SAS fut rebaptisé Special Assassination Service par les terroristes eux-mêmes. Les militaires britanniques avaient ainsi réussi le tour de force de « terroriser les terroristes ».

Cependant, certaines actions se trompèrent de cibles. Montées dans la précipitation avec une prise de risque mal calculée, elles devinrent très clairement des expéditions punitives, voire même parfois des bavures. Ce qui est du plus mauvais effet tant sur la légitimité vis-à-vis des opinions publiques que sur l’efficacité opérationnelle.

Face à une organisation de type paramilitaire, dont les structures peuvent être identifiées et les motivations entendues avant tout comme politiques (en l’occurrence indépendantistes), l’assassinat peut apporter des résultats probants. Toutefois, lorsque les deux ennemis se ressemblent, le plus grand danger est de faire passer le « méchant » pour la victime. L’effet psychologique se retourne alors contre le soi-disant « gentil »…

Kidon contre terroristes palestiniens

Les dirigeants israéliens n’ont jamais éprouvé de difficultés à autoriser les assassinats. Luttant pour sa survie dans une région hostile à l’existence d’un Etat juif, Israël a toujours considéré qu’il fallait assommer ses ennemis en ripostant de façon disproportionnée.

Pour effectuer les actions les plus sensibles, le Mossad dispose d’une unité baptisée Kidon (la baïonnette en hébreu) et chargée principalement des opérations homo. Les plus célèbres d’entre elles ont été la conséquence directe de l’attaque terroriste du groupe palestinien  Septembre noir lors des Jeux olympiques de Munich en 1972. Le film Munich de Steven Spielberg raconte l’histoire de cette vengeance. Baptisées « colère de Dieu », les représailles israéliennes s’étalèrent sur 20 ans et virent l’élimination de 13 activistes palestiniens ayant eu un lien avec Septembre noir (4 furent tués à Paris. 4 à Beyrouth. 1 à Rome. 1 à Chypre. 1 à Athènes. 2 à Tunis). Ces assassinats peuvent être interprétés comme une loi du Talion contemporaine. Elles rendent une justice immédiate sans soulager les consciences. Elles ont surtout initié un cycle de violences en retour, visant à la fois la population israélienne et certains responsables politiques.

Assassiner pour « laver un affront » risque bien souvent de ne pas rester lettre morte, sans faire de jeu de mots. Pour qu’il demeure efficace et cause un réel préjudice à l’adversaire, l’assassinat doit avoir un objectif opérationnel concret. Tuer pour venger ne donnera que vengeance parce que l’on a tué.

Les GAL contre l’ETA

Se heurtant à l’absence de volonté des responsables politiques français quant à traquer les terroristes de l’ETA sur le sol tricolore, certains hauts fonctionnaires du ministère de l’Intérieur espagnol décidèrent de créer secrètement des cellules de riposte armée, les Groupes Antiterroristes de Libération (GAL). Composés de membres des services secrets (le CESID) et de la Guardia civil, les GAL firent aussi appel au grand banditisme. Le but premier était d'éliminer des activistes de l’ETA vivant dans leur zone refuge du Pays basque français, avec pour objectif final la création d’un sentiment d'insécurité qui inciterait la France à mener enfin une véritable lutte contre les terroristes basques. Entre 1983 et 1987, les GAL commirent une quarantaine d’attentats, dont 23 assassinats, principalement à Bayonne, Hendaye et Ciboure.

Avec la cohabitation en France et l’arrivée de Charles Pasqua au ministère de l’Intérieur, une politique de coopération avec le gouvernement espagnol se mit en place. Davantage répressive, elle signifia la fin du sanctuaire de l’ETA sur le territoire français et aussi l’arrêt des assassinats perpétrés par les GAL. L’impact de leurs actions sur les activités de l’ETA resta assez faible. Aucun des assassinats n’a empêché les attaques. Bien au contraire. Entre 1983 et 1987, le groupe séparatiste basque a tué 61 personnes dans 4 attentats à la voiture piégée.

L’ère des drones tueurs

Avec la guerre en Afghanistan et l’avènement de la mondialisation du terrorisme, les groupes affiliés à Al Qaïda et au mouvement des Talibans trouvèrent refuge dans les zones tribales à la frontière afghano-pakistanaise. Tactiquement inaccessibles pour des combattants au sol. Diplomatiquement risqués d’y envoyer des avions ou des hélicoptères de combat.

La stratégie de contre-insurrection des Américains se heurtait donc à un véritable écueil : comment combattre un ennemi déjà fuyant, qui se cache de surcroît dans un sanctuaire hors du champ de bataille, c’est-à-dire hors d’Afghanistan ?

Jamais en manque d’idées, la CIA pensa trouver la parade en armant ses drones prévus initialement pour des missions de renseignement. Endurant, discret, et létal, le drone présente beaucoup d’avantages dans la guerre contres des insurgés retranchés.

Tout d’abord, il n’y a pas de risque physique puisque pas de soldats au sol. L’opérateur de drones peut se trouver à plusieurs milliers de kilomètres de distance. Ensuite, l’engin peut durer longtemps en vol et ainsi surveiller une cache de façon quasi-permanente.  Enfin, tuer est aussi facile que d’appuyer sur un bouton. Sans parler du flou juridique qui règne quant à l’emploi de ces appareils pour des missions armées.

Toutefois, les dirigeants peuvent vite accepter une utilisation quasi industrielle de cette « machine à tuer ». Le chiffre des morts peut en témoigner. En fait, le drone devient la fin et non plus le moyen. Il n’est alors plus utilisé pour supprimer un leader mais pour tirer sur tout ce qui peut représenter une menace. Sans certitude quant à cette dernière puisque personne n’est au sol pour en confirmer la réalité.

Quelles pistes de réflexion…

Le premier constat est sans appel : aucune des expériences décrites ci-dessus n’a permis de mettre un terme aux attentats terroristes. La réalisation de ceux-ci a certes pu être gênée de façon ponctuelle, mais rarement empêchée.

Le deuxième constat est tout aussi lapidaire : plus l’assassinat sort de son caractère exceptionnel pour devenir récurrent, moins il apporte de résultats tangibles sur le long terme pour aboutir à la fin des combats. En effet, la mise en place d’une logique de réciprocité mortelle débouche bien souvent sur la perte de légitimité de l’auteur étatique censé respecter le droit, et donc par ricochet sur la possible victimisation des « cibles ». Cela est surtout vrai lorsqu’il existe des points communs culturels entre les deux belligérants. Rappelons que lorsqu’un Etat est amené à donner l’ordre de tuer, il est impératif que cela garantisse la réalisation d’un objectif déterminant. L’élimination de Ben Laden en est un bon exemple.

Le troisième constat est lié à la nature même de la cible. Lorsque l’on affronte des mouvements terroristes à motivation politique ou indépendantiste (ETA ou IRA), l’assassinat ciblé peut être une solution. En effet, ce type d’ennemi (souvent culturellement proche) ne refusera pas le dialogue surtout s’il est acculé. Sa raison est ancrée dans le réel et il croit dans les lois faites par les hommes.

A l’inverse, face à des groupes radicaux à motivation religieuse (AQMI, MUJAO, EIIL), l’assassinat ne fera que renforcer l’extrémisme sauf à détruire l’ensemble de leurs leaders en une seule frappe…Et encore, il se trouvera toujours un remplaçant prêt à accepter le sacrifice de sa propre vie, pour devenir martyr. Cet ennemi ne fait confiance qu’aux lois de Dieu, même si celles-ci sont largement interprétées. Lui faire entendre raison est donc impossible.

Le dernier constat enfin relève de la morale politique. Une démocratie peut-elle s’autoriser à employer les mêmes méthodes que les groupes terroristes ? Prendre la décision d’assassiner un ennemi n’est jamais anodin. Cela est même souvent lourd de conséquences en cas d’échec, de compromission ou tout simplement de révélation publique. Le seul critère qui autorise une telle décision, c’est l’acceptation de l’acte par sa propre opinion publique. Il faut donc la préparer à accepter l’inacceptable.

En conclusion, la meilleure façon de neutraliser une organisation terroriste ou criminelle n’est pas forcément dans l’assassinat systématique de leurs dirigeants.

Certes la mort brutale du leader charismatique peut ébranler l’édifice en initiant une compétition interne pour l’accession à la place du chef. En quelque sorte éliminer pour diviser. Toutefois, c’est surtout la disparition des réseaux de soutien qui perturbe vraiment les activités terroristes. Il convient donc de marginaliser ces groupes en supprimant les moyens de financement, l’approvisionnement en armes et les réseaux de diffusion de leur idéologie. Car c’est bien sur ce dernier point que doit porter la riposte de l’Etat. C’est-à-dire casser l’idéologie qui nourrit les esprits faibles et recrute les déshérités. S’attaquer aux idées est certainement le plus difficile des combats car il requiert de l’intelligence et une parfaire connaissance des réseaux de diffusion. Mais, c’est le seul moyen de remporter une victoire durable en marginalisant ceux qui travestissent la réalité. 

20 commentaires:

  1. La travestissent-ils toujours, la réalité ? Une telle affirmation me paraît bien arrogante... Comme si "nous" ne la travestissions jamais ! Avec un tel état d'esprit, une telle vision du monde, on peut être absolument certains de perdre !!!!!

    Je me permettrai d'ajouter que je trouve extrêmement malsain que des militaires soient aussi focalisés de façon obsessionnelle sur ces questions de contre-insurrection. L'armée, c'est fait pour faire la guerre contre d'autres armées, défendre une nation, un peuple, un pays, un Etat, contre d'autres, ou bien pour affirmer une politique de puissance. Les armées qui ne pensent qu'à faire la guerre à des populations, à jouer aux flics sont généralement des armées lamentables, l'histoire l'a prouvé à de multiples reprises : armée française entre 1815 et 1870, qui ne fait pas grand chose d'autre que de massacrer de l'ouvrier parisien ou du montagnard kabyle mais qui se fait bâcher par les Prussiens, armée argentine "découvrant" la vraie guerre aux Malouines face aux Brits (alors que c'était tellement plus facile de torturer de la petite militante gauchiste bien conne), etc.

    Laurent Henninger

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    1. " Les armées qui ne pensent qu'à faire la guerre à des populations, à jouer aux flics sont généralement des armées lamentables".
      Je suis d'accord, à la nuance près que les armées ne sont que les exécutants d'une politique menée par des dirigeants rarement enclins à voir plus loin que le bout de leur mandat électoral.

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    2. "armée française entre 1815 et 1870, qui ne fait pas grand chose d'autre que de massacrer de l'ouvrier parisien ou du montagnard kabyle mais qui se fait bâcher par les Prussiens, armée argentine "découvrant" la vraie guerre aux Malouines face aux Brits"

      1870 ne fut pas une promenade de santé pour les Allemands mais quand on aligne une armée dont une de ses forces est un plan de concentration bien mieux organisé que celui de l'armée française, les Allemands ont pu obtenir la supériorité en effectifs avant que l'armée française puisse finir sa propre concentration. Par ailleurs le haut commandement allemand était de meilleure qualité. Enfin, Bismarck a tout fait pour obtenir cette guerre et il a été aidé par des hommes politiques français très va t'en guerre.
      Vous oubliez aussi que l'armée française sort usée de la campagne du Mexique et que Napoléon 3, conscient de cette faiblesse a entamé une réforme de l'armée en 1868 avec l'aide du maréchal Niel, réforme qui n'aboutira pas en raison de la guerre de 1870.

      Quand à l'armée argentine, je doute que les Britanniques avaient pu la considérer comme une armée de seconde zone.......... Il suffit de demander aux vétérans de Goose Green ce qu'ils ont pensé des appelés argentins et de leurs cadres........ Et je ne parle pas des pilotes argentins prenant des risques pour attaquer la flotte britannique.

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  2. Beaucoup de remarques de bon sens dans cette analyse qui n'a pas la prétention à l'exhaustivité, mais qui me semble tout de même discutable sur quelques points. "l’idéologie qui nourrit les esprits faibles et recrute les déshérités" : je ne suis pas certain que ce soit toujours le cas, si on prend comme exemple les auteurs des attentats du 11 septembre ou ceux de Londres : comme déshérités on trouve mieux. Autre aspect, la réaction des populations victimes de ces attentats : il 'y a rien de plus dangereux à terme que de donner l'impression que justice ne sera pas rendue, soit parce qu'on est incapable de le faire, soit parce qu'on a pas le courage. Que l'on ne s'étonne pas ensuite de la montée de mouvements ou de partis extrêmes et de la politique qu'ils préconisent. L'Europe en sait quelque chose et j'ai comme l'impression qu'ils ont encore une belle marge de progression.

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  3. Si la contre-insurrection est au même titre que la stratégie, une lutte pour imposer sa volonté à l’adversaire, il existe toutefois une différence notable que votre article met bien en exergue. Un rapport de force favorable, même disproportionné, même utilisé sur le temps long, ne permet pas d’imposer sa réalité à un ‘autre’ qui est culturellement trop éloigné de notre système de valeurs. L’exemple décrivant le mieux cette situation où il est impossible de trouver une solution politique, est sans doute celui des israéliens qui s’estiment condamnés à ‘tondre la pelouse régulièrement’. Il en va de même pour les frappes des drones US au Waziristân. Dans les deux cas, on en vient à une sorte de redite de la politique de containement à l’échelle régionale : je ne peux te soumettre, je ne peux éradiquer la menace que tu représentes, je me contente donc de te frapper régulièrement. Une stratégie au jour-le-jour, qui est en fait une non-stratégie…
    Et j’ai bien peur que la France se retrouve dans ce même cas de figure au ‘sahelistan’. Avec toutes les conséquences que cela implique, tant sur la scène politique intérieure, que sur la résilience de nos forces dont la tension opérationnelle risque encore de s’accroître.

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  4. Il est evident que l assassinat plus ou moins ciblé ne peut amener la Victoire à lui seul. Comme cela a été dit l affrontement qui oppose occidentaux et djihadistes ou israéliens et palestiniens n a pas de réponse militaire. Mais dans l attente de possibilités d évolutions politiques, sociétales ou autres, il s agit bien de neutraliser, au sens militaire, la menace. Et il faut bien reconnaître que l assassinat est alors un outil particulièrement efficace, contraignant notamment les responsables à consacrer une grande part de leur énergie à échapper à une menace omniprésente et à restructurer sans cesse leurs réseaux. En revanche ces attaques posent à mon avis deux problèmes majeurs en termes militaires. D une part comme cela a été dit en posant la problématique de leur légitimité et de la confusion entre gentils et méchants. Mais aussi d autre part en ne permettant pas d exploiter les cibles (documents, suivi, ecoutes...) qui pourraient l être au profit d une élimination rapide.

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  5. En Fait l’assassinat ciblé doit être considéré comme une action dans la liste des possibilités stratégiques d’un état en guerre ! Quant à la démocratie pour vivre avec cela, elle doit simplement en afficher les règles ! La loi : Analyse de la menace avérée, analyse de la cible et des effets collatéraux, analyse des conséquences matérielles et immatérielles ; et pif paf si la grille d’analyse passe au rouge. Vous pouvez rajouter à votre grille des pondérations, fondamentaliste + 1 ou – 1 il faudra argumenter.
    Dans la liste des armes stratégiques, contre l’intégrisme et l’obscurantisme, vous trouvez aussi : l’humour, la culture, l’égalité des droits, la liberté individuelle, l’affirmation de valeurs, le sens de l’honneur, la modestie, l’accueil, la fraternité et un gros bâton etc.…..

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  6. Jean-Claude Carré17 février 2014 à 22:39

    Le commentaire de Laurent Henninger me déçoit, j'attendais mieux de sa part : "...armée française entre 1815 et 1870, qui ne fait pas grand chose d'autre que de massacrer de l'ouvrier parisien ou du montagnard kabyle mais qui se fait bâcher par les Prussiens..."
    Et les guerres de Crimée, d'Italie et du Mexique, des manoeuvres grandeur nature peut-être ?
    Et les expéditions de Morée (1821) et d'Espagne (1823) ainsi que la conquête de l'Algérie, des parties de plaisir sans doute ?

    Quant à l'armée argentine, notamment en ce qui concerne les plus professionnels d'entre-eux, les pilotes ci-joint un extrait d'une lettre qu'adressa Pierre Clostermann aux survivants de la campagne des Malouines :

    "...Jamais dans l'histoire des guerres depuis 1914, les aviateurs ont dû
    faire face à une combinaison aussi terrifiante d'obstacles mortels, même
    pas ceux de la RAF sur Londres en 1940 ou ceux de la Luftwaffe en 1945.
    Non seulement votre courage a ébloui le peuple argentin, mais nous
    sommes nombreux dans le monde à être fiers que vous soyez nos frères
    pilotes.
    Aux pères et aux mères, aux frères et aux sœurs, aux épouses et aux
    enfants des pilotes argentins qui allèrent à la mort avec le courage le
    plus fantastique et le plus stupéfiant, je leur dis qu'ils honorent
    l'Argentine et le monde Latin...." Lapidaire !

    Ressaisissez-vous Laurent Henninger, vous valez-mieux que ce commentaire à l'emporte-pièce et sans recul historique indigne de penseur que vous êtes.

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    1. Que critique Laurent Henninger dans la position de Marc Antoine Brillant?

      Son "arrogance".

      M. Brillant dit trois choses:

      - Il faut "casser l’idéologie qui nourrit les esprits faibles et recrute les déshérités": ce disant, il pose clairement que ceux qu'ils placent en face de lui en tant qu'adversaires sont des esprits faibles et des déshérités, dernier mot intéressant puisqu'on peut le prendre par exemple d'un point de vue culturel (des gens privés d'héritage au sens de lien avec leur histoire) ou d'un point de vue économique (des gens non-rentiers, ou ne disposant d'aucune accumulation de capital provenant de leur lignée).

      On perçoit tout de suite le jugement de classe en tant que stéréotype. C'est à dire que dans une phrase pareille, le locuteur émet une référence du bien social, être un esprit fort et avoir un héritage, qui est souvent l'image de lui-même, ou d'un idéal social véhiculé par sa propre culture, comme dans la pub "nous n'avons pas les mêmes valeurs".

      Le truc qui met la distance, quoi.

      - "S’attaquer aux idées est certainement le plus difficile des combats car il requiert de l’intelligence et une parfaire connaissance des réseaux de diffusion.": non seulement cela, c'est certain, mais en plus ce combat exige de comprendre son adversaire, sa mentalité, donc de l'intégrer en soi-même.

      Or, M. Brillant plaque sur cet adversaire une étiquette "esprit faibles et déshérités" stéréotypée qui montre bien qu'il n'est pas dans l'empathie ni dans un autre procédé mental qui permettrait l'activation des neurones miroirs, mais dans une pensée où l'adversaire qu'il évoque prend la figure de la potiche: on la pose sur la cheminée et on évalue sa fonction décorative.

      De là, il se met dans une posture qui le conduit à imputer à l'autre un tort philosophique:

      - "Mais, c’est le seul moyen de remporter une victoire durable en marginalisant ceux qui travestissent la réalité": le tort de "travestir la réalité".

      Il est intellectuellement risqué de prétendre que l'adversaire a le tort de manipuler les consciences, parce qu'à ce tarif on ne vaut pas forcément mieux que lui et, si ça se trouve il vaut mieux que nous.

      Souvenons-nous de Collin Powell agitant ses preuves à l'ONU. Dans le travestissement de la réalité, c'est pas mal.

      Souvenons-nous du nuage de Tchernobyl, censé s'arrêter à la frontière. Eh ben non, il a grillé le feu rouge et il est passé quand même.

      Souvenons-nous simplement que nous sommes les inventeurs de la société du spectacle et qu'on en connait un bout sur le travestissement de la réalité, puisqu'on vit dedans sans même nous en rendre compte.


      M. Henninger est peut être abrupt, mais il me semble qu'il vise juste: il y a une certaine arrogance tranquille dans le propos de M. Brillant qui mérite réflexion.

      Le problème est délicat; quand on pense son adversaire, il reste toujours à savoir s'il aura la gentillesse de faire ce qu'on attend de lui: penser comme nous. Et on est souvent horriblement déçu.

      C'est casse-gueule, quoi.

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  7. Prendre une citation de Pierre Clostermann n'est pas des plus judicieux. Cet aviateur F.A.F.L a eu le mérite de continuer le combat avec de Gaulle et de s'en sortir vivant..., il est devenu célèbre en 1945. Dans les années Cinquante, son parcours politique et quelque peu affairiste -qui pourrait s'apparenter aujourd'hui à un conflit d'intérêt -, a un peu terni les palmes de sa croix de guerre. Son appui au pouvoir argentin (au travers de sa poignée de pilotes) peut être considéré comme une lubie de vieillard.

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    1. Jean-Claude Carré18 février 2014 à 11:48

      Vous avez raison, Pierre Clostermann (Compagnon de la Libération, S.V.P.) était un "affairiste" et sa crédibilité en tant que pilote de guerre ne lui donne guère le droit d'exprimer son admiration pour ses homologues d'Amérique du sud.
      De plus, les pilotes argentins ne se sont pas bien battus lors de la guerre des Malouines tant ils étaient trop occupés à torturer les opposants politiques entre deux raids...

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    2. 60 avions argentins détruits au combat lors de la guerre des Malouines, plusieurs navires de sa très gracieuse majesté endommagé et pour certains envoyés par le fond)
      En matière de guerre navale, avec les systèmes d'armes de l'épqoue, il était franchement dangereux d'attaquer une flotte.

      Les marins britanniques ont connu les qualités de ses pilotes, les survivants des HMS Ardent, HMS Coventry et HMS Sheffiled pourront en témoigner.
      Vous devriez réviser vos propos sur ces pilotes, sinon embarquez sur un navire de guerre et plongez vous dans un exercice de défense aérienne, vous réviserez à ce moment là vos propos.

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  8. Oui enfin, si Pierre Clostermann a fait preuve d'un courage et d'une abnegation extraordinaire durant la seconde guerre mondiale, il n'etait pas non plus une caution, d'autant plus qu'il avait ses têtes.

    Ses lubies concernant le supposé "monde latin" en sont un bon exemple. Par ailleurs, il suffit de voir les images prises depuis les navires britaniques lors des attaques des monomoteurs argentins pour être convaincu du courage extrême de ces pilotes.

    Mais le commentaire de Clostermann aurait été plus crédibe s'il avait été moins outrancier : au viet nam, c'etaient des pilotes américains qui volaient à 600 km/h à 50m au dessus de la jungle en monomoteur et la dca viet était incomparablement supérieure à tout ce que la flotte britanique pouvait aligner aux malouines.

    Mais comme les américains n'étaient pas sa tasse de thé ...

    Alors bon, les "obstacles mortels" inconnus "dans l'histoire des guerres" et les références au "monde latin", ça fait vraiment beaucoup pour être autre chose qu'une lubie de vieillard. Evitons d'interpreter le comportement des individus relativement aux choix faits 40 ans avant, quelques honorables qu'ils aient été.

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    1. Un point sur lequel à mon souvenir "Le Grand Cirque" reste muet, comme sont muets les articles "Clostermann" de wikipedia dans toutes les langues que j'ai consultés,, c'est ce qui a fait que Pierre Clostermann a rejoint Londres en Mars 42 et pas avant.
      Certes, rien ne sert de courir, il faut partir à point, et Pierre Clostermann fut mûr pour le sacrifice en Mars 42. Cependant, j'eusse aimé quelques lignes sur le sujet plutôt que ce silence...

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    2. Sur Pierre Clostermann, un point qui montre combien les auteurs de wikipedia se soucient peu des articles écrits dans une autre langue : en français, son père est dit être d'origine alsacienne et lorraine, en anglais sa famille est dite d'ascendance allemande, en allemand elle est dite d'ascendance alsacienne.
      En portugais, il rejoint l'Angleterre en 1940 et entre au combat en 1942, alors que dans les autres langues c'est respectivement en Mars 42 et en Janvier 43.

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    3. Une question connexe que je me suis posée : quand deux pays A et B sont alliés dans une guerre et que B a recours à la mobilisation et non au volontariat, un ressortissant de B mobilisable établi en A peut-il continuer à y séjourner sans être livré par A aux autorités de B ?
      Exemples : un Italien établi en France en 1915, mobilisable en Italie mais ne rejoignant pas l'Italie, la France le livrait-elle aux autorités italiennes ?
      Un Français établi au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis, y a-t-il eu un moment où les Britanniques ou les Etatsuniens l'ont remis aux autorités françaises (France Libre, ou, plus tard, libérée) ?

      Et une autre question (je m'éloigne encore du sujet, si faire se peut...) : je me rappelle avoir lu dans la biographie de Gabriel de Sairigné écrite par sa fille que celui-ci, combattant dans le Nord de l'Afrique, correspondait avec son père resté en métropole. Le courrier fonctionnait donc entre la France et un territoire en guerre avec l'Allemagne ?

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    4. La période pendant laquelle le grand cirque a été édité était caractérisée par un manque de papier, ce qui a amené Clorstermann a limiter son ouvrage.

      Il a non seulement effectué un choix dans les textes de son journal de guerre mais aussi peu abordé la période précedant son engagement dans les FAFL.

      Une nouvelle edition, le grand cirque 2000 est parue il y a une quinzaine d'années qui comporte non seulement les parties manquantes de son journal de guerre mais aussi des corrections, des commentaires et des élements supplémentaires comme la vie en angleterre ou son amitié avec J. Remlinger.

      En gros, il etait etudiant au etats unis et il a rejoint De Gaule en passant par le Brésil.

      Arrivé après la période ou l'Angleterre avait un besoin vital de pilotes de chasse, il a pu suivre un cursus "normal" de deux ans je crois.

      Il ne détail pas cette période, c'est surtout une succession d'anecdotes.

      Je vous conseille cette nouvelle édition, elle est remarquable tant par la qualité littéraire que par la valeur humaine, technique et historique de son témoignage.

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    5. Merci du conseil, je vais la lire.

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  9. Ne confondons pas armées et services spéciaux.Les auteurs d'attentats et d'assassinats ne sont pas porteurs d'uniformes et au contraire recherchent la couleur de muraille le plus souvent.
    A mon sens, l'opération homo vise beaucoup plus que la cible atteinte.Par sa préparation qui exige renseignements,repérages,logistiques d'approche et de fuite elle sensibilise l'organisation adverse sur sa sécurité et l'oblige à prendre des contre-mesures qui sans atteindre la paranoïa obligatoirement provoque néanmoins un amoindrissement opérationnel.Ben Laden en est un bel exemple :sa clandestinité fut longue grâce à ses mesures de discrétion mais celles-ci réduisirent considérablement son influence sur ses troupes.''Tuer pour venger'' serait la doctrine israêlienne.Il est vrai que le Mossad l'affirme mais cette proclamation a aussi un effet dissuasif.Le dernier des terroristes palestiniens de Munich a survécu 20 ans mais quelle vie et pour lui et pour son organisation qui n'en peut mais.Loi du talion proclamée mais surtout Epée de Damoclès .

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  10. L'assassinat a aussi comme effet de liquider des gens qui, même s'ils sont ennemis, ont plus de mérites que ceux qui vont les remplacer.
    Cas des cadres du FLN assassinés alors qu'ils auraient fait mieux que la clique qui est venue après eux.

    Mais je crois que c'est Ralph Peters qui disait qu'en attendant de trouver une solution politique au terrorisme islamique, la seule chose à faire était de mener une guerre d'attrition.

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