Ainsi donc, ce ne seront pas 33 600 postes
qui seront supprimés au ministère de la défense au cours de la période 2014-2019
mais « seulement » 14 900, en grande partie pour pouvoir armer
les 7 000 soldats qui seront désormais en permanence dans les rues de la France
métropolitaine.
Cette inflexion ne se serait pas produite si
trois djihadistes n’avaient décidé de tuer d’autres Français au mois de
janvier. Cela amène à rappeler deux évidences :
Si ces attaques ont constitué une surprise, il
faut s’interroger sur notre intelligence ( à tous les sens du terme) de l’ennemi,
celui-là même qui avait organisé des attentats à Paris en 1995, provoqué la
mise en place du plan Vigipirate (tiens, c’est vrai pourquoi y-avait-il déjà
des militaires dans les rues ?), enlevé ou tué un certain nombre de
nos ressortissants en particulier en Afrique, qui constituait la raison de
notre présence en Afghanistan et que nous combattions directement et avec force
au Sahel depuis deux ans. Que cet ennemi djihadiste, quel qu’en soit la
mouvance, cherche à nous frapper aussi et parfois qu’il y parvienne, il faut s’étonner
surtout que cela puisse étonner.
Si ces attaques n’ont pas constitué une
surprise et que nous changeons nos politiques de défense et de sécurité, il
faut alors s’interroger sur la pertinence et la cohérence de celles-ci, voguant visiblement non pas au rythme de la réalité objective de la guerre (dont l’existence
a été rappelée par le Premier ministre dans son discours du 9 janvier) mais
de l’émotion en cours. Les attaques du 7 au 9 janvier 2015 à Paris ont fait moins
de victimes que dix jours de meurtres en France mais leur impact a été
évidemment très important pour diverses raisons. L’une d’entre elle est l’incapacité
des gouvernements successifs à appliquer le principe de résilience apparue dans
le Livre blanc la défense et de la sécurité de 2008. On expliquait alors qu’il
fallait s’attendre à plus de violence dans les engagements. Depuis cette
époque, combien de fois avons-nous entendu nos dirigeants expliquer que dans
une guerre, il fallait s’attendre à prendre des coups, y compris sur le sol
national ? Que les services de renseignement et de police, malgré leur
efficacité, ne pourraient jamais tout éviter, de la même façon que dans d’autres
pays amis également impliqués et aux services tout aussi compétents ? Que
Mohamed Merah n’était pas une anomalie ? Qu’il y aurait, quoiqu’il arrive,
du sang et des larmes mais que c’était le prix à payer pour la victoire ?
On a clairement préféré une politique anxiolytique
et nous continuons dans ce sens. On persiste à ne pas faire la guerre mais à
gérer des risques et de l’angoisse. Les militaires engagés dans l’opération
Sentinelle ont pour le gouvernement le même rôle et, à peu près la même
utilité, que les vaccins achetés en masse pour lutter contre le virus H1N1.
Pour
les armées, bien sûr cette opération constitue une victoire, non pas contre l’Etat
islamique mais contre leur ennemi majeur : Bercy. Elles ont saisi l’occasion
de l’émotion pour, en montrant les hommes, démontrer que ceux-ci ne sont pas
seulement des coûts. C’est une victoire contre la bêtise comptable, une des premières
contre cette préférence française pour le chômage, la délocalisation, les externalisations et les
machines (9 % du coût d'un soldat revient à Bercy sous forme d'impôts et taxes contre 51 % pour des achats industriels). C’est aussi une
victoire à la Pyrrhus.
Tout cela ne fait pas une politique, tout cela
ne gagne pas une guerre. Ce n’est pas en réduisant l’angoisse de leurs
populations respectives que les Alliés ont vaincu l’Allemagne nazie.
Une petite coquille : "Elles sont saisi l’occasion de l’émotion ..." plutôt "Elles ont saisi ..."
RépondreSupprimerMerci.
SupprimerBonsoir, je n'ai pas compris la phrase : un soldat retourne 9 % à Bercy de son coût en impôts et taxes contre 51 % pour des achats industriels. Pouvez vous m'éclairer ? Merci
RépondreSupprimerLorsque l'Etat dépense 100 euros pour la solde, l'entraînement, la nourriture, etc. des soldats, un an plus tard, il en est revenu à Bercy 9 en impôts et taxes diverses. Lorsque il s'agit d'investissements industriels, le retour final est de 51 %. Non seulement, il faut réduire le budget mais dans cette réduction, il est infiniment plus rentable de supprimer des postes que de réduire des achats d'équipements.
SupprimerOK , merci !
SupprimerD'un autre côté, sans machines supérieures la noble armée française ne ferait pas long feu face au milliard d'africains qui voudraient bien venir chez nous.
SupprimerAvant de donner des leçons à Bercy, les militaires qui ne veulent pas de 4*4 français, et qui se courroucent qu'on ose seulement se poser la question, feraient bien de se demander ce qui leur restera à défendre (et ce qui restera pour les payer) quand tout aura été délocalisé chez les chinois.
Tout en étant totalement opposé aux suppressions de postes, il faut quand même constater que tout ne tourne pas autour de l'armée, dans le monde actuel. Et que les rancoeurs contre telle ou telle autre partie de l'économie française ne sauveront pas les postes, au contraire.
MB
SupprimerBonsoir, les militaires veulent juste un véhicule de service courant pour l'entrainement (la préparation opérationnelle, pas le combat) qui transporte jusqu'à cinq personnes adultes dans de bonnes condition de confort sur des distances moyennes (jusqu'à 300 km) ou sur terrain varié tout chemin (4x4), avec équipements (sacs et autres paquetages) et une capacité de charge utile de 600 kg en plus. Si ça existe en bleublancrouge, je prends ... sinon ?
C'est rigolo ce que vous dites anonyme, car les dacia ne sont pas produites en France.
SupprimerEt seriez-vous capable de regarder un soldat dans les yeux en lui expliquant que la nationalité de l'actionnaire importe plus que la qualité de son équipement, et in fine sa vie?
Tout cela ne fait pas une politique…
RépondreSupprimerAu sens classique, la stratégie est « l’art de créer de la puissance à partir de la force » afin d’obtenir un gain politique. Sous-entendu, vis-à-vis de l’environnement extérieur. Si maintenant, on part de l’hypothèse que le gain prioritairement recherché est à visée intérieure, cela fait bien une politique. De gribouille et à court terme, certes, mais en adéquation avec l’Objectif principal qui resterait la victoire aux présidentielles. Ce paradigme ‘auto-centré’, consisterait alors à utiliser l’armée comme un outil de communication gouvernementale à usage interne. Cette hypothèse permettrait également d’expliquer la sur-exploitation des armées dans les différentes Opex, ainsi qu’une posture diplomatique dont on peine à trouver, hors opportunisme commerciale, la cohérence.
Ce serait en quelque sorte, la victoire de la ‘com’ sur la stratégie. D’un côté, des milliers de militaires dans les rues de nos villes, au détriment des jours de repos et d’entrainement, transformés en cibles pour n’importe quel apprenti terroriste armé d’une simple kalachnikov. De l’autre, des Opex comme Serval qui voient les objectifs initiaux clairement énoncés, se dissoudre dans les sables africains de l’opération Sangaris.
Finalement, rien de bien surprenant de la part de gens qui confondent le gouvernement d’une nation avec la gouvernance d’entreprise.
On ne fabrique plus nos munitions on achète sur étagère à partir de là faut pas être étonner pour le reste !
RépondreSupprimerUn état responsable ce doit de planifier économiquement et industriellement une politique de défense à moyen et long terme :
définir les missions en découle les moyens humains et l'investissement en matériel avec l'étalement d'un budget sur au minimum une décennie mais dans notre cas présent nos politiques partent d'un budget hypothétique pour la durée d'un quinquennat qui sera alloué à la défense ensuite ils en définissent de pseudos missions d'habillage du budget pour les médias puis les moyens humains et investissement en matériel à fin d'amuser la galerie bref ils mettent la charrue avant les bœufs pas étonnant que cela n'avance pas !....