Après
une campagne où les questions de défense n’ont guère eu de place et à quelques
mois d’un probable nouveau livre blanc, Martial Foucault procède à une remarquable
analyse du 4e poste de dépenses de l’Etat. Ce que j’en retiens :
En
valeur absolu, le budget de la défense est passé d’un plus haut de 36 milliards
d’euros (constants 2000) en 1991 à un plus bas de 29 milliards en 2002, pour
remonter à environ 32 milliards 2010, soit le budget de…1981. Au passage, de 1981 à 2010, le budget de la défense a augmenté en moyenne de 0,17 % sous les gouvernements de gauche et de 0,12 % sous les gouvernements de droite. En valeur relative, la défense est passé de 14 % du budget de l’Etat en 1991
à 9,5 % en 2010 et de 3,3 % du PIB à 1,7 %.
Si
la baisse globale de – 18 % des années
1990 correspond à un phénomène général de prise de « dividendes de la paix », (le budget militaire des Etats-Unis diminue de 16 % pendant la même période,
celui de la Russie s’effondre, etc.), la quasi-stagnation française depuis 2002
nous a laissé « sur place » face au + 170 % de la Chine, + 79 % de la
Russie, + 59 % des Etats-Unis, + 18 % du Royaume-Uni (les quatre autres membres
permanents du conseil de sécurité). La France est désormais classée au 5e
rang, juste devant le Japon mais en passe d’être très vite rattrapée par l’Inde
(+ 66 % en dix ans). Pour autant, à l’exception du Royaume-Uni, cet effort est
encore très supérieur à celui des autres nations européennes. Si chaque
Français dépense environ 600 euros chaque année pour la défense (comme le Suédois),
pour l’Italien la facture n’est plus que de 370 euros et pour l’Allemand de
230.
La
structure même de ce budget pose problème avec un maintien à l'équilibre du budget de
fonctionnement (le coût de la professionnalisation a été compensée par la
réduction des effectifs) et une réduction des dépenses d’équipements passant de
18 milliards par an en 1991 à une moyenne de 14 milliards (avec de fortes
variations) depuis 1998, alors même que les programmes lancés pendant la guerre
froide et maintenus depuis sont de plus en plus coûteux.
Depuis
1994, aucune loi de programmation militaire (LPM) n’a été respectée, le
programme d’équipements des forces (le BOP 146 en termes LOLF) servant largement
de variable d’ajustement (avec une terrible année 2002, où 2,6 milliards d’euros
d’équipements ont disparu). Le résultat a été un décalage permanent entre des
autorisations d’engagement et les crédits de paiement. En clair, la défense n’arrive
pas à payer ses commandes qui sont donc réduites, mais le coût unitaire des
matériels explose, et/ou reportées, ce qui implique le paiement d’indemnités et le maintien en service de
matériels anciens de plus en plus couteux à entretenir ou même des
programmes d’attente non prévus initialement comme le Mirage 2000-5.
Le
Livre blanc (et la Révision générale des politiques publiques) de 2008 suivi de
la LPM 2009-2014 prévoyait bien de résoudre le problème en sacrifiant des
effectifs (- 54 000 postes, soit bien au-delà d’un retraité sur deux),
tout en promettant une augmentation du budget annuelle d’1% jusqu’en 2020. La
loi de programmation des finances publiques de septembre 2011 a consacré
l’échec de ce plan. Les réductions d’effectifs ne permettent de financer qu’environ
4 % de la LPM, les recettes exceptionnelles espérées (ventes diverses) sont
loin du compte et le 1 % d’accroissement annuel est inférieur à
l’ « inflation militaire », c’est-à-dire l’augmentation moyenne
du coût des équipements et des hommes (soldes, pensions, etc.). Malgré le plan
de relance de 2009, il manque toujours 46 milliards d’euros (dont 30 accumulés
depuis 2006) pour payer tous les équipements prévus et la réduction des
effectifs comme celle des moyens d’entraînement ou d’entretien atteint ses
limites.
Bonjour Colonel,
RépondreSupprimerJe souhaite vous signaler ce rapport d'information de l'Assemblée nationale, réalisée par les députés Adam, Fromion et Baudouin, à propos de l'exécution de la précédente LPM (2003-2008).
http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i1378.asp
Le rapport se lit bien et vite.
Il est très bien expliqué comment l'Etat est responsable des dérapages des coûts des programmes.
Cordialement