mercredi 23 novembre 2016

Le point Fillon

Les primaires du Centre et de la Droite constituent un exemple parfait d’un concept stratégique un peu méconnu mais pourtant essentiel, celui du « point de bascule ». Le point de bascule, c’est ce moment où une situation apparemment figée s’emballe brusquement et les événements s’accélèrent jusqu’à la survenue d’une conclusion imprévue dans ses délais et/ou ses résultats. 

Électeurs snipers

Ces points sont presque toujours le résultat d’un changement soudain des anticipations qui entraîne un changement, tout aussi soudain, des comportements. En l’occurrence, le point de bascule des primaires est survenu à la fin du mois d’octobre lorsqu'est apparue la possibilité de voir François Fillon au deuxième tour. Parti de très loin, François Fillon a commencé par monter dans les sondages avec l’exposition médiatique des débats et des émissions politiques, champs où il s'est avéré de l’avis général plutôt convaincant. En même temps, il n’était pas pour autant un inconnu pour le  grand public, comme Jean-Frédéric Poisson par exemple. Sa progression était donc plutôt logique mais pas à la vitesse que l’on a connue ensuite. Pour atteindre un tel niveau, quasi exponentiel (1 % d’intention de vote en plus chaque jour), il a fallu l’apparition d’un autre facteur : le changement soudain de perception par les électeurs. 

Dans un pays démocratique, les scrutins restent une somme de choix individuels confidentiels en fonction d’anticipations, que l’on cherche à conforter ou compromettre. Dans un contexte figé où deux candidats se détachent très nettement en tête, la scène paraît déjà jouée pour un premier tour. On peut apprécier un des deux candidats majeurs et souhaiter que la situation ne change pas, on peut être démotivé (à quoi bon se déplacer puisque tout est joué ?), on peut aussi en profiter pour appuyer un outsider proche de ses convictions tout en sachant que cela ne changera sans doute pas grand-chose. Lorsqu’il apparaît qu’un troisième candidat peut prétendre aussi au second tour, la situation change alors radicalement. L’attention se porte d’un seul coup sur cette confrontation à trois, au détriment des autres candidats. 

Une décision stratégique est toujours la confrontation entre des options et des critères de choix, sous contrainte de temps. En situation d’urgence, on choisit la première option qui correspond aux critères de choix. Avec un peu plus de temps et d’effort, on sélectionne parmi les options qui confortent ses critères. Toute la difficulté des prédictions électorales provient de la multiplicité de ces critères. On peut chercher à les cerner en catégorisant les électeurs, en estimant qu’une catégorie (les hommes CSP+ retraités par exemple) aura tendance à voter plutôt selon tels critères. Cette évaluation serait déjà complexe à réaliser en situation holiste (tous les membres d’une catégorie votent tous de la même façon), elle l'est encore plus en situation réelle, interactionniste, où les individus ne se conforment pas tous à l’attitude que l’on attend de leur groupe d’appartenance. Pour peu que les évolutions socio-économiques mais aussi politiques, reconfigurent assez rapidement les catégories et leurs critères de choix (appelons cela les valeurs), pour peu aussi que les « rebelles » à leur catégorie soient plus nombreux et le comportement collectif devient très difficile à anticiper. Il peut même changer du tout au tout puisqu'un changement de contexte change aussi la confrontation des possibilités et des valeurs. On peut se retrouver ainsi en soudain décalage avec ce que l’on croit être encore la vision de l’opinion publique. Le 9 février 1933, quelques jours après l’arrivée au pouvoir d’Adolf Hitler, les membres de l’Oxford Union votaient à 253 contre 153 qu’en « aucun cas, ils ne combattraient pour le Roi et la Patrie ». Six ans plus tard les mêmes étudiants d’Oxford se portaient massivement volontaires pour servir dans la Royal Air Force. A la mobilisation d’août 1914, on estimait qu’il y aurait 13 % de réfractaires en France (un an plus tôt, il y avait eu des mutineries à l’annonce de la simple annonce de l'allongement de la durée de service), il y en eu en réalité 1,5 %.

Dans le cadre, moins dramatique, d’une primaire à un parti politique, l’incertitude est très grande puisque, à l’intérieur même de l’électorat « normal » du parti, les votes peuvent glisser facilement d’un candidat à l’autre (les programmes ne sont pas très éloignés) et qu’en étant ouverte, le nombre de « volontaires » extérieurs peut aussi être très important (on peut avoir une dilatation du nombre de votants du simple au double). Les critères de programmes jouent bien sûr mais par rapport à une élection nationale moins que l’appréhension des personnes ou les calculs. Très clairement, lorsqu’un choix (François Fillon) est venu possiblement satisfaire le critère « élimination de Nicolas Sarkozy » beaucoup ont saisi cette possibilité. Certains ont pu adhérer aussi à la personne et au programme de François Fillon mais pour d’autres ce n’était pas le critère principal. Le bulletin Fillon était pour eux un tir (politique) de sniper dans ce qui devenait soudain une embuscade. 

Significativement, au vu des résultats de premier tour si l’électorat de Nicolas Sarkozy était, à 68 %, au cœur du parti (le carré des « fans »), si celui d’Alain Juppé était réparti presque équitablement entre LR (31%), UDI et gauche (23-25% à chaque fois), celui de François Fillon a été le plus éclaté politiquement. Il a attiré 400 000 électeurs LR de plus que Nicolas Sarkozy mais aussi beaucoup d’électeurs des autres grandes tendances politiques (100 000), du centre (220 000) et du FN (180 000) et surtout plus de 410 000 sans appartenance politique affirmée (85 000 seulement pour Sarkozy). Incontestablement, le choix Fillon a dépassé le choix purement politique. Encore une fois, il a pu séduire pour ses qualités intrinsèques mais aussi certainement pour ses qualités relatives de capacité d’élimination de Nicolas Sarkozy et, en moindre partie, d’Alain Juppé, certains électeurs n’ayant choisi celui-ci que par sa capacité à barrer la route à l’ancien Président de la République. 

Avec le second tour, le contexte et les anticipations (pour les élections présidentielles désormais) changent aussi radicalement, ce qui peut introduire des phénomènes compensateurs à ce qui, au soir du premier tour, semblait être un triomphe annoncé pour François Fillon. 

Coincer la bulle

Dans l’absolu, les bascules de ce genre ne devraient pas constituer une surprise, dans les faits c’est presque toujours le cas. Les estimations de vote donnent une image instantanée du comportement attendu. Outre que leur marge d’erreur est grande dans un contexte aussi volatil que des primaires d’un parti, elles sont forcément, le temps de les réaliser, en décalage avec un phénomène de bulle qui évolue très vite (et qui est accéléré par ces mêmes estimations). L’isoloir même, cet endroit rare sans aucune surveillance, constitue une zone à forte gravité. Plus on s’en approche et plus les comportements sont affectés. Les tout derniers jours, voire les dernières heures, sont toujours des périodes de fluctuations que l’on maîtrise mal.

Par ailleurs, si les sondeurs peuvent indiquer des tendances, ils émettent rarement des jugements radicaux sur l’avenir, essentiellement par peur d’un échec qui mettrait en cause leur crédibilité. Dans la mesure où ceux qui commandent les études ne demandent pas des hypothèses pondérées de probabilités, ce qui est pratiquement la seule démarche rationnelle, mais de quoi annoncer des situations précises (sans même préciser les fourchettes d’erreur), les erreurs sont fréquentes voire obligatoires. Or, si un institut de sondage cherche évidemment à répondre à la demande, il doit assurer aussi sa crédibilité à plus long terme, et le coût, en termes d’image, d’une erreur est toujours plus important que celle d’un succès (l’intensité ressentie d’un échec est environ quatre fois plus importante que celle d’un succès selon les travaux de Daniel Kahneman). Le très sérieux journal Literary Digest ne s’est jamais remis d’avoir, à grand frais, réalisé une étude où il prédisait une large victoire de Landon sur Roosevelt aux élections présidentielle de 1936. 

Pire encore, le coût d’un échec conformiste n’est pas le même que celui d’un échec audacieux. Il vaut mieux se tromper comme les autres que d’avoir envisagé quelque chose d’original. Encore ne parle-t-on là que de dégâts d’images, les annonceurs de catastrophes pouvant aussi payer plus chèrement leur audace. L’Histoire est pleine de dictateurs surpris par les révolutions alors que leur service de renseignement politique avait nettement perçu, au moins à la base, ce qui se passait. Les leaders des démocraties, entourés de courtisans, de cabinets chiens de garde, ne rencontrant les gens du monde extérieur que dans des réunions de fans, peuvent être aussi victimes de ce genre d’aveuglements vis-à-vis du rejet qu'ils suscitent. 

Tout incite donc à la prudence des jugements lorsque l'erreur se paye d'une manière ou d'une autre et d'autant plus lorsque ce jugement influe lui-même sur les événements.  Tout incite donc aussi à l’erreur importante lorsque survient d'un seul coup un emballement ou une bulle quelconque. 

Encore ne parle-t-on ici que des organismes de sondage. Les analystes politiques sont cependant soumis à des biais et des influences similaires. Si un jugement peut modifier les anticipations, il est toujours tentant de porter des jugements qui confortent les anticipations que l’on souhaite, quitte à tordre un peu la réalité des faits voire à les occulter lorsque leur simple expression peut « faire le jeu de ». Cela est évident pour les acteurs politiques (qui annoncent forcément la victoire en espérant la provoquer) mais personne n’est vraiment dupe. 

Cela est plus subtil pour les journalistes arbitrant entre l’objectivité que leur impose leur déontologie et leurs préférences personnelles. Contrairement aux philosophes, qui par leur statut étrange peuvent visiblement dire n'importe quoi (et c'est tant mieux, à condition de parfois faire surgir un concept intéressant), les journalistes payent aussi parfois les erreurs, et notamment les audacieuses. Ils sont conduits logiquement à aligner leur analyse sur des sondages qui lorsqu'ils sont longtemps à peu près identiques donnent l'impression, par ligne de fuite, de donner une image solide de l'avenir. A force de se répéter, il leur devient de plus en plus difficile de se déjuger même quand apparaissent de nouvelles informations. Plusieurs expériences (Stuart Oskamp, en 1965 par exemple auprès de psychologues) ont ainsi démontré qu'à partir d'un certain seuil, les nouvelles informations ne servaient plus à améliorer la qualité des jugements des experts mais à les conforter. 

Les opinions, ça colle. Plus le temps passe, plus tout le monde est d'accord et plus il est difficile de changer surtout quand il faut le faire vite et sur des données incertaines. Cela est encore plus difficile lorsque cette nouvelle perspective déplaît. Cela demande une grande force de caractère rare. On trouve presque toujours après une surprise que certains l'avaient prédite mais qu'ils n'ont simplement pas été visibles, c'est-à-dire exposés médiatiquement. 

Army of Me 

Heureusement, maintenant il y a aussi le Logrus. Les comportements des électeurs, qui, dans un contexte de « longue traîne» (quelques grands médias suivis d'une multitude d'autres sources d'informations ) ont des moyens de s'informer plus variés qu'auparavant peut ainsi échapper à celui des experts les plus en vue. Dans la mesure où avec l'accès large avec l'information on peut voir apparaître plus facilement des experts-amateurs (l'information collaborative), d'autres influences peuvent ainsi jouer, à l'insu des grands médias, pour créer des mouvements qui, lorsqu'ils rencontres des attentes, peuvent être assez puissants pour entraîner des bascules. On se souvient de l'influence d'un Etienne Chouard, parfait inconnu, dans la victoire du non au référendum de 2005, en contradiction avec l'immense majorité des acteurs politiques et des analystes des grands médias mais plus en accord avec un malaise grandissant vis-à-vis du projet. Ce qui est intéressant avec ces primaires, c'est qu'il n'y a même pas eu besoin d'experts-amateurs, l'expertise de chacun a suffit pour faire basculer les choses.


Le citoyen moderne est à la fois plus informé que jamais (à condition de faire un effort) et visiblement frustré d'une offre politique qui apparaît comme à la fois peu diversifiée et impuissante face à des problèmes graves. Le vote est un des rares instruments qui s'offre à lui de surmonter cette frustration et de se rebeller, au mépris parfois de toutes les prédictions, avec parfois même aussi l'envie de les déjouer et de faire mal. Nul doute que l'on assistera encore à des points de bascule et des surprises.

20 commentaires:

  1. #MichelGoya2017
    (brillant !)

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  2. Excellent article comme toujours... Mais les Français abordent de problème de manière plus simple. D'un côté un Fillon affirmant ses convictions, droit et digne, ceux qui ont voté pour lui ont cette conviction, de l'autre un candidat qui s'est trompé d'adversaire, sous-estimant l'ennemi le moins dangereux à ses yeux. Il est aujourd'hui désarçonné.

    Problème d'analyse puis problème de stratégie... L'attaque est la meilleure défense.. Mais Juppé a un problème, il ne connaît pas son électorat et suppute sur ses alliés.. Bref, il part en guerre avec des troupes dont il ignore la composition et la motivation. Ca sent la défaite en rase campagne et sans gloire.

    http://www.athena-vostok.com/juppe-contre-fillon-quand-ya-du-flou-ya-un-loup-defense-et-diplomatie


    http://www.athena-vostok.com/juppe-contre-fillon-quand-ya-du-flou-ya-un-loup-defense-et-diplomatie

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  3. Mon colonel,

    Dans cet excellent article vous démontrer de fait les limites de la méthodologie des sondages actuels, qui sont quasi tous basées sur la a segmentation par quotas. Celle-ci ne permet pas de percevoir les changements de fond des opinions, de plus quand elles sont relativement rapides, et ce quelque soit le thème sur lequel porte l'étude. Cela a été démontré et validé dans les années 80 à 2000, par Bernard Cathelat avec ses typologies basées sur les sociostyles : produites par l'ex CCA de Havas. Cette approche typologique seule permet de cerner les évolutions d'un société, notamment sur le fond, et de percevoir ses changements.

    La segmentation par quotas, certes la plus aisée et moins coûteuse a mettre en oeuvre, elle repose sur un postulat quasi invariant : sexe, CSP, âge, localisation géographique, etc.... Ceux-ci sont censés expliquer tous nos comportements et opinions, mais ce n'est qu'une photographie l'instant T de l'opinion et surtout reposant sur un postulat fort contestable. En caricaturant, on pourrait dire que c'est une approche "Marxiste".

    L'approche typologique est bien plus complexe, coûteuse, et demande de travailler sur des échantillons bien plus vastes que la précédente: de l'ordre de 10 000 au lieu de 500 à 1 000 pour la précédente. Cela entre autre car les différentes typologies - dénommées sociostyles par Cathelat - ne sont pas accessibles directement : identifier et choisir un homme ou une femme, cadre supérieur ou agriculteur, etc... est aisé pour une enquête par segment et quotas, à contrario il est impossible dans le cadre d'une par typologie d'identifier et choisir au départ de l'enquête de connaître à quelles typologies appartiennent les interviewés. Ces typologies n'apparaissent qu'après analyse des résultats, car on fait appel à un processus ascendant reposant sur l'AFC ( analyse factorielle des correspondances), alors qu'avec la méthode segmentaire et quotas on est dans un processus descendant.

    Le coût résultant de son vaste échantillon, la complexité de son questionnaire et donc la durée des interviews, d'une enquête typologique reposant sur l'AFC, font entre autre que tous les médias se rabattent sur les enquêtes par segmentation et quotas. Même Havas depuis sa prise de contrôle par Bolloré, a mis fin au CCA et aux études typologiques de Bernard Cathelat : rapport coût / bénéfice insuffisant et aussi trop dérangeante.

    Pour finir trois exemples emblématiques que les enquêtes pas segmentation et quotas n'avaient pas vu venir ou au mieux minorer : victoire de Mitterrand en 81, élimination Jospin au profit de Le Pen en 2002 et échec du référendum sur l'Europe en 2005. Alors que ces trois événements, ils étaient "inscrit" dans les résultats des études typologiques de Cathelat et de son CCA.

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    1. Pas prévue la victoire de Mitterrand en 81 ?
      Relisez Stoetzel.
      http://www.persee.fr/doc/rfsoc_0035-2969_1982_num_23_1_3539
      Finalement, on ne peut que souscrire à ce que Louis Harris écrivit pour le Chicago Tribune, paru le 22 juin 1981 : « Si on avait accordé davantage d'attention aux sondages d'opinion publique, qui tous ont prédit exactement le résultat de l'élection, on aurait retiré à l'événement beaucoup de son élément de surprise ».

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    2. sur les "sondages

      quelques précisions : on est aussi dans la confrontation de la présentation (subliminale) d’une situation comptable et précisément connotée dans le temps et l’espace avec une situarion dynamique et différente par nature.

      on en trouve un exemple avec la "projection " du résultat des élections européennes pour le Front national sur celui des municipales quelques mois plus tard. Le “1 er parti de France” n’obtient que 13 municipalités. Mais bon, ces fautes méthodologiques permettent aux “experts” de faire des papiers.

      Ensuite les médias ont traité les primaires à la manière d’une présidentielle. Sauf que ce n’est pas une présidentielle.

      Tout sauf Sarkozy à la primaire cela n’a pas la même valeur , le même poids dans la décision que tout sauf Sarkozy au 2 ème tour de la présidentielle face à Hollande, Mélenchon ou Le Pen.

      Les manoeuvres même réalistes , ce n’est pas la vraie guerre.

      Pour ce qui est des “sondages” l’escroquerie de base consiste plus ou moins à les assimiler à des estimations sorties des urnes.

      Votre bulletin dans l’urne, vous ne pouvez plus en changer. On rentre donc dans un cadre fini, purement statistique, où la valeur de l’estimation finale dépend de la représentativité et de la valeur des échantillons choisis. Plus on va vers le résultat plus la “fourchette” se précise.

      Un sondage d’opinion c’est une photographie au temps T dit-on.

      Avez -vous voté aux primaires ? Réfléchissez à comment vous avez pris votre décision. En ce qui me concerne j’ai changé 4 fois d’avis ! … pour finalement m’abstenir. Imaginez un sondeur m’ayant suivi.

      Qui plus est : les sondages sont biaisés : questions ouvertes ou fermées ? etc

      Je suis l’un des sondés français. On me sonde régulièrement tant au plan national que local en Région parisienne.

      Comme je répond toujours, je suis dans l’échantillon représentatif.C’est facile pour eux.

      Le plan local est très intéressant. Mon maire veut savoir ce que ses administrés pensent de lui et de son action. OK

      Question : que pensez-vous de la qualité des cantines scolaires de la ville ?

      j’ai 66 ans, je n’en pense rien même par oui-dire, mes enfants et petits enfants n’habitent pas dans ma ville. Je le dis à mon interlocutrice au téléphone. Je bataille pendant 5 minutes. Monsieur IL FAUT REPONDRE.

      Déjà il y a une vingtaine d’années on m’avait demandé pour la Présidentielle “si je pensais que Raymond Barre et Valéry Giscard d’Estaing devait continuer à jouer un rôle dans la politique française ?”

      la case ne sais pas, je n’en ai rien à foutre n’existait pas il FALLAIT répondre.

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    3. La présence au second de JMLP le 21 avril 2002 n'avait été une aussi grande surprise que cela pour les spécialistes :
      Je crois que c'est dans le long reportage consacré à la campagne de Jospin ; on voit, quelques jours avant le premier tour, le sondeur de l'équipe alerter les politiques sur la convergence des courbes Jospin / Le Pen. Les politiques lui rient au nez

      Et les différents sondeurs avaient remarqué une brusque remontée de Fillon, sans toutefois prévoir ce raz de marée

      Philippe Dubois

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  4. Je suis addict, sans modération et depuis longtemps. ..

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  5. Ce que nous retirons du premier tour de la primaire de la droite et du centre, par notre petit bout de la lorgnette de Marc (Prénom) Pierre (Nom)
    Cette consultation est un épisode de notre vie publique intéressant quant aux stratégies de campagne observées. Le blitzkrieg médiatico-politique (Vite faire pour vite plier au cours de ce dernier trimestre) paraît avoir été privilégié par les camps Sarkozy et Juppé qui ont mobilisé des salles de conférence à grande capacité, une multitude de drapeaux tricolores et les médias friands d'images de foules en liesse. Le camp Fillon paraît avoir opté pour une stratégie « fontainière » (adjectif dérivé de La Fontaine), un mix du Lièvre et la Tortue et du Laboureur et ses enfants, une tournée pré-consultative ayant duré trois ans, un lien entre Paris et la province maintenu en permanence par les équipes du candidat et un programme de gouvernement longuement réfléchi et travaillé.
    Le cadre de la consultation en forme de « bataille ouverte » (Le nombre de votants n'étant connu de personne à l'avance) a favorisé un résultat éloigné des prévisions sondagières, alors que la marge d'incertitude est moindre pour une élection présidentielle, en forme de « bataille fermée » (Le nombre d'électeurs, supposés votants, étant connu de tous à l'avance). En élection ouverte, les deux grands facteurs d'indécision, et de décision par voie de conséquence, sont le nombre définitif de votants qui ne sont pas a priori électeurs, hormis les affiliés aux partis parties prenantes à ce scrutin, et les choix individuels, versatiles jusqu'au dernier moment (les électeurs snipers), se portant sur tel ou tel candidat. En élection fermée, les facteurs de décision sont les électeurs classés selon leur catégorie socio-professionnelle de rattachement (les fonctionnaires, les agriculteurs, les artisans, les professions libérales, les chômeurs, les hommes CSP+ retraités, etc.) et les cadeaux faits auparavant par le titulaire du poste-candidat/promesses matérielles à concrétiser ou non par tout candidat vis-à-vis de ces catégories en fonction de leurs intérêts propres.
    Un dernier enseignement de cette consultation est que, de manière paradoxale, elle apparaît comme une victoire inattendue du libre arbitre individuel contre un système collectif teinté de démagogie fonctionnant en mode auto-programmé.
    Salutations à tous.

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    1. @ Anonyme24 novembre 2016 à 11:03

      Exact Stoetzel (un des "pères" des enquêtes d'opinions en France), il fut quasi le seul avec l'institut Louis Harris à avoir prédit la victoire de Mitterrand en 81. Les autres instituts, travaillant tous avec la méthode segmentation et quotas, ils ne l'excluaient pas mais étaient nettement plus circonspects. En toute honnêteté il convient de souligner que la majorité des commentateurs-analystes politiques, interprétaient leurs résultats sans tenir compte des marges d'erreur.

      Mais dès 80 il ressortait clairement, dans la dernière étude typologique de Cathelat et du CCA, un décrochage de VGE au sein du corps électoral. Pour la petite histoire Jacques Seguela qui s'est toujours vanté d'avoir faire élire en 81 François Mitterrand, il n'a fait que décliner dans sa campagne publicitaire électorale les résultats de l'étude de Cathelat. Bien évidemment tout à sa mégalomanie, il s'est bien gardé d'en faire état publiquement,

      @ Anonyme24 novembre 2016 à 13:49
      ".... les facteurs de décision sont les électeurs classés selon leur catégorie socio-professionnelle de rattachement (les fonctionnaires, les agriculteurs, les artisans, les professions libérales, les chômeurs, les hommes CSP+ retraités, etc.)..."

      Exact c'est le cas dans toutes les enquêtes basées sur une segmentation par quotas, mais le lien CSP avec votes ou autres décisions n'est bien souvent plus le facteur décisifs de celles-ci depuis les années 80. Entre autre car cette segmentation par CSP est en partie obsolète, elle fut créé en 46-47, et surtout ne prend pas en compte la diversité des modes de vie et opinions qu'elles recouvrent. Donc le socle explicatif d'ordre psychosocial n'est pas pris en compte, et c'est lui qui est primordial.

      Exemples :
      Les CSP + des grandes agglomérations recouvrent des bourgeois "traditionnels-classiques" en terme de mode de vies et d'opions, et des "bobos" ayant le même niveau de revenus mais aux opinions diamétralement opposés. Même si on tient compte non de la CSP mais de la profession exercée, c'est pareil : informaticiens profession relativement nouvelles.
      Les CSP ouvriers et employés recouvrent des populations très hétérogènes, non pas en terme de revenus, mais de mode de vies et valeurs dominantes : la 2° et 3° génération des descendants d'immigrés d'AFN-Afrique sud sahélienne vivant en banlieues, est quasi aux antipodes dans ces domaines avec les français dit "de souche" vivant dans les banlieues excentrées ou villes périphériques : voir les travaux du géographes Christophe Guilluy.

      Ce phénomène de non pertinence de l'approche par CSP, et donc des études par segmentation en découlant, a été nié vigoureusement et même combattu jusque vers 2010 par la majorité de "l'intelligentsia" française. Car celle-ci entrait en contradiction avec sa doxa plus ou moins marxiste qu'il l'imprégnait : voir à ce sujet le virulentes polémiques dans les années 90, de Pierre Bourdieu vis à vis de Bernard Cathelat.

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  6. Il n'y a aucune victoire de Fillon, mais une tentative de coup d'Etat catho + une magouille PS et FN pour faire élire "le plus bête". C'est du pur Sun Tzu.

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    1. Quelle finesse d'analyse ! Vous avez raison d'être "anonyme", restez le.

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  7. J'ajoute aussi que Sarko vote "pour le plus bête" récupérant ainsi la mise d'ici quelques semaines.

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  8. Oui, enfin cette bascule a quand même au bout du compte été produite par les sondages et par les experts : ils ont annoncé la remontée de Fillon, donc les électeurs des primaires se sont posés la question de voter pour lui.
    S'il y avait eu un peu plus d'écart de temps entre le débat où il a bien réussi et le premier tour, les sondages auraient été (encore) plus proches de la réalité.

    Quant à la possibilité de basculement d'une élection par un quidam, faut-il s'en réjouir ? Il y a des terroristes qui font des attentats pour faire basculer des élections, en Espagne en 2004 par exemple. Peut-être pourront-ils faire à l'avenir l'économie de la bombinette...
    La perte de contrôle de l'information est aussi une perte de souveraineté, on a un peu tendance à l'oublier dans la mystique actuel de rejet des "contraintes".

    Sur un thème voisin, ce texte de Fumaroli :

    « Même la religion chrétienne, qui, en Europe, s'est si heureusement alliée à la culture pour mieux apprivoiser la sauvagerie naturelle des petits chefs et des grands princes, n'exerçait guère sur le pouvoir prussien cette thérapie de la violence, que nous imaginons aujourd'hui, à tort, avoir été dispensée par le clergé aux seuls sujets des monarchies. Le luthéranisme était, en Prusse, religion nationale : une fonction subalterne de l'Etat. Luther avait aboli la polarité catholique entre pouvoir spirituel et pouvoir temporel et laissé aux princes laïques toute latitude d'exercer comme ils l'entendent le pouvoir absolu qu'ils ont reçu de Dieu sur les pécheurs réunis en société politique. » (Fumaroli, quand l'Europe parlait français)

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  9. Je rajouterais juste une donnée importante d'après moi, c'est le "contenu". Que ce soit sur un programme politique, ou tout simplement sur quelques secondes de télé, où l'opinion peut vaciller soudainement; parfois même à causes d'un petit filet de bave trop insistant devant les caméras de la France entière, occultant ainsi le sérieux du débat, et entament la crédibilité du candidat écumant. Peut-être qu'une petite phrase prononcée au moment du dernier débat, qu'il y a eu entre tous les candidats de cette primaire, a fait penché la balance. Ajoutez à ceci la versatilité des électeurs qui ont perdus confiance, et des médias frileux et trop partial, et vous obtenez un vote de contestation imprévu. Les électeurs de droites aillant étés déçus en votant Sarkozy auparavant, ne pouvaient finalement que continuer dans leur croyance, en choisissant celui qui se rapprochait le plus de ce dernier, c'est-à-dire F Fillon.
    Pour Hillary Clinton qui a perdu l'élection présidentiel, les sondages avaient annoncés sa victoire, elle n'a pas gagné les grands électeurs, mais elle a bien remporté le vote du peuple. Mais là encore, ne serait-ce pas une petite phrase annoncé par le patron du FBI qui aurait fait pencher la balance? On a ici encore un exemple que le contenu est plus déterminant que le contenant. Pour dire que les architecture d'analyse en la matière, peuvent d'un coup tomber à l'eau à cause d'un simple événement imprévisible.
    On sait aussi maintenant que le trafique d'influence agit aussi sur le trafique de sondage, comme on a pu le voir récemment avec la mise en examen de C Guéant, et que donc l'on peut aussi prendre ceci en compte dans les analyses qui pronostique le résultat final. Et puis il y a l'élimination d'opposant politique, qui permet d'affiner encore un peu plus l'analyse. En tout cas il n'y a pas de martingale, mais seulement des probabilités, ou des passages en force...

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    1. Après réflexion, on peut considérer que le passage en force s'apparente à une martingale, malgré que l'on sort des règles juridiques et démocratiques, ce qui tendant vers le tyrannie. Mais ça marche comme une pseudo martingale, puisque des dictateurs arrivent à se faire réélire pendant des décennies. Donc cette solution illégale de tromper les électeurs, est et reste un danger pour la démocratie. Quelque soit le pays, personne n'est à l'abri de ces stratagèmes, souvent dû à l'avidité et à la mégalomanie récurrente des hommes de pouvoir.

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  10. Un très bon article, qui a suscité de très intéressants commentaires.
    Je me permets d’apporter ma contribution…

    1° Un jeu (un champ, un espace, un marché…) peut être plus ou moins intrinsèquement instable. Une élection dans une primaire est plus instable qu’une élection opposant des candidats de partis différents, et une votation avec sondages publiés jusqu’au dernier jour l’est en général plus qu’une votation sans sondages ou avec sondages interdits dans les derniers moments.
    Celui des jeux très connus qui est le plus instable est la Bourse.
    En effet, si la Bourse est à un niveau élevé les actionnaires sont riches, donc dépenseront, donc les entreprises feront des profits : la Bourse élevée est donc à un juste prix.
    Et si la Bourse baisse fortement, les actionnaires sont appauvris, donc dépenseront moins, donc les entreprises feront moins de profits : la Bourse basse est à donc un juste prix.
    Si bien qu’en quelques jours on peut voir la Bourse s’effondrer dans un krach (ou au contraire monter), Bourse où pourtant l’essentiel des avoirs sont détenus par des professionnels très rationnels (même s’ils ne sont pas parfaitement rationnels, comme l’ont montré les théoriciens de l’école de la finance comportementale comme les prix Nobel Kahneman – que vous citez - ou Shiller).
    Autre jeu instable : la rivalité militaire entre deux puissances quand celui qui a un temps d’avance acquiert un grand avantage. Par exemple une guerre nucléaire où un des ennemis pourrait être désarmé par une première frappe.
    Autre jeu instable : la rivalité militaire entre des puissances quand l’armement offensif a l’avantage sur l’armement défensif. Il est alors très difficile de limiter la course aux armements. Et chacun des deux camps peut penser qu’il est plus fort que l’autre… A contrario, imaginons la situation inverse, où l’armement défensif prévaut. Peu importe alors qu’un des camps ait des armements inférieurs à ceux de l’autre…

    2° Vous avez raison de dire que, pour un organisme établi (un grand institut de sondage par exemple), se tromper avec les autres est bien moins coûteux que se tromper tout seul : et c’est une des raisons de leur panurgisme. Mais pour un outsider, c’est plutôt le contraire qui est vrai. Si vous êtes un outsider sur le marché des augures financiers, vous pouvez jouer la carte de prédire la catastrophe pour l’année qui vient (sachant que vous avez, par exemple, une chance sur vingt d’être dans le vrai). Soit vous perdez, et alors vous devenez un peu plus obscur que vous n’êtes, mais à peine plus. Soit vous gagnez, et alors vous vous proclamez partout l’homme qui a prédit le krach et accédez au statut de gourou, visionnaire. (Dans un autre domaine, un exemple de stratège de ce genre : Emmanuel Todd. En 1975 il a prédit la fin du communisme soviétique. Depuis, il a fait trente autres prédictions (c’est un tempérament de prophète…). Il se balade partout en rappelant celle de ses prédictions qui s’est avérée, omettant les trente autres).

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    1. Précisons que des trois joueurs, le politique, le militaire et l’économiste, c’est ce dernier qui fera la plus belle carrière. Il est le seul à pouvoir voguer de catastrophes en krachs tout en se faisant récompenser au final. Ainsi Eugene Fama, l’inventeur de la théorie des marchés efficients qui a tant fait pour favoriser l’effondrement systémique de 2008, fut récompensé par le « prix Nobel d’économie » en 2013 (traduction : le prix décerné par la Banque de Suède). Le marché a donc effectivement toujours raison : pile il gagne, face nous perdons. Magique non ?

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  11. 3° Dans cette primaire, les sondages ont, semble-t-il, ajouté à l’instabilité : beaucoup d’électeurs sont allés vers celui vers lequel ils savaient que beaucoup d’autres allaient. Par exemple, des électeurs qui voulaient un troisième homme et qui choisissaient Bruno Lemaire se sont tournés vers Fillon (ils aimaient Lemaire, mais pas au point de voter pour lui s’ils étaient tout seuls à voter pour lui) ; par exemple, des électeurs FN qui préféraient Fillon aux deux favoris et qui ne l’aimaient pas assez pour voter pour lui s’il était un des perdants mais l’aimaient suffisamment pour voter pour lui s’il était un des gagnants potentiels ; et, probablement, beaucoup d’électeurs qui ont eu une motivation légitimiste : ils veulent voter pour le gagnant, pour qu’il gagne plus largement : ils se mettent à aimer celui qui gagne.
    Je suppose qu’en général les sondages ajoutent à l’instabilité quoique on puisse imaginer aussi un effet inverse : par exemple, prenant par les sondages connaissance d’un mouvement en faveur de X, les électeurs un peu démotivés de son rival Y se remobilisent.

    4° Je ne savais pas qu’il y avait eu des réfractaires en 1914. Pourriez-vous nous donner la référence d’un ouvrage ou d’un site où cette question est traitée ?

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    1. De Marc Pierre à Jovien. L'ouvrage suivant pourrait vous apporter quelques éléments de réponse :
      Justices militaires et guerres mondiales (Europe 1914-1950), Jean-Marc Berlière et autres, Presses universitaires de Louvain, 2013

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