samedi 9 mars 2013

Sun Tzu en France-un livre de Yann Couderc


L’art de la guerre est reconnu comme étant un des classiques de la stratégie. Pourtant, son œuvre est beaucoup moins étudiée que celle de Mao ou de Guibert, sans parler de celle de Clausewitz.

Yann Couderc est un des premiers à se livrer à une analyse minutieuse du traité de Sun Tzu. Officier d’active, breveté de l'École de Guerre, il s'est pris d'intérêt pour ce monument chinois et en réalise aujourd’hui une étude rigoureuse. Déjà animateur du blog Sun Tzu France (http://suntzufrance.fr) exclusivement consacré aux recherches et réflexions sur cette œuvre, auteur de nombreux articles sur le sujet, il nous livre aujourd’hui son premier ouvrage : Sun Tzu en France.

Sun Tzu en France propose une étude inédite sur L’art de la guerre de Sun Tzu. L’ouvrage retrace l’histoire de la réception du célèbre traité en France et analyse les différentes traductions qui sont aujourd’hui proposées au public francophone. Yann Couderc répond à une multitude de questions sur Sun Tzu : Quand l’a-t-on découvert en France ? Quel accueil lui a-t-on alors réservé ? Combien de traductions françaises existe-t-il aujourd’hui ? Pourquoi sont-elles si différentes ? Napoléon s’est-il inspiré de Sun Tzu ?...

La première partie de l’étude, intitulée « Réception de Sun Tzu en France », montre que l’apparition de L’art de la guerre en France remonte à 1772, grâce à la traduction d’un jésuite basé en Chine, le père Amiot. Mais cette première introduction de Sun Tzu sombra immédiatement dans l’oubli, notamment à cause de sa concomitance de parution avec l’Essai général de tactique du comte de Guibert. Si quelques petits soubresauts se manifestèrent ensuite, L’art de la guerre ne sortit jamais réellement de sa léthargie durant les deux siècles qui suivirent. Le véritable élément déclencheur fut l’arrivée en France, exactement 200 ans plus tard, de la traduction du général américain Samuel Griffith. Probablement parce qu’apparaissant à un moment propice de recherche stratégique, cette édition connut un indéniable succès auprès des militaires. Elle resta toutefois relativement cantonnée à ce milieu, jusqu’à ce que Valérie Niquet apporte en 1988 aux éditions Economica sa propre traduction directement du chinois au français. Dès lors, le nom de Sun Tzu se banalisa auprès du grand public, d’autant plus que le monde de l’entreprise et du commerce s’empara du stratège chinois. La popularisation se manifesta de façon flagrante à partir des années 2000, où chaque année vit paraître une à deux nouvelles traductions en moyenne.

La deuxième partie du mémoire, intitulée « Sun Tzu en français », met en lumière toute l’élasticité que peut revêtir une version française de L’art de la guerre. L’auteur montre que traduire Sun Tzu s’avère en effet bien plus compliqué que traduire Clausewitz ou Mao Zedong (prise en compte de textes originaux différents, erreurs de traductions, pertes dues à des traductions successives, choix devant être réalisés face à la polysémie des caractères anciens, etc.). L’étude montre bien que le lecteur français se trouve aujourd’hui devant une palette de textes dont les différences sont par endroits réellement fondamentales. Au final, la simple étude comparative des éditions françaises met en lumière combien le traité de Sun Tzu est définitivement plus long et complexe à lire que les quelques dizaines de pages qui le composent le laisseraient penser de prime abord.

Paru aux éditions Nuvis, ce livre de 224 pages est agrémenté de très nombreuses illustrations couleur. La démarche, autant historique que philologique, aboutit à nous faire mieux appréhender ce classique de la stratégie qu’est L’art de la guerre. Le public visé est le lecteur francophone non-sinologue. L’étude vient d’ailleurs d’être récompensée du Prix scientifique de l’IHEDN. L’ouvrage a même retenu l’attention de Jean-Pierre Raffarin (l’ancien Premier ministre est un grand connaisseur de la Chine), qui en a assuré la préface. 

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